3.- Une absence de visibilité et de cohérence dans la réforme globale. Cette situation est imputable, fondamentalement, au manque de visibilité et de cohérence dans la démarche de la réforme globale (absence de consensus politique et neutralisation des rapports de force), n'ayant jamais abordé, d'une manière claire, le futur rôle de l'Etat face aux mutations, tant internes qu'internationales. En effet, les enjeux futurs étant, essentiellement,économiques, base de tout pouvoir et, comme dans tous les pays en transition, la société algérienne se trouve naturellement confrontée à deux tendances lourdes avec, au milieu, une majorité, «le marais», qui ne comprend pas les enjeux qui seront, entre 2009/2015, essentiellement économiques, entre les acteurs défavorables et les acteurs favorables aux réformes, d'où l'importance des dossiers éminemment politiques, comme celui des hydrocarbures, lieu de production de la rente, du système financier, lieu de distribution de la rente, et celui du partenariat-privatisation, couplé avec celui d'un système socio-éducatif performant, lieu de la production de la plus value qui, en dynamique, engendrera de nouvelles forces sociales, soit rétrogrades, si l'on s'oriente vers un nouveau monopole privé, soit porteuses de progrès si l'on instaure une totale transparence pour une économie de marché véritablement concurrentielle. Aussi, la tendance rentière consiste à gérer le dossier des réformes selon une vision bureaucratique, à partir d'injonctions administratives reposant sur des relais administratifs – le bureau, nécessaire dans toute société, mais à la différence des pays développés, analysée par Max weber, étant un facteur bloquant qui participe, pour plus de 60%, au blocage de l'investissement utile. Cela se traduit objectivement, auprès des observateurs nationaux et internationaux, par un immobilisme, oubliant que le monde ne nous attend pas et que l'Algérie ne vit pas dans un îlot isolé, et que les discours triomphalistes démagogiques sont sources de névrose collective. Le bilan dressé à partir des documents officiels, largement diffusés, montre les limites de cette démarche, qui peut conduire à un échec programmé, du fait que pour masquer cet échec l'on réalise des replâtrages organisationnels, et l'on invoque la bonne santé financière, résultat de facteurs exogènes, et non du travail et de l'intelligence. En fait, cette démarche, sous l'apparence d'un slogan techniciste, sous-tend, elle-même, une vision politique et économique reposant sur l'ancienne vision culturelle : la nécessité du primat de l'offre, par le biais de l'entreprise publique à travers le rôle de l'Etat, investisseur et gestionnaire, déformant la pensée keynésienne, dont le relais par la relance de la demande globale (investissement et consommation), à travers le déficit budgétaire ciblé, donne le primat aux investisseurs privés dans la réalisation des projets, avec un rôle stratégique à l'Etat régulateur. En résumé, au moment où l'industrie manufacturière connaît une crise, rarement égalée, au niveau mondial, avec des reconfigurations importantes horizon 2015/2020, il y a lieu d'éviter des expérimentations théoriques avec des coûts faramineux pour le pays. Après deux essais négatifs de restructuration, en 2000 et 2004, par le même département ministériel, cela ne peut que conduire le pays à l'impasse, faute de vision stratégique tenant compte, tant des mutations internes que mondiales et, surtout, face à la crise actuelle, qui préfigure un bouleversement mondial (un exemple : la généralisation des voitures électriques, nouvelles normes de construction horizon 2015/2020, le transport, représentant plus du 1/3 de la consommation d'hydrocarbures dans le monde et, avec la construction, plus de 60%). En cette ère de mondialisation, il me semble erroné de parler de stratégie industrielle, ce qui supposerait une autonomie totale de la décision économique, surtout pour un micro-Etat, comme l'Algérie, alors que la tendance est aux grands ensembles, d'où l'importance d'espaces économiques fiables maghrébin, euro-méditerranéen et arabo-africain, espace naturel de l'Algérie mais d'adaptation de l'entreprise, ce qui suppose une autre vision, qui est la démocratisation de la gestion de la rente, de la dynamisation du partenariat secteur public/secteur privé, du secteur privé national et international, avec l'intégration de la sphère informelle marchande et productive, qui draine plus de 40% de la masse monétaire en circulation, qu'il s'agit d'intégrer avec la généralisation des titres de propriété. . Car, l'assainissement des entreprises publiques a coûté au Trésor public plus 40 milliards de dollars, 1991/2008. Et l'on revient à la case de départ, les banques publiques étant malades de leurs clients, les entreprises publiques, (avec des recapitalisations répétées) ce qui explique également, couplé avec l'inefficacité des dépenses publiques, que ce n'est pas une question de finances, mais renvoie à l'urgence d'un réajustement de la politique économique et sociale algérienne. En attendant de voir plus clair, le marché international étant saturé, quatre segments, à court terme, peuvent être développés : l'agriculture, le tourisme populaire, le bâtiment travaux publics, certaines PME/PMI allant dans la substitution d'importation devant tenir compte des nouvelles technologies, un bilan devises positif devant être réalisé, tenant compte des avantages comparatifs, car l'Algérie est liée à un accord de libre échange avec l'Europe, applicable depuis le 01 septembre 2005, avec une tendance à un dégrèvement tarifaire zéro horizon 2015. Aussi, il s'agit d'éviter cette vision micro-statique de restructuration industrielle et d'avoir une vision globale de restructuration globale de l'économie, s'adaptant au monde, en perpétuel mouvement car, sans la levée des contraintes d'environnement (bureaucratie et corruption, posant la problématique de la gouvernance, système financier sclérosé, absence d'un marché foncier libre, une main d'œuvre non adaptée, posant la problématique de la valorisation du savoir local, dévalorisé au profit des rentes, étant utopique de faire revenir, dans ces conditions, les compétences algériennes de l'étranger, il ne faut pas s'attendre à une relance de la production hors hydrocarbures. Car, force est de reconnaître, qu'en Algérie, qui souffre non pas d'oisiveté des facteurs de production, mais de blocage structurel, qui implique l'approfondissement de la réforme globale, en panne, n'étant, depuis 1986, ni dans une économie de marché ni dans une économie administrée – étant dans cette interminable transition. (Suite et fin)