Le changement perpétuel de cadre juridique et l'instabilité politique, économique et sociale bloquent, d'une façon directe, le transfert de technologie en Algérie. C'est du moins l'avis de l'expert international, Abderrahmane Mebtoul, qui s'exprimait à l'issue d'un séminaire international organisé à l'université de Sidi Bel-Abbès, faculté des Sciences économiques et de gestion, mardi dernier, relatif à la problématique du transfert de technologie. Selon lui, l'Algérie a connu tant de changements concernant son cadre juridique, depuis l'indépendance jusqu'à nos jours. Il rappelle, dans contexte, que l'économie algérienne a connu différentes formes d'organisation des entreprises publiques. Avant 1965, la forme d'autogestion était privilégiée ; de 1965 à 1980, nous avons eu de grandes sociétés nationales et de 1980 à 1988, il y a eu la restructuration des grandes sociétés nationales. Comme conséquence de la crise de 1986 qui a vu le cours du pétrole s'effondrer, des réformes timides sont entamées en 1988 : l'Etat crée 8 Fonds de participation qui étaient chargés de gérer les portefeuilles de l'Etat. En 1996, l 'Etat crée 11 holdings en plus des 5 régionaux avec un Conseil national des privatisations ; en 2000, nous assistons à leur fusion en 5 mega holdings et la suppression du Conseil national des privatisations ; en 2001, nouvelle organisation et l'on crée 28 Sociétés de gestions des participation de l'Etat (SGP) en plus des grandes entreprises considérées comme stratégiques et en 2004, ces SGP sont regroupées en 11 et 4 régionaux. En 2007, une nouvelle organisation est proposée par le ministère de l'Industrie et de la Promotion des investissements, articulée autour de quatre grands segments : de sociétés de développement économique qui relèvent de la gestion exclusive de l'Etat gestionnaire ; des sociétés de promotion et de développement en favorisant le partenariat avec le secteur privé international et national ; des sociétés de participation de l'Etat appelées à être privatisées à terme et, enfin, une société chargée de la liquidation des entreprises structurellement déficitaires. Cependant, en 2008, cette proposition d'organisation est abandonnée. Une commission, dont les résultats ne sont pas connus à ce jour, est créée pour déterminer la future organisation du secteur public économique. "Ces changements d'organisation périodiques démobilisent les cadres du secteur économique public, et même les investisseurs locaux et étrangers montrant clairement la dominance de la démarche administrative et bureaucratique au détriment de la démarche opérationnelle économique. On assiste à un gaspillage des ressources financières et à un renforcement de la dynamique rentière et cela bloque tout transfert de technologie", a indiqué M. Mebtoul, tout en précisant que "le blocage essentiel de l'investissement local et étranger est le terrorisme bureaucratique qui se nourrit du manque de visibilité et de cohérence dans la réforme globale". Selon lui, cette situation est imputable fondamentalement au manque de visibilité et de cohérence dans la démarche de la réforme globale (absence de consensus politique et neutralisation des rapports de force) n'ayant jamais abordé une manière claire le futur rôle de l'Etat face aux mutations tant internes qu'internationales. L'expert a tenu à signaler également que plusieurs facteurs entrent en jeu pour faciliter le transfert de la technologie, à travers notamment, l'attractivité des investisseurs. Il rappelle, à ce titre, les principaux critères de l'attractivité des investisseurs, à savoir la proximité du marché des clients et des consommateurs, la présence d'une main-d'œuvre qualifiée, la sécurité de l'environnement politique, économique et social, le niveau des charges fiscales de l'entreprise, etc. A cela s'ajoute également les indices de développement humain, notamment la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l'accès à une alimentation saine, à l'eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux, le taux d'alphabétisation des adultes et le taux brut de scolarisation. Ce dernier, selon l'expert, traduit la satisfaction des besoins immatériels tels que la capacité à participer aux prises de décision sur le lieu de travail ou dans la société. Mebtoul rappelle, dans ce contexte, que les derniers rapports du Pnud montrent que l'Algérie est classée à la 102e position sur un total de 177 pays, améliorant timidement sa position par rapport à 2005/2006 (103e) au niveau de l'indice du développement humain. Il rappelle également que le nombre de chercheurs par habitant est de 236 en Algérie, 540 en Tunisie et 2 000 aux USA, la norme internationale selon l'Unesco étant de 600. Sur un autre volet, le conférencier a dévoilé ses doutes en ce qui concerne la création de 3 millions d'emplois durant le prochain quinquennat. Selon lui, il faudra un taux de croissance entre 2009 et 2013 de 6 à 7% minimum par an. "Avec les taux de croissance de 2 à 3%, l'on pourrait créer moins de 50% du programme, à moins que le gouvernement ait des solutions innovatrices loin des actions de distribution de salaires fictifs au nom de la solidarité". Pour conclure son intervention, M. Mebtoul s'est interrogé sur le bilan de l'Agence nationale de l'investissement (Andi) qui devait favoriser le transfert technologique. Selon l'expert, cette agence tend toujours à présenter des bilans qui ne reflètent guère la réalité. "Elle avance uniquement des bilans en termes de dépôts de dossiers, mais jamais en termes de réalisations effectives". Selon lui, au moment où toutes les institutions internationales annoncent une baisse de plus de 20% des investissements directs étrangers dans le monde, en 2008, le directeur général de l'Andi, affirme le 19 janvier 2009 que "l'investissement en Algérie n'est pas touché par la crise financière". Selon Mebtoul, le bilan de l'Andi ne tient pas compte de l'impact de la crise mondiale. Synthèse de H. M.