Le doyen du théâtre algérien, Mahieddine Bachtarzi, est «une école artistique complète et hors norme», ont affirmé mercredi et des chercheurs et des artistes qui ont ajouté que personne ne pourrait jamais égaler son talent. En plus d'être un chanteur hors pair, Mahieddine Bachtarzi était l'un des piliers du septième art en interprétant des rôles dans plusieurs longs métrages, ont souligné les participants lors d'une journée d'étude consacrée à Mahieddine Bachtarzi, organisée par l'établissement Arts et Culture de la wilaya d'Alger et le Centre national de recherches en anthropologie sociale et culturelle sous le thème «Mahieddine Bachtarzi : parcours et discours». Grâce à son répertoire aussi riche que diversifié, Mahieddine Bachtarzi a réussi à amener le peuple algérien à prendre conscience de l'importance de l'art dans la société, a indiqué M. Ahmed Cheniki, enseignant et chercheur à l'université d'Annaba. Il était le seul à réussir à transporter son théâtre vers l'Algérie profonde grâce aux tournées qu'il effectuait avec ses troupes dans l'ensemble des régions du pays pendant l'époque coloniale, contribuant de façon active à vulgariser la pensée théâtrale, a ajouté l'universitaire. Le public était très réceptif au travail artistique de Mahieddine Bachtarzi qui a repris le flambeau de Allalou, lequel avait créé une rupture avec les anciens procédés qui reposaient sur l'adaptation, a indiqué M. Cheniki. D'autre part, l'artiste a encouragé la femme algérienne à investir le quatrième art en lançant plusieurs artistes féminines de renom à l'image de Nouria, Nora, Keltoum, Latifa et la chanteuse Fadila D'ziria. Le journaliste Kamel Bendimerad, a indiqué de son côté que Bachtarzi avait présenté une centaine de pièces théâtrales, ce qui en fait l'homme de théâtre le plus prolifique de l'histoire du théâtre algérien. Outre ses talents de comédien, Mahieddine Bachtarzi maîtrisait plusieurs genres musicaux tels que : le hawzi, l'andalou, lâroubi et le medh, a souligné pour sa part», M. Hadj Meliani, enseignant et chercheur à l'université de Mostaganem qui a rappelé que l'artiste avait apporté une contribution inestimable au patrimoine musical national en composant plus de 400 morceaux. Plusieurs de ses chansons étaient frappées de censure du fait du danger qu'elles représentaient pour le colonisateur qui y voyait une incitation du peuple algérien à la révolte, a ajouté le chercheur. L'artiste, qui accordait un intérêt particulier pour les jeunes et la formation, a découvert plusieurs jeunes talents, devenus par la suite des virtuoses de la musique algérienne à l'instar de El Hachemi Guerouabi, Mostafa Skendrani et Ahmed Wahbi, a-t-il fait observer. Né le 15 décembre 1897 à la Casbah d'Alger, Mahieddine Bachtarzi entama son parcours comme récitant du Coran à l'âge de 15 ans. Sa voix chaude et puissante lui permit d'être chef des récitants «Bach Hezzab» à l'âge de 21 ans. Il devint ensuite muezzin à la Grande Mosquée d'Alger, avant d'adhérer à l'association «El Moutribia» pour en devenir président en 1932. Son travail au sein de cette association lui permit d'aller en France où il fut le premier muezzin de la Mosquée de Paris inaugurée en 1962. Il investit le quatrième art en 1922 en interprétant un rôle dans la pièce intitulée Pour la patrie, alors qu'il avait déjà commencé l'écriture de sa première pièce les Faux ulémas. Après avoir occupé le poste de directeur de la chaîne musicale arabe pendant sept ans, il revint au théâtre, son domaine de prédilection, et forma sa propre troupe dont les productions connurent un franc succès. Après l'indépendance, il prit les destinées de l'Institut des beaux-arts, à Alger, entre 1965 et 1974. Il composa plusieurs morceaux lors de cette période et écrivit ses mémoires en trois tomes. Le 6 février 1986, Mahieddine Bachtarzi s'éteint à l'âge de 88 ans.