En France, le débat identitaire est devenu un champ de mines. Nicolas Sarkozy prend ses distances avec les discussions lancées par un de ses ministres-traîtres Eric Besson. Qu'est-ce qu'être Français en ce début du XXIe siècle ? Ministre de l'immigration et favori du chef de l'Etat, ex-socialiste devenu numéro 2 du parti présidentiel UMP, par le fait du prince, Eric Besson a lancé depuis quelques jours et jusqu'au fin 2010 prochain un vaste débat national sur l'identité nationale. Avec moult réunions aux coins du territoire, dans les préfectures et sous-préfectures. Avec un tel sujet, «on marche sur des œufs», révèle un diplomate à l'ONU à Genève, spécialiste de la question française. Et, quand le débat extrêmement sensible glisse très vite vers les prises de position autour du port du voile, de la burqa, du renvoi des réfugiés en Afghanistan et depuis dimanche dernier, en écho au vote suisse sur les minarets, le terrain devient un champ de mines. Protestations à gauche, gêne à droite, et condamnation de trois Français sur quatre qui, dans un sondage, y voient «une stratégie pour gagner les élections régionales» de mars prochain. Le constat en est tiré à l'Elysée puisque, sous prétexte d'un calendrier surchargé, Nicolas Sarkozy a annulé sa participation vendredi à un colloque sur l'identité nationale prévu à Paris. De plus, cela fait déjà plusieurs jours que le thème de l'identité nationale a été gommé des discours du président de la République. La querelle de l'identité nationale a soulevé de fortes polémiques sur… tout le territoire. Elle s'est enflammée et s'est enchevêtrée avec le débat sur l'immigration. Cette situation inédite à poussé mardi dernier le Premier ministre français Fillon à sortir de sa réserve légendaire pour tenter de mettre de la mesure et de la clarté dans ce tohu-bohu idéologique et politique. Une intervention de Nicolas Sarkozy à la télévision est envisagée aussi pour les prochains jours. Jusqu'ici, si l'on tente de regarder avec un peu de recul le premier bilan de ce débat, l'impression qui domine est que la créature a échappé à son créateur,que la discussion s'est emballée et qu'il sera bien difficile d'éviter que la question de l'identité nationale se concentre sur celle de l'immigration. Elle a aussi connu déjà bien des crises, à chaque grande épreuve nationale, guerre de religions, défaites militaires, occupations, démantèlement de l'empire. Elle a en revanche collectionné des épanouissements et des bouffées d'orgueil après chaque victoire, chaque réussite dans un domaine repérable et partagé. Elle a cependant sans doute jamais été mise à l'épreuve autant qu'aujourd'hui. Mal préparée, mal programmée et engagée précipitamment sur de mauvaises bases, la réflexion sur cette question essentielle «qu'est-ce qu'être français dans le monde ouvert du XXIe siècle» fait naufrage, submergée par la caricature et le soupçon.