Mardi 17 novembre, lors d'une déclaration conjointe prononcée devant un parterre de journalistes – à qui il avait été interdit de poser des questions –, les chefs d'Etat américain et chinois n'ont pu masquer les différends entre leurs deux pays, cela en dépit de leur volonté mutuelle d'établir un dialogue plus soutenu. Les tensions commerciales et la question de la sous-évaluation de la monnaie chinoise ont fait surface, durant le point de presse. Le président Hu a rappelé qu'il fallait «s'opposer et rejeter le protectionnisme sous toutes ses formes», une allusion claire à l'irritation de Pékin après l'imposition, par les Etats-Unis, de taxes antidumping sur certains produits chinois. Barack Obama s'est empressé, pour sa part, de critiquer, de manière indirecte, le refus de Pékin de ne pas réévaluer sa monnaie (ce qui favorise ses exportations) en se félicitant des «précédentes déclarations» de la Chine en faveur d'un yuan davantage ancré sur le marché. La déclaration montre, en creux, que le président chinois n'a rien cédé, sur ce terrain-là, durant sa rencontre avec le chef de l'exécutif américain. M. Obama a besoin du soutien chinois sur les dossiers internationaux brûlants, mais son voyage en Chine ne semble pas, non plus, lui avoir apporté les assurances qu'il recherchait. A propos de la Corée du Nord, les deux parties ont, certes, réitéré leur attachement à la reprise d'un «dialogue à Six» entre les deux Corées, la Chine, la Russie, les Etats-Unis et le Japon. Mais sur l'Iran, le président Hu n'a pas suivi son homologue américain quand ce dernier a déclaré que si Téhéran ne démontrait pas «ses intentions pacifiques», il lui faudrait en subir «les conséquences». Hu Jintao, opposé aux sanctions, s'est borné à répéter l'antienne de Pékin : la question iranienne sera réglée par «le dialogue et la négociation». Les deux présidents sont tombés d'accord pour reconnaître que la Chine et les Etats-Unis jouent un rôle vital dans la lutte contre le réchauffement climatique. L'urgence, a rappelé M. Obama, est de trouver à la conférence de Copenhague, en décembre, un «accord [avec] des effets opérationnels immédiats». Les deux présidents ont, malgré tout, annoncé une «initiative» en faveur du développement de véhicules électriques et une coopération sur le «charbon propre». Des observateurs estiment que le bilan du voyage du président américain est maigre, surtout si l'on prend en compte la prudence manifestée par Barack Obama à l'égard d'hôtes qu'il ne voulait pas froisser. Eux, de leur côté, avaient pris leur précaution : la conférence donnée par M. Obama, devant des étudiants à Shanghaï, lundi, n'a pas été retransmise sur le réseau national, contrairement à ce qui s'était passé pour ses prédécesseurs. Barack Obama a, certes, souhaité, durant le point de presse, que s'établisse, à nouveau, un dialogue entre la Chine et «des représentants du dalaï-lama», mais il aura été le premier président américain à ne pas recevoir ce dernier à Washington, préférant repousser une rencontre avec le chef de l'Eglise tibétaine après son voyage en Chine. Le New York Times ironisait, récemment, sur le voyage de Barack Obama «chez son banquier» chinois : la République populaire détient près de 800 milliards de dollars (537milliards d'euros) en bons du Trésor, et préfère ignorer les critiques américaines sur le taux du yuan en s'inquiétant, plutôt, des conséquences de la chute du cours du dollar. Le locataire de la Maison Blanche aura, également, choisi de ne rencontrer ni personnalité «libérale», ni avocat indépendant, ni militant des droits de l'homme, durant ses deux journées et demie de séjour, afin de ne pas apparaître à ses interlocuteurs chinois comme un donneur de leçon. Que la politique chinoise de Barack Obama porte, ou non, des fruits, dans un contexte où il ne s'agit plus d' «endiguer» le régime de Pékin, mais de coopérer avec lui, ce voyage marquera une nouvelle donne dans la relation sino-américaine : l'importance du rôle joué par la Chine pèse sur la façon dont l'Amérique la traite et négocie avec elle.