Le président français a su tirer son épingle du jeu sur ces questions. Attendu de pied ferme aussi bien par les délégués du mouvement citoyen des ârchs que par les familles des disparus regroupées autour de l'association SOS-Dispaus, pour qu'il se prononce sur ces deux dossiers épineux avec le Président Bouteflika, le chef d'Etat français n'a pas dérogé à la règle du protocole en préférant esquiver les deux questions qui lui sont posées à cet effet par les journalistes lors de la conférence de presse de lundi dernier au Palais des nations. Les ârchs et les familles de disparus n'ont pu, comme ils l'avaient projeté, rencontrer, dimanche dernier à Alger, le président français Jacques Chirac, dissuadés par un imposant déploiement de forces de sécurité. Loin d'être effarouché par ces deux dossiers sur lesquels les plaidants voulaient l'interpeller, le président Chirac a, bien au contraire, réitéré sa volonté de bâtir un «partenariat d'exception» entre l'Algérie et la France. Dans sa conférence de presse, le président Chirac a dit: «Nous avons voulu bâtir ensemble une relation forte, ambitieuse et sereine», dans ce qu'il appelle «bilan» des deux premiers jours de sa visite à Alger. Outre la déclaration solennelle signée dimanche dernier par les présidents algérien et français, il est question d'établir un «traité» entre les deux pays. Autrement dit, le chef de l'une des cinq puissances mondiales a décidé de traiter avec l'Algérie d'égal à égal, reléguant ainsi toutes les questions susceptibles de parasiter la démarche au second plan, pour ne pas dire qu'elles sont considérées comme relevant des affaires intérieures de l'Algérie. De ce fait, il y a lieu de s'interroger quel enseignement le mouvement citoyen devra tirer de cette fin de non-recevoir diplomatique opposée par le chef d'Etat français à la demande d'une partie des délégués du mouvement citoyen de Kabylie de cesser de soutenir le pouvoir algérien. D'autant que les eurodéputés ont récemment été pris à partie par les ârchs, dans un document de réflexion sur les perspectives de leur mouvement et que toutes les ONG saisies et qui ont eu à se déplacer en Kabylie à cet effet, et dont la dernière en date est Amnesty International, ont renvoyé la balle unanimement à l'Etat algérien en l'encourageant à assumer sa responsabilité dans ces événements et à prendre les mesures nécessaires pour la réparation du préjudice causé à la population. Quant aux familles de disparus, et pour lesquelles le chef d'Etat français a tout de même reconnu avoir évoqué la question avec son hôte algérien, il y a fort à craindre que la grève de la faim entamée par les membres de SOS-Disparus depuis le 2 mars au siège de l'association, ne subisse le même sort que celui des délégués détenus dans les prisons de Béjaïa et Tizi Ouzou. En attendant, les observateurs sont confiants quant à l'imagination dont devraient faire preuve les autorités dans un avenir proche pour démêler l'écheveau.