Suivant ce rapport confidentiel d'un comité de l'Organisation mondiale du commerce rendu public mardi, les aides qui doivent en théorie disparaître dans les trois mois sont des subventions à l'exportation, illégales dans tous les cas, ajoute cette source. D'autres subventions, qui, plus généralement, porteraient atteinte aux intérêts américains doivent également être supprimées mais l'OMC n'a pas fixé de date-limite pour ce faire, dit encore la source. Ce rapport d'un millier de pages ne sera pas publié avant des semaines, voire des mois. Un exemplaire a été communiqué à chacune des deux parties prenantes. Mais dans la mesure où le comité n'a pas repris à son compte la totalité des plaintes américaines, on peut penser que le contentieux entre Airbus et Boeing n'est pas près d'être clos. C'est en tout cas l'opinion qu'a manifesté Airbus, qui soutient que 70 % des plaintes déposées par les Etats-Unis ont été rejetées par l'OMC. «Airbus est convaincu que cette bataille portée devant l'OMC (Organisation mondiale du commerce) pourrait encore durer plusieurs années», écrit le constructeur aéronautique. «Comme pour tous les conflits commerciaux, sa résolution ne sera possible que dans le cadre de négociations transatlantiques.» Contentieux sans précédent Boeing a salué le rapport du comité de l'OMC, le qualifiant de «jugement qui fera date et de bonne nouvelle pour les salariés du secteur de l'aéronautique aux Etats-Unis qui ont dû affronter pendant des décennies la concurrence d'un Airbus fortement subventionné». Les subventions sont au coeur de la bataille que se livrent les deux constructeurs aéronautiques pour le marché de l'aviation civile, estimé par les sociétés aéronautiques à 3 000 milliards de dollars (2 200 milliards d'euros) sur les 20 prochaines années. Les Etats-Unis accusent Airbus d'avoir obtenu un total de 205 milliards de dollars de prêts avantageux et autres aides de la part de la France, de l'Allemagne, de l'Espagne et du Royaume-Uni sur deux décennies. De ce fait, ce contentieux est de loin le plus important que nourrisse actuellement le commerce international. La Commission européenne a fait savoir qu'elle n'avait pas de conclusions à tirer dans l'immédiat. «Le contenu du rapport est bien sûr confidentiel. Une seule chose est sûre: il faut se garder d'en tirer des conclusions hâtives ou de crier victoire prématurément», a déclaré John Clancy, porte-parole de l'UE pour les questions commerciales. John Clancy a ajouté, comme on s'y attendait, qu'on aurait une idée plus claire de la situation après que l'OMC aura publié un rapport d'étape, dans les mois à venir, sur un contentieux ouvert cette fois-ci par l'Union européenne contre des subventions accordées à Boeing. La résolution définitive des deux procédures, qui pourrait encore passer par un règlement négocié, définira les règles du marché de l'aviation civile, où Airbus et Boeing ont des carnets de commande représentant au total près de 1 000 milliards de dollars, dans les années à venir. L'A350 en dehors du coup Le comité d'experts de l'OMC avait communiqué aux deux parties un rapport d'étape en septembre. Le rapport, resté confidentiel pour l'essentiel, estimait que les aides versées par les gouvernements européens à Airbus constituaient des subventions à l'exportation indues, avait-on indiqué de source proche des conclusions. Toutefois, selon la source au fait du rapport publié ce mardi, le comité de l'OMC a jugé par exemple que le financement de programmes futurs tels que l'Airbus A350 n'entrait pas dans le cadre de ses dernières décisions, ce qui implique que les tensions commerciales avec Boeing risquent de durer. «Le financement futur de l'A350 n'est en aucun cas affecté par les conclusions du rapport communiquées aujourd'hui», a d'ailleurs réagi Airbus à ce sujet. «Les tentatives des Etats-Unis en d'inclure l'A350 dans cette plainte ont été spécifiquement rejetées». Responsables européens et américains avaient donné leur propre interprétation du rapport avant qu'il ne soit publié. Washington affirmait qu'il prouverait qu'Airbus avait porté atteinte aux intérêts des travailleurs américains, tandis qu'Airbus soulignait que le rapport n'était qu'une étape d'une longue procédure.