? Le trentième anniversaire du Printemps berbère sera célébré cette année encore en rangs dispersés. Depuis l'étiolement du MCB, symbole d'unité d'action et de revendications populaires, la célébration du 20 Avril tend à se banaliser et, pis encore, à illustrer les déchirements et antagonismes qui traversent le mouvement berbère. La division s'accentue avec la montée en puissance du Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, qui ambitionne de conquérir le terrain abandonné par les deux grands partis de la région, qui, durant plus de vingt ans, avaient gardé le monopole de l'action politique en Kabylie. C'est donc pour le mouvement de Ferhat Mehenni l'occasion pour tester sa popularité dans cette région. Circonscrit jusqu'ici dans les cercles universitaires à Béjaïa et à Tizi-Ouzou, ce mouvement extrémiste, issue de l'ancienne mouvance berbériste, cherche à élargir son audience en radicalisant sa position et en multipliant les déclarations incendiaires à travers notamment des sites Internet. Ferhat pousse la surenchère jusqu'à la caricature : il menace de proclamer ce qu'il appelle sans scrupule le GPK (gouvernement provisoire kabyle), avec ses ministres en exil, ses ambassadeurs, si le «le pouvoir d'Alger» se refuse à reconnaître «la liberté au peuple kabyle». Sur ce registre, son rival traditionnel, Saïd Sadi, ne fait pas mieux. Il tente lui aussi de jouer la carte du régionalisme pour essayer de se replacer politiquement et tenter de reconquérir son électorat qui est réduit à une peau de chagrin, après la succession de défections qui ont saigné son parti. Après ses discours sur l'existence d'une idéologie «anti-kabyle» au sein du pouvoir, le chef du RCD revient à la veille de cet anniversaire avec un nouveau cheval de bataille : la mort du colonel Amirouche, pour tenter de raviver les vieux antagonismes régionaux et claniques. C'est à ce combat d'arrière-garde que l'on veut, à tout prix, réduire une cause si noble et jadis porteuse d'espoir.