Caton -- surnommé l'Ancien ou le Censeur. – a reçu, outre ces deux surnoms caractéristiques sous lesquels il est connu des modernes, après l'avoir été des anciens aussi, dans l'Antiquité, le nom d'Orator. Jeunesse et carrière militaire Caton naquit en 234 av. J.-C. à Tusculum (Latium), et mourut en -149, à l'âge de quatre-vingt-cinq ans et peut-être quatre-vingt-six ans. Sa famille, d'origine plébéienne, n'avait jamais avant lui exercé de magistratures; elle avait, cependant, un certain éclat local, en particulier une réputation de bravoure dont Caton n'était pas peu fier. Cette famille n'était pas très riche ; Caton, orphelin de bonne heure, n'avait hérité de son père qu'une petite propriété dans le pays des Sabins (nord). C'est, là, qu'il passa son enfance, ayant sous les yeux la chaumière et les sept arpents de terre familiale. En -217, à l'âge de dix-sept ans, pendant la deuxième guerre Punique, il commença sa carrière militaire; en -214, il faisait partie de l'armée conduite par Fabius Maximus Cunctator, et il y remplissait peut-être les fonctions de tribun. Il attira, alors, l'attention de son général qui l'admit dans son intimité. Au siège de Tarente en -209, on retrouve Caton aux côtés de Fabius; et deux ans plus tard, il accompagne le consul CI. Nero, envoyé contre les Carthaginois, et ne contribue pas peu à la victoire du Métaure, dans laquelle Hasdrubal, le général carthaginois fut vaincu et tué. Une personnalité austère Pendant les loisirs que lui laissait la guerre, Caton se retirait chez lui et, là, prêchant à tous le travail, il donnait l'exemple, partageant les fatigues de ses esclaves, l'hiver, couvert d'une simple tunique, l'été, nu sous le plus brillant soleil; ou bien il allait dans les villes voisines prêter aux plaideurs le secours de son éloquence. C'est alors que l'un de ses nobles et riches voisins, L. Valerius Flaccus, témoin de ses talents et de ses rudes vertus, l'engagea à venir tenter à Rome la carrière des honneurs. Il fit plus, il lui ouvrit sa maison et lui prêta son bienveillant appui. Bientôt Caton, grâce à son protecteur et à ses propres succès au Forum, fut en mesure de briguer utilement les charges publiques. Élu questeur en -205, il accompagna, l'année suivante, Scipion l'Africain en Sicile ; ce serait, alors, s'il en faut croire Plutarque, que Caton aurait donné le premier témoignage public de son austérité scrupuleuse ; indigné du luxe déployé par P. Scipion et de ses dépenses exagérées, il aurait fait des représentations auxquelles Scipion aurait hautainement répondu «qu'il n'avait à rendre compte que de ses victoires, et non de quelques sesterces ; qu'au surplus il n'avait pas besoin d'un questeur si exact». Carrière politique à Rome Sur ce, Caton serait revenu à Rome, ayant conçu cette haine dont il poursuivit Scipion jusqu'au tombeau. Tite-Live ne parle pas de cette anecdote. Édile en -199, il restaura les jeux Plébéiens ; l'année suivante, il obtint la préture avec la province de Sardaigne d'où, à son retour, il ramena le poète Ennius. Caton se signala, dans le gouvernement de cette province, par sa sévérité et son désintéressement ; il bannit de l'île tous les usuriers et refusa l'argent que ses administrés voulaient, suivant l'usage, lui offrir pour frais de représentation. Sa sévérité ne lui nuisit pas auprès du peuple, et à l'âge de trente-neuf ans, en -195, il était, quoique homo novus élu consul. Il avait pour collègue son ancien protecteur et ami, L. Valerius Flaccus. Le début de son consulat fut marqué par l'abrogation de la loi Oppia contre le luxe ; Caton défendit énergiquement et éloquemment le maintien de cette loi. Ce fut en vain ; le luxe et les femmes eurent gain de cause. Bientôt, il partit pour l'Espagne Citérieure dont la révolte effrayait le Sénat; dans cette guerre que Tite-Live a racontée, et dont Plutarque a donné le récit anecdotique. Caton y fit preuve d'un génie militaire remarquable et de qualités administratives tout à fait supérieures. Le Sénat, en l'honneur de cette heureuse campagne, décréta un triduum d'actions de grâces. Ce ne fut pas la seule récompense de Caton : le vainqueur, à son retour, dans le courant de l'année -194, reçut les honneurs du triomphe. La cérémonie fut magnifique et, dans la répartition du butin à ses soldats, Caton se montra plus généreux que ne le faisaient prévoir ses principes bien connus d'économie parcimonieuse. Polémique avec Scipion l'Africain Ce retour semble avoir été hâté par une man?uvre du vieil ennemi de Caton, Scipion l'Africain, mais les récits différent et il y a peut-être une erreur au fond de chacun d'eux. Quoi qu'il en soit, Caton accusé, à ce qu'on peut conjecturer, à propos de l'expédition d'Espagne, se défendit vigoureusement et avec succès. Trois ans plus tard, pour protester contre les dédaigneuses allures de la mode nouvelle, il reprit du service comme légat ou tribun légionnaire sous les ordres de Manius Acilius Glabrio, chargé de la guerre contre Antiochus. Il contribua largement, en cette qualité, au succès de la bataille des Thermopyles (-191), et fut chargé d'apporter en personne au Sénat la nouvelle d'une si éclatante victoire. Caton le réformateur C'est, là, vraisemblablement, le dernier acte de la carrière militaire de Caton ; il alla, il est vrai, en -189 en Étolie, mais il semble y avoir rempli une mission plus civile que militaire. Dès lors, il déploya toute son activité et son énergie au Sénat, au Forum, dans les tribunaux. Dès sa première arrivée à Rome, Caton s'était posé en réformateur et en représentant des anciennes mœurs, de l'opposition des classes moyennes contre la noblesse hellénisante et cosmopolite. Il avait depuis sa questure manifesté ses opinions par des paroles et par des actes ; à partir de -191, ses discours ont encore plus de verdeur et de violence ; ses actes sont plus énergiques, les uns et les autres n'ont tous qu'un même but : la résistance à la décadence des mœurs. En -190, il s'oppose avec succès à la demande de triomphe faite par Q. Minucius Thermus ; l'année suivante, il brigue la censure qui lui permettrait de réaliser les réformes qu'il rêve. Il échoue mais il fait échouer son ancien général Acilius Glabrio, en l'accusant d'avoir détourné les deniers publics. Cet échec ne l'émeut pas ; il poursuit ses accusations en essayant en -187, d'empêcher M. Fulvius Nobilioz d'obtenir les honneurs du triomphe, lui reprochant d'avoir énervé la discipline militaire en prodiguant les couronnes à ses soldats sous des prétextes frivoles ; mais son éloquence ne convainc pas le peuple. Cette même année, les tribuns Petilius, à l'instigation de Caton, intentèrent une accusation de péculat à L. Scipion et un peu plus tard, le tribun Névius, toujours à l'instigation de Caton, accusait Scipion l'Africain d'avoir vendu la paix au roi de Syrie. (A suivre)