N'accueillant que le Beechcraft King Air (7 places) à ses débuts dans les années 1980, l'aéroport Ferhat-Abbas sur lequel veille le nom d'une figure emblématique du mouvement national, a franchi de nombreuses étapes avant l'atterrissage, lundi, du premier Airbus version A321. A l'origine plate-forme servant d'accueil et d'envol d'avions militaires pendant la Seconde Guerre mondiale, utilisé ensuite par les forces d'occupation durant la lutte de Libération nationale, cette infrastructure, abandonnée depuis 1962, a été reprise peu après pour abriter un aéroclub éphémère. L'idée d'ouvrir cet aéroport au trafic aérien pour les liaisons entre Jijel et la capitale avait «timidement» germé au début des années 1980 : de petits «coucous» du type Beechcraft King Air (7 places) avaient alors annoncé le baptême de l'air de ce qui fut l'aéroport d'El-Achouet, au cœur d'une paisible contrée verdoyante. La piste d'atterrissage, dans un état lamentable, accueillait alors ce type d'aéronef que des vents forts ‘balayaient' dans les airs entre Jijel et la capitale. Ces petits avions faisaient quand même le plein, au vu du tarif en vigueur à l'époque. Les rotations en aller-retour entre ces deux villes se faisaient deux ou trois fois par semaine. Une «bicoque» aux faux airs de chalet suisse L'aérogare, quant à elle, se limitait à une petite «bicoque» rappelant vaguement un chalet de montagne suisse, où les passagers étaient confinés pendant des heures dans l'attente d'embarquer, avec très peu de commodités. La tour de contrôle était, elle aussi, presque invisible dans ce vaste espace entouré de broussailles et d'arbustes, entre mer et montagnes. Ce fut ensuite au tour du Fokker, d'une capacité de 40 places, de se poser sur le tarmac, après le lancement de quelques travaux de réhabilitation de l'aéroport. Il a fallu qu'une vache tente de traverser la piste, pendant le décollage d'un avion, pour que les autorités prennent la décision de clôturer l'enceinte aéroportuaire au moyen de grillage Zimmermann. Cet incident, aujourdÆhui anecdotique, a fait plus de peur que de mal, mais il eut le mérite de pousser les responsables locaux à s'occuper sérieusement de cette infrastructure pour décider du lancement de travaux pour sécuriser les lieux. Dans la foulée, la piste d'atterrissage a été agrandie pour permettre l'accueil d'avions gros porteurs, tels des Boeing 727, dont le premier avait atterri, à titre d'essai, en mars 1996. L'aéroport a été doté d'une nouvelle piste «ripée» par rapport à l'ancienne en raison de la proximité de cheminées de la centrale thermique d'El-Achouet, située à un jet de pierre et qui présentaient un risque potentiel pour la navigation aérienne. Le taux de remplissage, dans les deux sens entre Jijel et Alger, a encouragé le renforcement des dessertes régulières, à la grande satisfaction des usagers qui empruntaient auparavant la célèbre route sinueuse de la corniche, mettant plus de cinq heures pour rallier la capitale. L'avion au service du développement socioéconomique Dans la wilaya de Jijel, l'avion a également contribué au développement socio-économique de la région pour assurer une meilleure ouverture de celle-ci sur les autres régions du pays et faciliter le déplacement des personnes. Les récents programmes de modernisation des infrastructures aéroportuaires nationales ont été profitables à la région de Jijel, aujourd'hui dotée d'une nouvelle aérogare de 6 000 m2, plus fonctionnelle, en mesure de booster le trafic aérien, entre Jijel et d'autres villes du pays d'une part, et avec des villes européennes d'autre part. Le projet en voie d'achèvement a bénéficié d'une enveloppe de plus de 700 millions de dinars, selon les responsables en charge du secteur des transports. Aujourd'hui, cette plate-forme aéroportuaire s'est frayée son chemin du fait qu'elle contribue activement à l'essor socio-économique de la région. De vocation régionale, l'aéroport de Jijel a obtenu aujourd'hui un statut d'aéroport international avec les premières liaisons avec des villes françaises comme Paris, Lyon et Mulhouse. Demain, ce seront d'autres dessertes, selon des responsables de la compagnie nationale Air Algérie. Longtemps confinée dans un silence quasi olympien, la wilaya de Jijel qui a lancé de nombreux programmes de développement touchant à plusieurs secteurs, a pris cette fois-ci le train deà l'avion. Routes modernes, ports (Djendjen, Boudis, Ziama Mansouriah et El-Aouana, en cours de réalisation) ajoutés au transport aérien, cette région a fait des pas de géants pour sortir de l'isolement et de l'enclavement auxquels elle fut longtemps confrontée.