Si l'on vous dit «Algérie», que répondez-vous? Kad Merad ?: Algérie ? Je dis : souvenirs, souvenirs. De beaux souvenirs de vacances, joyeux, lorsqu'on allait là-bas l'été. Mourad Ben Saoul, cet acteur français immigré, préfère que l'on appelle dans le film Dino Fabrizi. Mais en fait son vrai nom est Merad KAad, de son vrai prénom Kaddour, fils d'un Algérien et d'une Française, né à Sidi Bel-Abbès. Kad confie a l'histoire sa propre histoire, à la réalité du terrain. Il a travaillé sous un faux nom afin de contourner les préjugés racistes. Un arrangement avec la réalité qu'il assume : Je ne mens pas, je compose avec une société imparfaite», et que nul ne connaît, à part son meilleur ami. Jusqu'au jour où son père malade lui demande tout à coup de faire le Ramadhan à sa place. S'ensuivent évidemment toute une série d'événements parfois drôles, parfois émouvants, qui vont bouleverser sa (double) vie. Le voilà aujourd'hui dans un rôle qui invite ce fils d'Algérien à repenser à sa propre histoire. D'ailleurs, il est n'est pas étranger au monde du spectacle. 1990 est l'année où avec la complicité de son ami Olivier il s'imposa sur les différentes scènes de théâtre. 2008 , il devient l'une des célébrités françaises les plus remarquées après avoir joué le rôle vedette du film Bienvenue chez les Ch'tis. «Cette comédie de Dany Boon, qui a dépassé les 20 millions d'entrées dans l'Hexagone, reposait sur la performance de son acteur principal, jouant un employé de La Poste marseillais nommé dans le Nord, où le choc des cultures provoquera quantité de scènes burlesques.» On dit de lui :«l'ancien adolescent de la banlieue parisienne leader de groupes de rock, comédien qui a débuté en jouant Racine et Molière avant de devenir acteur comique, n'arrête plus de tourner. On l'a vu dans une bonne quinzaine de films, du Petit Nicolas à RTT, ces deux dernières années. Sans abandonner pour autant sa complicité avec son compère Olivier Baroux, devenu lui-même réalisateur. C'est ainsi qu'il a tenu le premier rôle de ses deux derniers films, Safari et l'Italien, qui est sorti à Paris le 14 juillet. cet Algérien travaille sous un faux nom afin de contourner les préjugés racistes. Dans une interview publiée dans Jeune Afrique il s'éclate, il fonce comme il le fait dans ses films, et il trouve un réel plaisir a s'exprimer et a refaire le voyage au cœur de ses origines . Pour mieux comprendre ce qu'il garde dans son cœur, il répond a une question simple mais pleines d'émotion : Si l'on vous dit «Algérie», que répondez-vous ? Kad Merad ?: Algérie? Je dis : souvenirs, souvenirs. De beaux souvenirs de vacances, joyeux, lorsqu'on allait là-bas l'été. Dans la famille de mon père, que j'aime beaucoup, même si je ne la vois pas souvent», devait-il répondre. Il raconte ensuite dans cette interview comment sa famille a quitté l'Algérie pour s'installer en France : «Après les événements, après l'indépendance en 1962, mes parents ont décidé de s'y installer. Ma mère, qui était coiffeuse, voulait monter un salon à Bel-Abbès. Cela ne s'est pas bien passé et ils sont revenus en France. Je n' y ai donc vécu qu'un ou deux ans à peine.» Jusqu'où l'histoire de Mourad, qui se fait appeler Dino, croise-t-elle la vôtre ? «Ne faites pas peur aux gens, on ne raconte pas ma vie dans le film, c'est une comédie avant tout. Le personnage que je joue, c'est vrai, et pour la première fois, c'est au moins la moitié de moi ?: la moitié du côté de mon père. Mais cette histoire, c'est surtout celle de plein de gens en France qui ont des difficultés à cause de leur origine. Moi aussi, d'ailleurs, j'ai cru que mon prénom arabe m'empêcherait de réaliser mon rêve d'acteur. Un prénom, ça change tout, c'est hallucinant. Un simple prénom ? Mon père lui-même se faisait appeler Rémi.» Tout au long de cet entretien, il rerevient sur ses origines qui ont fait de lui une fierté. Il le dit tout haut et n'a jamais nié son identité. Il a travaille, révèle-t-il pour une radio locale dans la banlieue sud de Paris ,plus précisément à Ivry, près de Ris-Orangis. «Alors, on m'a demandé de me trouver un nom qui colle avec ce style, qui sonne américain, et je suis devenu «Mister Kad». Et Kad est resté. D'abord avec Kad et Olivier, puis, au cinéma, avec Kad Merad. Il ne s'agissait pas de changer de prénom comme dans le film. Et je n'ai jamais renié mes origines.» Une belle révélation qui fait de lui un exemple. Ce qui est fort, voire très fort même dans c et entretien, c'est la transparence qui caractérise son quotidien et le respect qu'il manifeste pour ses parents. A la question posée par le journaliste de Jeune Afrique s'il n'avait pas envisagé de changer radicalement de prénom, voici sa réponse : «Si, je me suis appelé François. François Kaddour. Mais cela n'a duré qu'un après-midi, quand je me suis mis à faire du théâtre. Alors je me suis regardé dans la glace. Et je me suis dit que ce n'était pas possible, j'ai trop de respect pour mon père, pour ma famille. Donc, tant pis, je ferai des rôles d'Ahmed ou de Rachid, et puis peut-être que tout se passera bien.» Et pour votre père, comment cela s'est passé ? «Il ne me l'a jamais dit clairement, mais j'ai pu petit à petit reconstituer l'histoire. Il travaillait dans les années 1950 dans un atelier de fabrication de wagons de marchandises et, comme il était doué, il est devenu directeur technique. Il pensait qu'un Mohamed qui dirige des Français, à l'époque, ça le faisait pas. Je crois qu'il a décidé cela aussi pour la famille de ma mère. Vous savez, à ce moment-là, dans le Berry, un Algérien, c'était un indigène. C'est terrible, mais c'était comme cela. Pourquoi Rémi ? C'était venu en fait par des déformations successives de Mohamed sur son lieu de travail, et il a continué à se faire appeler ainsi. Quelle belle manière de voire les choses en face ! Ne pas plonger dans le cercle de l'oubli et demeurer attaché à sa terre natale et la plus belle récompense qu'il fait à ses parents. A cette interrogation :»Vous ne craignez pas que l'histoire se répète avec votre fils, Kalil ? Il eut comme réponse: «Je n'y ai pas pensé du tout. D'ailleurs, ce n'est pas mon père, vous savez, qui m'a appelé Kaddour, c'est ma mère qui a choisi des prénoms arabes pour tous ses enfants, ce qui était d'un courage insensé alors. Et si on a choisi Kalil avec ma femme, c'est tout simplement parce qu'on aime ce prénom. Il aurait pu s'appeler Marius. Mais après tout il a des origines arabes, mon fils, donc ça le lui rappellera et c'est très bien.» Et vos frères et sœur ? Ont-ils rencontré des problèmes ? «De l'angoisse en tout cas. Mon frère Karim, qui est assureur, a mis sur sa carte de visite K. Merad. Je ne l'ai jamais entendu se présenter comme Karim. Et ma sœur, Yasmina, elle s'appelle Mina pour tout le monde.» Justement, vous arrive-t-il de retourner en Algérie pour garder le lien avec ce passé ? «Je ne l'ai que très peu fait depuis longtemps. Mais justement j'en ai envie et je vais y retourner avec mes parents. Imaginez qu'il y a tout un village là-bas avec pratiquement que des Merad ?» Et voilà l'inévitable question qui donne l'occasion à Kad de confirmer ses propos et surtout de réaffirmer son identité : «Que pensez-vous, vu de France, de l'Algérie d'aujourd'hu?» «C'est un pays qui a peut-être fait peur, mais ce n'est plus le cas. Il semble toujours un peu instable politiquement, comme s'il n'avait pas encore trouvé sa voie. Et on parle parfois de corruption. Mais c'est un pays magnifique.» Pour le Mondial, supportiez-vous plutôt la France ou plutôt l'Algérie ? «J'ai beaucoup plus vibré pour l'Algérie.» «C'était facile ? «Je supportais simplement l'équipe qui jouait le mieux ? J'avais déjà été très heureux quand l'Algérie s'était qualifiée. Bien plus heureux que quand la France avait fait de même avec la main que vous savez.»