Le 1er août prochain comparaîtront à la barre des accusés de la cour d'appel de Annaba 33 personnes reconnues coupable d'avoir mené ou participé aux émeutes du 22 juin 2010 à la cité Sidi Salem dans la commune d'El-Bouni. En deux audiences consécutives du tribunal correctionnel à El-Hadjar, elles avaient été jugées en 1re instance quelques jours plus tard dans le cadre du flagrant délit. Les 33 accusés majoritairement des jeunes ont toutes été condamnés à des peines de prison ferme allant de 8 à 2 ans pour atteinte aux symboles de la République, troubles à l'ordre public, dégradation de biens publics et privés et outrage aux représentants de la loi. Dans le lot, un gendarme, un policier et quelques pères de famille qui, selon leurs avocats, avaient eu le malheur de se trouver dans le secteur au moment des interpellations suivies d'arrestations des émeutiers. Depuis, si la situation est revenue au calme, elle est aussi aux rumeurs et aux soupçons sur des policiers qui auraient outrepassé leurs prérogatives. Les victimes seraient les habitants de la cité SAS Sidi Salem dont sont issus les manifestants. Leur amertume et leur colère sont aggravées par la polémique qui s'est engagée sur l'emblème national que les émeutiers jurent n'avoir pas brûlé. Polémique également quant à la présence ou non d'une commission d'enquête (ministère de l'Intérieur/ministère de la Justice) dépêchée par les services de la présidence à l'effet d'enquêter sur les émeutes de Sidi Salem ou pour une toute autre mission. Les responsables de la Sûreté de wilaya et de la cour de justice d'Annaba sont formels : «C'est totalement faux. Aucune commission n'a été dépêchée par Alger pour enquêter sur les émeutes ou autres». Dans les jours qui ont suivi les émeutes, les familles des condamnés ont fait savoir par des voies détournées qu'ils avaient en leur possession un ensemble de preuves accablant quant à la brutalité pratiquée par les éléments de la brigade anti-émeute. «Il est vrai qu'un drapeau français a été porté par les manifestants. Mais il n'y a pas eu d'emblème national brûlé, c'est de la pure affabulation pour enfoncer nos enfants», ont affirmé plusieurs de ces familles. Pour plusieurs avocats de la défense des émeutiers, il y a eu bavures des policiers. En portant plainte pour atteinte aux symboles de la République, troubles à l'ordre public, dégradation de biens publics et privés et outrage aux représentants de la loi, M. Ghazi, wali de Annaba, cherche- t-il à conforter les policiers dans l'impression dangereuse que toutes les bavures seront couvertes ? Cet acharnement dans la répression judiciaire tranche avec la modération du ton adoptée au lendemain des émeutes par le directeur de l'exécutif au contact des sages de la cité Sidi Salem. C'est dire qu'il y a carence au sommet de la hiérarchie de la wilaya lorsqu'on assure, même implicitement, à la police anti-émeute d'une «couverture» systématique. Ce qui pourrait expliquer le degré de violence et d'agressivité atteint par des hommes habillés aux couleurs de la République dans l'exercice de leur fonction de maintien de l'ordre. Bien avant le 1er août, date fixée pour la comparution en appel des 33 émeutiers ou accusés comme tel, il est question d'une révision à la baisse des condamnations. Des acquittements pourraient même être prononcés au bénéfice des pères de famille qui avaient eu le malheur de se retrouver sur le chemin de la police anti-émeute.