Le problème posé est donc le suivant : l'Algérie est-elle caractérisée par une bonne gouvernance, un bon management stratégique des entreprises et une amélioration du climat des affaires loin de la vision de l'unique dépense monétaire ? L'Algérie favorise-t-elle le savoir ou les rentes de situation ? Combien d'entreprises publiques et privées locales ont-elles des laboratoires de recherche appliquée dignes de ce nom ? Aussi, interdire l'importation de certains produits finis suppose d'abord que la production en termes de coûts et qualité existe. Or, nous constatons que la majorité des entreprises publiques et privées fonctionnent à partir des matières premières importées et que la transformation locale contribue à peu de valeur ajoutée. C'est toujours la même question mais qui entre dans ce cadre de la rente de situation donnée à la SNVI — quel est le taux d'intégration de cette société�? —, qui, après avoir été assainie plusieurs fois, à l'instar de bon nombre d'autres entreprises publiques qui, selon le rapport financier du ministère de l'Investissement de janvier 2009, sont revenues à la case de départ, 70 % des entreprises publiques ayant un ratio de solvabilité négatif, et ce grâce toujours non pas à la création de la valeur fondée sur le travail mais aux recettes des hydrocarbures qui, je le rappelle, ont permis également de réduire le principal de la dette à moins de 4 milliards de dollars et la dette publique interne à moins de 0,7 milliard de dollars. Se posent alors deux questions stratégiques. Le gel de l'autonomie des entreprises publiques par le rattachement éventuel des entreprises publiques sous la tutelle de chaque ministère avec une gestion administrée, et ce depuis la fin 2009, n'aura-t-il pas comme impact logique une plus grande faible performance, les gestionnaires publics attendant les ordres d'en haut, de surcroît sans planification stratégique des autorités de tutelle, alors que l'entreprise dans un environnement de plus en plus concurrentiel est caractérisée à travers le monde comme la prise du risque ? Doit-on continuer toujours d'assainir ou n'est-il pas préférable de projeter des investissements nouveaux pouvant tenir tête à la concurrence internationale ? Aussi, faute d'une politique claire d'innovation et d'un bon management, cela ne pourra donc qu'entraîner la hausse des importations de cette rubrique au profit des produits finis à court terme. Les entreprises locales profiteront-elles de cette situation de rente pour pousser à une meilleure intégration ? Le problème est posé et cela renvoie toujours à l'innovation. Combien d'entreprises publiques et privées locales ont-elles des laboratoires de recherche appliquée dignes de ce nom, y compris la Sonatrach ? Et cette innovation ne suppose-t-elle à la fois un environnement assaini et tout un renversement des échelles de valeurs récompensant le travail et l'intelligence et non les rentes ? Comment ne pas rappeler qu'avec des dévaluations successives dont seulement entre 2008/2009 de 20 % par rapport à l'euro dépassant officiellement 100 dinars un euro et 15 % par rapport au dollar, ce qui constitue un dumping pour les entreprises locales, a-t-il été impossible de dynamiser les exportations hors hydrocarbures (moins de 3 % du total) montrant que le blocage est d'ordre systémique ? Faute de quoi, ces mesures auront un impact très mitigé sur l'accumulation, c'est-à-dire le développement futur du pays. Aussi, le recours à l'expertise et à l'ingénierie étrangère s'avèrera encore incontournable, la capacité d'absorption par l'outil national de production étant incertaine, comme l'est également la contribution des sociétés étrangères dans le transfert de savoir-faire et de technologie comme le montre l'expérience mitigée de la dépense publique entre 2004/2009 avec des surcoûts exorbitants, des réévaluations permanentes et la dévalorisation du savoir au profit des rentes, le montant poste assistance technique étrangère étant passé de 4 milliards de dollars en 2004 à 11 milliards entre 2008/2009. Pour ce qui est de l'interdiction de l'exportation des déchets ferreux et semi-ferreux, les exportateurs algériens écoulent quelque 200.000 tonnes de marchandises par an sur le marché extérieur et réalisent près de 600 millions de dollars de chiffre d'affaires, selon les chiffres des Douanes 2009. En 2009, les autorités du pays avaient interdit l'exportation des déchets non ferreux (plomb, étain, cuivre, zinc et aluminium) à travers la loi de finances complémentaire 2009. La raison invoquée étant l'existence de dépassements consistant en la dissimulation de la valeur réelle des déchets afin d'éviter le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, le non-rapatriement des devises au pays ainsi que l'utilisation de faux registres du commerce avec, pour conséquence, une baisse les recettes des produits hors hydrocarbures de 45 %. Rappelons que, déjà en 2006, des mesures restrictives avaient été faites. Mais quelque temps après, le commerce des déchets ferreux et non ferreux avaient été relancés en prévoyant un cahier des charges conforme aux exigences de la loi de finances 2007, l'autorisation pour l'exportation des déchets ferreux étant délivrée par le ministère du Commerce au lieu de la direction du commerce du lieu d'embarquement de ces produits. Or, il ne suffit pas d'interdire et le problème central posé est le suivant : si cette décision venait à voir le jour en l'absence actuelle de tout débouché local pour les ferrailles récupérées n'entraînerait-elle pas la liquidation pure et simple des entreprises publiques et privées puisque le marché est de plus de 600 millions de dollars ? Et là on revient à l'urgence d'une définition claire d'une politique de substitution d'importation devant elle-même s'inscrire dans le cadre global d'une meilleure clarté de la politique socio-économique. (A suivre)