Aussi loin que l'on se souvienne, les assemblées féminines citadines, notamment les Algéroises, s'adonnaient au jeu de la bouqala. Elles animaient leurs soirées en se réunissant autour d'une meïda garnie de délicieuses gâteries au miel et aux amendes et organisaient la cérémonie de la bouqala, durant laquelle elles pratiquaient un rituel censé prédire l'avenir. La bouqala qui constitue l'objet principal du rituel est un vase d'argile. Une fois rempli de l'eau recueillie dans sept sources différentes, on y jetait des bijoux appartenant aux convives voulant y participer. On couvrait, ensuite, le vase et on procédait aux fumigations, préparées avec du benjoin, des feuilles de henné, quelques gouttes d'huile d'olive, des effilures de vêtements d'une femme non mariée et des petits morceaux de bois prélevés sur sept portes différentes. Chaque «ingrédient» avait son importance. On déposait alors la bouqala sur le sol et une femme inspirée commençait à réciter les bouqalates, des présages de bonne ou de mauvaise augure, récités comme des poèmes. Les autres nouaient un mouchoir pour symboliser une pensée pour un proche auquel elles dédiaient la Bouqala. Sitôt l'incantation finie, une jeune fille vierge devait piocher au hasard dans le vase, y retirant le bijou qui désignerait la femme concernée par le présage. Les autres femmes donnaient alors, tour à tour, leur interprétation du présage. Enfin, on remettait le bijou dans le vase et on recommençait le rituel plusieurs fois. Une fois le jeu fini, l'eau de la bouqala était jetée soit sur la terrasse soit dans la rue, au milieu de la nuit quand il n'y avait plus de circulation.