, Conter Tlemcen, cette cité deux fois millénaire, en quelques lignes d'épure restreinte tiendrait d'une haute présomption, surtout lorsque d'éminents historiens ou écrivains s'attellent à cette tâche avec circonspection, doutes, prévenances. Pourtant, nous accédons à l'audace de la décrire et la voir telle qu'elle apparaît au regard d'un néophyte curieux des gloires de son pays, dans une quête introspective d'apparences évidentes et réelles. Avant de lire cette ville au passé éloquent, il fait s'enthousiasmer sur la région qui la contient comme un nid de ferveur. Montage, coteaux, vergers, en conciliabules avec la région des cascades ou de l'oued Chouli comble cette capitale zianide de pittoresque, de contrastes modulés et de charme. Nul visiteur ne saurait rester insensible à la facture de cette ville royale qui se voulait continentale et commerçante dans des structures fermées ou arrogantes à tout intrus. Cette conception qui peut être sélective à souhait, aurait sauvegardé le prestige de ses dignitaires qui la voulaient glorieuses et austère. Pour un œil avisé qui scrute la ville du haut des monts, ou des coteaux environnants, trois cercles concentriques distincts dessinent la ville bâtie et conçue en forteresse et en zones d'agréments par les Phéniciens avant l'avènement de l'invasion romaine. De cette architecture, l'investigation archéologique n'a pas révélé les sites et les monuments propices à nous éclairer sur ces navigateurs prestigieux, venus étonnement en ces lieux, loin des côtes des envahisseurs ? Ce premier cercle contient la vieille ville avec toutes les tournures élégantes et savantes de style hispano-mauresque. Les Maghrébins partis de là, pour devenir Andalous, puis revenus après la Reconquista, auront marqué cette ville d'un sceau indélébile mais combien souverain, attrayant seigneuriales et pourtant discrètes, les maisons évoluent en arcades d'ombres en patios lumineux et ombragés, en portes et en fontaines en prestance en suggérant les majestés d'antan. Les mosquées et les minarets reissent impérieusement aux lacis avenants de ruelles qui s'égayent aux verdures et aux fleurs déployées. L'aspect suranné ou vieilli de ces bâtisses des hautes célébrités de jadis gardent toujours en suggestions murmurées le faste aristocratique qui a rayonné depuis l'avènement de Yaghmorassan. Le promoteur avisé déchiffrera dans l'éventail de certaines particularités, les haute magnificences de celles qui fut du XIIIe au XVIe siècles la capitale du Maghreb central, dans sa splendeur incontestée. L'architecture coloniale aura quelque peu altéré l'esquisse singulière des demeures anciennes. L'après indépendance y ajoutera un surcroît de confusion et de disharmonie, mais Tlemcen gardera toujours dans son calme feutré leur préciosité de son passé pétri de gloire. Le second cercle continent les jardins et els vergers, clairsemés judicieusement sur la vallée et les coteaux, comme des ondes l'émeraudes, de couleurs chaudes vermeilles afin de rendre la ville paradisiaque et accueillante. Les vignobles s'insinuent pour envahir les flans et les couteaux submergés de soleil, peut-être boudent-ils leurs voisins dénudès quand les arbres fruitiers, cerisiers pruniers, abricotiers et tant d'autres accourus vers eux en emprunt le relief, les inondent de fleurs de fruits, de parfums, de senteurs aromatiques. Le troisième cercle nous amènera vers la sphère grégaire des cascades et de montagnes parmi les cultivateurs et la plèbe de ces alentours. C'est ce fief que choisira Mohamed Dib pour l'authenticité et l'histoire dans ses œuvres : la Grande maison, l'Incendie, le Métier à tisser. Dans ces périphériques d'Hennya, la réprouvée que l'auteur verra surgir sous les visages burinés et les mains calleuses de montagnard «l'ombre gardienne» de la Révolution. Ainsi, Tlemcen contiendra deux peuples d'essence, d'antinomies différentes. Nous répondrons : Non ! Puisque elles ferment en complémentaire et fécondant. Seules l'acrimonie et la tendance l'auront rendu possible. Le véritable vissage de Tlemcen. Un visiteur inconnu erré autour du rempart du Méchouar, il s'attarde incontinent sur les ruines de Mansourah. Le voilà maintenant aux confins de la mosquée de Sidi Boumediène à méditer sur l'histoire de la ville. Cette ville demeure un centre de sciences et de culture. En des périodes diverses, des érudits, des savants, des théologiens de Fès, de Tunis, de Bougie, du Moyen-Orient sont venus en hôtes d ferveur, d'allégeance, d'humidité, honorer cet illustre sanctuaire des connaissances. Citons pour la circonstance l'historien sociologue Ibn Khaldoun, théologien : Senoussi, le mystique Sidi Boumediene mort et vénéré en cet endroit de prédilection. Des célébrités, moins notoires, y ont séjourné ou parfait leurs humanités d ans les medersas, les bibliothèques, les temples d'échange que constituaient alors les mosquées. Tlemcen restera toujours un temple de l'artisanat, du tissage et des échanges, le goût et l'habilité de ses artisans assurent une réputation sur tous les méridiens : Espagne, Maroc, Soudan, Caire et la Moyen-Orient. Leur talent à travailler la laine, le bois, les cuirs, le cuivre, les auréoles d'un blason séculaire. La tradition d'aujourd'hui les entretient jalousement pour notre considération à étranger. Tlemcen, en vestale sacrée, demeure un pinacle des arts et de la musique andalouse. Elle aura connu la procession des grands maîtres depuis Zyriab et ses douze noubas (douze autres auront disparu des répertoires), cheikh Larbi Ben Sari, Cheikh Triki et tant d'autres qui maintiendront l'exergue grandiloquente de ces harmonies uniques qui tentent, de nos jours à devenir universelles. Tlemcen qui aura toujours une figure de proue participe aux activités culturelles dans toutes les disciplines avec le panache et le brio qui lui sied. Sa troupe d'instrumentistes (mixte) impressionnera les mélomanes des grandes capitales de renom que nous ne saurions énumérer tant elles font pléthore nos métiers. En Oranie, le commerce international ne revêtira pas de sens sans les aptitudes ou les qualifications de spécialistes de tractations, d'échanges, de nouveautés cotées, appréciées sur les territoires des pays les plus exigeants. Nous quittons cette cité princière, chargée d'histoire , sachant que bientôt, elle s'accommodera, la démographie aidant de plusieurs mutations peut-être malhabiles mais elle conservera en son écrin terni, étoilé, les trésors incomparables réalisés par des dynasties de grandeur et de savoir, en brodant des festons de gloire, et de vertus inoubliables. Il est heureux qu'en cette ville affable, nous comptons beaucoup d'amis.