Ils agissent en coordination pour démanteler ce réseau qui active depuis des années. Animé à partir de l'entreprise de production «Cimenterie de Hadjar Soud» (CHS) dans la wilaya de Skikda, il implique de hauts cadres et aussi des commerçants des matériaux de construction et des conducteurs de poids lourds spécialisés dans le transport du ciment gris. D'une extrême gravité, cette affaire a imposé au premier responsable du Groupe industriel des cimenteries algériennes (GICA) de décider en mai 2010, d'une mesure conservatoire à l'encontre de 4 directeurs centraux de CHS. Il aurait réagi à la suite d'un rapport circonstancié établi par le P-DG de l'entreprise de Hadjar Soud. A ces cadres, il est reproché leur participation directe dans la production d'un ciment hors normes. «Analysé par le laboratoire, le ciment saisi s'est avéré non conforme. Pratiquement toutes les données générales de sa composition sont fausses. Le taux des constituants est faible en silicates et aluminates, proportion de chaux et de silice réactive, clinker, laitier d'HF, pouzzolane naturelle, schistes calcinées. Les propriétés ont été totalement modifiées. On peut dire que tel que présenté, ce type de ciment est à haut risque dans le secteur de la construction» dira un des enquêteurs sous le sceau de l'anonymat. Le dossier est volumineux. Au fil de leurs investigations, les gendarmes ont mis au jour de nombreuses autres anomalies dans la gestion de la production et de la commercialisation du ciment. Malgré toutes les turbulences et les orages qui s'abattaient avec fréquence et violence sur ses principaux animateurs, le marché parallèle du ciment gris était toujours bien approvisionné. La décision d'importer un million de tonnes de ciment au titre de joint-venture prise par le ministère de l'Energie et des Mines Chakib Khellil, accentuera la pression. Elle est synonyme de concurrence et de baisse des prix. A partir de là, l'activité des trafiquants et spéculateurs allait prendre de l'ampleur. Tout était bon pour amasser fortune. L'avidité des uns et des autres, membres du réseau, n'avait plus de limites. La pression aura pour conséquence la multiplication des «fautes techniques» au niveau de la chaîne de production et de commercialisation. Elles étaient commises par ceux-là mêmes chargés de superviser les opérations et de contrôler la bonne qualité du produit. Plusieurs travailleurs auraient été étonnés du changement du dosage des matières premières constitutives du ciment gris. Ils auraient alerté leur directeur général et la brigade de gendarmerie de la daïra d'Azzaba. Selon nos informations qui restent à vérifier du fait du black-out imposé autour de ce dossier, Il suffit d'une absence de quelques heures ou jours du P-DG pour voir de nombreux conducteurs de poids lourds entrer au service commercial comme dans un moulin. Les investigations aboutiront, précisent nos sources, à la découverte d'une véritable toile d'araignée permettant de comprendre comment les cadres et techniciens mis en cause opéraient et comment ils pouvaient éviter tout contrôle, comme de confirmer que les faits commis dans le changement des constituants principaux pour la production des ciments courants est d'une extrême gravité et que le stratagème utilisé permettait aux trafiquants de disposer d'importantes quantités supplémentaires qu'ils destinaient au marché parallèle. Ainsi, après le rond à béton importé de Roumanie en 2005, détecté irradié par des analyses effectuées en laboratoire par la direction de la construction d'Annaba, c'est au tour du ciment de qualité non conforme aux normes d'être commercialisé sur le marché national. C'est, en tous les cas, ce qui ressort des premiers éléments de l'enquête diligentée par la Gendarmerie. Bien que l'information soit toujours gardée dans la confidentialité et que du côté de l'entreprise à Hadjar Soud on se refuse à tout commentaire ou contact avec les représentants de la presse, il est question d'un ciment dont la constitution permet de dire qu'il est à grand risque pour les ouvrages soit en raison des conditions de performances mécaniques ou de conditions d'environnement. Ainsi après l'Egyptien Orascom et l'opération juteuse qu'il a réalisée en rétrocédant, au nez et à la barbe de nos décideurs une de nos cimenteries et après des années de spéculations effrénées qui ont permis à certains d'amasser des fortunes, il y a aussi la toute récente découverte d'une cargaison des 7 000 tonnes de ciment importée d'Italie. Déchargée sur le port de Annaba, elle s'est avérée non conforme, en qualité et en poids, aux normes requises.