Les conséquences nées des hésitations du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière quant à la désignation d'un directeur général en titre ont touché les sept unités hospitalières animées par un effectif de 4 500 employés. Résultat : les salaires n'ont, à ce jour, pas été perçus à termes échus par les cadres et agents entre praticiens, paramédicaux, administratifs et personnels de soutien. Mais il y a plus grave avec les directives contenues dans la note de service référenciée 840/PP/2010 émise le 14 décembre 2010 à l'adresse de l'ensemble des services. Signée par le nouveau directeur du CHU et par la pharmacienne en chef, cette note instruit les chefs de service à l'effet «de réserver exclusivement à l'urgence, les produits d'anesthésie». Saisissant en copie le président du conseil scientifique et le comité des médicaments, le 1er responsable du CHU justifie cette décision : «Le CHU Annaba connaît d'énormes problèmes en matière d'approvisionnement en produits d'anesthésie. En raison des livraisons insuffisantes voire nulles que les services de la PCH donnent à nos commandes, le taux de satisfaction du dernier trimestre n'a pas dépassé les 2%.» Ainsi, en voulant changer de gestionnaire dans une structure très sensible en charge d'une population de plus de 3 millions d'âmes (Tébessa, Souk Ahras, Guelma, Tarf, Annaba), Djamel Ould Abbès, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, l'a totalement déstructurée. Une autre structure de son département n'a pas même pas donné le temps à ses collaborateurs du CHU de Annaba de s'adapter à la dure réalité du terrain en décidant de suspendre tout approvisionnement d'anesthésiants. Comme il n'a toujours pas donné à l'actuel directeur général, qu'il a lui-même nommé, une quelconque possibilité légale pour signer les états de salaires. N'étant pas reconnu par le contrôle financier, ce directeur est dans l'incapacité de débloquer la situation. Comme si cela ne suffisait pas, il est confronté au problème que pose la rupture de stock d'un produit pharmaceutique stratégique comme l'anesthésie imposée par la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH). Et si les salariés du CHU fêteront le nouvel an sans le sou, des dizaines de malades atteints de différentes pathologies et programmés pour être opérés sont renvoyés quotidiennement dans leurs foyers. Beaucoup, majoritairement sans ressources, viennent de très loin. N'arrivant pas à admettre qu'une structure de santé de l'Etat puisse être en rupture de stock de médicaments aussi sensibles que les anesthésies, ces malades et leurs accompagnateurs, mal informés, pointent un doigt accusateur sur les gestionnaires locaux. «L'on veut nous faire croire qu'il n'y a pas d'anesthésiants alors qu'il s'agit beaucoup plus d'une démarche tendant à nous orienter vers les cliniques privées. Il se trouve que nous n'avons pas les moyens financiers. Un établissement public de santé qui refuse des malades dans le besoin d'une intervention chirurgicale sous peine de voir leur état de santé s'aggraver parce qu'il n'y a pas d'anesthésie est très grave», dira Mme Mounira de la wilaya de Tébessa. Son père avait été programmé depuis quelques semaines pour subir une intervention chirurgicale au service de médecine interne de l'hôpital Ibn-Sina. Il est toujours dans l'attente. Totalement désarmés face à des ruptures dont, selon les termes de la même note, le cumul s'est répercuté négativement sur l'activité opératoire de l'établissement, les responsables du CHU sont dans l'expectative. Cette situation intervient au moment où il est enregistré une forte demande d'interventions chirurgicales de patients en provenance de plusieurs wilayas de l'est du pays atteints de différentes pathologies. Le comble est qu'informées de cette situation dés le début du mois de décembre courant, la direction générale de la Pharmacie Centrale des Hôpitaux (PCH) et celle de la Pharmacie au ministère de la Santé n'ont toujours pas réagi. «De ce fait, la quantité actuellement disponible à la pharmacie sera réservée exclusivement à l'urgence». L'on imagine mal des critères de sélection d'une urgence dans la prise en charge d'une intervention chirurgicale par rapport à une autre. Cette disposition étonne encore plus, car exprimée par un médecin aguerri aux activités des hôpitaux qui, plus est, est appuyé d'un conseil scientifique. Nos tentatives d'en savoir plus sur cette situation véritablement préjudiciable à la santé publique sont restées vaines, les directeurs de la santé de la wilaya d'Annaba et du CHU de Annaba étant en réunion.