Selon une première estimation publiée lundi par Eurostat, l'inflation ressort à 2,4 % sur un an dans les 17 pays de la zone, son plus haut niveau depuis octobre 2008, alors que les analystes interrogés par Reuters attendaient 2,3 %. Après 2,2 % en décembre, l'inflation dépasse pour le deuxième mois consécutif la limite de la BCE, située un peu en deçà de 2 %. Mais la Banque centrale, qui tient jeudi sa réunion mensuelle de politique monétaire, devrait surtout se focaliser sur la disparité croissante du rythme de la reprise dans les différentes économies de la zone euro et laisser inchangé son principal taux directeur, actuellement à un plus bas historique de 1 %. «Même si la BCE est loin d'être ravie de voir l'inflation des prix à la consommation dans la zone euro grimper un peu plus au-delà de son objectif (...), il est encore hautement improbable qu'elle passe à l'action lors de sa réunion de politique de février», estime Howard Archer, économiste chez IHS Global Insight. «Elle va sans doute durcir sa rhétorique anti-inflation et souligner qu'elle est prête à augmenter les taux d'intérêt, malgré le risque que cela comporte pour la croissance, si le pic actuel d'inflation semble (...) mener à une hausse significative des effets inflationnistes secondaires, comme par exemple les accords salariaux.» Après la publication du chiffre pour janvier, l'euro progressait de 0,83 % par rapport au dollar vers 12h30 GMT, soutenu par les anticipations d'une remontée plus rapide que prévu des taux d'intérêt. Le pétrole pèse sur le niveau des prix Cette estimation «flash» ne donne pas de variation mensuelle ni de détails par poste, mais les économistes attribuent en grande partie cette accélération de l'inflation à la flambée de l'énergieClemente de Lucia, économiste chez BNP Paribas, juge que les prix du pétrole sont probablement le principal facteur expliquant la hausse de l'indice des prix en janvier. Il souligne qu'en un mois, l'or noir s'est apprécié de plus de 3 euros par baril, soit un renchérissement de près de 20 euros par rapport à janvier 2010. Selon lui, les prix alimentaires devraient être restés stables en janvier et l'inflation de base, c'est-à-dire hors alimentation et énergie, devrait avoir grimpé à 1,2 % sur un an, contre 1,1 % en décembre. Les données complètes sur l'inflation dans la zone euro doivent être publiées le 28 février. Lors de sa précédente réunion de politique monétaire, début janvier, la BCE a évoqué des pressions inflationnistes à court terme qui, bien que limitées, méritent une surveillance étroite. Selon l'institution de Francfort, l'inflation devrait dépasser son objectif dans les mois à venir, touchant un pic à 2,4 % en mars avant de reculer. Ewald Nowotny, membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a déclaré la semaine dernière qu'il ne s'attendait pas à ce que la Banque centrale relève ses taux au cours du premier semestre 2011 en dépit de la hausse de l'inflation. Mais les économistes relèvent que les choix de politique monétaire de la BCE s'annoncent de plus en plus délicats en raison des disparités de croissance, et partant des pressions inflationnistes, entre l'Allemagne et les pays de la zone euro en difficulté, comme la Grèce, l'Irlande ou l'Espagne. «Clairement, (ce) ne sera pas une tâche facile pour la BCE», estime Clemente de Lucia. «Les pays périphériques sont confrontés à de sérieux risques déflationnistes. A l'inverse, l'«output gap» (écart entre la production réelle et la production potentielle, NDLR) se réduit en Allemagne, avec un taux de chômage déjà en dessous de son niveau d'avant-crise. Par conséquent, des pressions à la hausse sont probables en Allemagne.»