L'inflation a plongé dans la zone euro en novembre tandis que le chômage remontait plus qu'attendu, une double évolution qui accroît la probabilité d'une forte baisse des taux d'intérêt de la Banque centrale européenne jeudi prochain afin de soutenir l'activité économique. Les prix à la consommation dans les 15 pays de la zone ont augmenté de 2,1% seulement sur un an au cours du mois écoulé, selon la première estimation publiée vendredi par Eurostat. Ce chiffre correspond à une baisse de 1,1 point sur un mois, un rythme inhabituel qui dépasse les attentes des économistes: ceux-ci anticipaient en moyenne une inflation revenue à 2,3%. Le taux d'inflation en rythme annuel dans la zone euro avait atteint un pic de 4,0% en juillet. "L'inflation va encore diminuer, elle devrait tomber sous 1% en 2009 et on ne peut pas exclure que le taux en rythme annuel devienne négatif", estime Jürgen Michels, économiste de Citigroup. "Tout cela donne à la BCE une confortable marge de manoeuvre pour baisser les taux. Nous nous attendons à une baisse de 75 ou 100 points de base en décembre et à de nouvelles baisses des taux l'année prochaine. Notre prévision, c'est que le taux de la BCE va redescendre à 1% ou même en dessous d'ici la mi-2009."La banque centrale entend contenir l'inflation légèrement en dessous de 2% et plusieurs de ses dirigeants ont laissé entendre ces derniers jours qu'ils disposaient d'une importante marge de manoeuvre pour réduire les taux jeudi prochain lors de leur réunion de politique monétaire. Elle a réduit ses taux de 50 points à l'issue en octobre puis en novembre et une enquête publiée mercredi par Reuters a montré qu'une majorité d'économistes s'attendaient à une baisse similaire le 4 décembre, qui ramènerait le taux de refinancement à 2,75%. Mais environ un quart d'entre eux tablent sur une baisse de 75 à 100 points de base. L'estimation instantanée de l'inflation publiée par Eurostat ne comporte pas de données détaillées. Mais les économistes estiment que la forte baisse des prix pétroliers est la principale explication du reflux de l'inflation. Le prix du baril a chuté de plus de 12 euros entre octobre et novembre, ce qui devrait avoir fait chuter d'environ 10% les prix de l'énergie inclus dans le calcul du taux d'inflation, explique Clemente de Lucia, économiste de BNP Paribas. Pour Christoph Weil, de Commerzbank, "même si l'inflation se rapproche de zéro dans le courant de 2009, nous considérons que le risque de déflation est très faible". "On est encore très loin d'une chute généralisée des prix dans la zone euro. Le marché s'attend toujours à des hausses de prix", ajoute-t-il, précisant que le marché des swaps de taux anticipe un taux d'inflation de 2,25% à moyen terme. Eurostat a parallèlement annoncé que le taux de chômage dans la zone euro était remonté à 7,7% en octobre, contre 7,6% le mois précédent. Les économistes anticipaient un chiffre de 7,6% pour octobre. Même si le taux de chômage est un indicateur retardé, sa hausse devrait contribuer à réduire les pressions inflationnistes dans la zone euro, qui a déjà subi deux trimestres consécutifs de baisse de l'activité économique. "La détérioration de plus en plus nette des marchés du travail va sans aucune doute peser sur la consommation dans la zone euro, ce qui compensera au cours des prochains mois l'effet positif du repli marqué de l'inflation", note Howard Archer, économiste de Global Insight. C'est en Espagne que le chômage a le plus augmenté en octobre, avec un taux passé de 12,1% à 12,8%. En France, le chômage est monté à 8,2% contre 8,0% en septembre.