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Sonatrach 2009/2013 face à la crise financière mondiale
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 24 - 01 - 2009

L'analyse du plan de financement de Sonatrach face à la crise financière mondiale est importante car procurant plus de 98% des recettes en devises à l'Algérie, expliquant en grande partie due à l'envolée des cours passés et non à une bonne gouvernance interne, les 140 milliards de dollars des réserves de change, le programme de soutien à la relance économique 2004/2009 qui dépassera certainement 200 milliards de dollars avec un taux de croissance moyen 2006/2009 inférieur à 3% non proportionnel aux dépenses, et le futur plan 2009/2014 (non arrêté soit 100 ou 150 milliards de dollars, la différence étant énorme) qui sera largement tributaire de l'évolution du cours du pétrole, le prix de cession du gaz étant indexé mais à un prix de cession moyen inférieur de 50% (coût important et marge bénéficiaire réduite).
1.- Or, de plus en plus d'analystes en énergie mettent récemment en relief que le monde est entré dans la décroissance de la consommation d'énergie et donc que postuler un modèle de consommation énergétique linéaire est une hypothèse fausse, réhabilitant ainsi les analyses du cycle du grand économiste Joseph Schumpeter dans la mesure où à l'horizon 2020 le monde devrait voir s'équilibrer sa demande tenant compte du nouveau défi écologique dont la généralisation du transport électrique. Dans son rapport sur l'évolution du marché pétrolier, publié le 16 janvier 2009, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) observe que la demande mondiale de pétrole a baissé de 0,3% en 2008, pour atteindre 85,8 millions de barils par jour (Mbj), et devrait baisser encore en 2009, étant la première contraction depuis 1982-1983 certes pour deux raisons intimement liées: le changement certes lent mais graduel du modèle de consommation et la crise économique qui pèse sur la demande, les investisseurs extrapolant le pic pétrolier. En effet, si les Chinois avaient le même taux d'équipement automobile qu'en Europe, leur consommation serait de 17 millions de barils par jour (Mbj), soit autant que toute la production du Moyen-Orient, ce qui est impossible à réaliser. Ainsi, l'évolution du cours du pétrole sera-t-il déterminée fondamentalement par la future politique énergétique des Etats-Unis d'Amérique, premier consommateur mondial d'hydrocarbures.
Donc l'hypothèse d'une demande durablement en baisse est donc crédible même s'il y a reprise impliquant d'ailleurs de nouveaux mécanismes de régulation à l'échelle mondiale.
Car la crise actuelle n'est pas conjoncturelle mais structurelle et pourrait se prolonger jusqu'en 2014/2015, si l'on exclut la vision très pessimiste du président Barack Obama qui extrapole jusqu'en 2018/2019 et ce à l'instar de la crise de 1929 qui a débuté en 1927, s'est manifestée en octobre 1927, a atteint son apogée entre 1934/1935 pour s'atténuer qu'au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Du fait de l'interdépendance des économies, tous les pays sont atteints, la Chine ne devrait pas avoir pour 2009/2010 une croissance inférieure à 6/7% alors que le minimum requis pour la cohésion sociale est de 8% avec une possibilité d'une très grave crise sociale et politique, la Russie est soumise à la turbulence, tous les pays occidentaux sont entrés en récession avec une croissance négative, les autres pays en voie de développement (Asie, Amérique latine), l'Afrique, le taux devrait chuter de 6,5% à 4,5% en 2009, et pour le monde arabe en crise également malgré ses pétrodollars ayant perdu plus 2.500 milliards en sous capitalisation et plus de 500 milliards de dollars en pertes sèches dues aux placements hasardeux avec une prévision d'une baisse des investissements de plus de 60% par rapport aux années antérieures. Les mesures d'urgence donc conjoncturelles, avec des taux d'intérêts directeurs zéro, ce qui pose le problème des dépôts algériens à l'étranger (limitant donc les politiques monétaires), en ne s'attaquant pas aux causes véritables, risquent de reporter dans le temps la crise car les recettes keynésiennes de relance de la demande globale au moyen du déficit budgétaire (consommation et investissement) ont été conçues dans le cadre d'Etats-Nations et ne sont valables que pour le court terme et le risque est de passer de la déflation (baisse des prix et de l'activité) à la stagflation (hausse des prix, baisse de l'activité) avec l'inévitable dérapage du dollar représentant plus de 60% des transactions mondiales, l'appréciation récente du dollar par rapport à l'euro étant due au rapatriement massif des capitaux au détriment de l'Europe.
2.- Face à cette situation, il faut être réaliste, la réforme globale ayant accusé un retard important à cause du blocage de la production et exportation hors hydrocarbures en Algérie, blocage qui risque de s'accentuer car confondant régulation importante de l'Etat comme chef d'orchestre et le retour au volontarisme étatique qui nécessitera de plus en plus de financement local, étant admis maintenant selon les derniers rapports du FMI, de la Banque mondiale, de la CNUCED, à un frein des investissements directs étrangers, frein plus accentué pour l'Algérie comme vient de le souligner l'OCDE avec les dernières mesures gouvernementales, la poursuite de l'investissement de Sonatrach y compris Sonelgaz est donc importante si l'on raisonne en dynamique, besoins croissants futurs et éviter de perdre des parts de marché, si demain la conjoncture permet un retournement de tendance mais sans être utopique comme démontré précédemment. Ce n'est pas Sonatrach qui n'a pas suivi, s'adaptant au cadre concurrentiel mondial en perpétuel mouvement, encore que des efforts doivent être menés pour réduire les coûts, mais les autres secteurs qui ont privilégié la dépense monétaire au détriment à la fois des réformes de structures et de la maîtrise de leur gestion.
C'est dans ce cadre, me semble-t-il, que le ministre de l'Energie et des Mines et le président-directeur général de Sonatrach viennent de mettre un terme aux supputations en affirmant «que le plan de développement de Sonatrach sera mené à son terme et aucun projet de l'entreprise ne sera gelé pour un montant de plus de 63 milliards de dollars entre 2009/2013», montant auquel il conviendra d'ajouter les 15 milliards de dollars pour Sonelgaz, soit au total 78 milliards de dollars, donc un montant annuel approchant 20 milliards de dollars comme je l'ai annoncé à maintes reprises à la presse nationale il y a de cela plusieurs mois. Et cela concerne tant les projets pétrochimiques qui ont déjà démarré, que le programme à l'international sur lequel Sonatrach est déjà engagée dans plusieurs pays pour augmenter ses réserves: Egypte, Libye, Niger, Mali, Mauritanie, Pérou, la création des sociétés de commercialisation de gaz en Europe qui vont permettre à la société d'aller jusqu'au client final pour capter une partie de la rente. Mais précision de taille, cela concerne les projets engagés, ceux inscrits et les projets en cours de maturation, dont les projets engagés l'ammoniac et les engrais avec Bahwan et avec Orascom, le projet de cracking d'éthane avec Total et le complexe de méthanol avec le consortium international Almet, les projets pour le cracking du fuel, le cracking du naphte mais qui sont toujours en appel d'offres, la déshydrogénation du propane, le polypropylène et la raffinerie de Tiaret. Concernant le projet de l'aluminium dont le coût dépassera les 3 milliards de dollars US tenant compte de la jetée, du port et de la centrale électrique de 2200 MW, il est en cours de discussion, devant rectifier le système 51-49% avec l'augmentation de la participation de Sonatrach.
3.- Quel est l'impact financier face à la crise pour l'Algérie? Le ministre de l'Energie se conformant aux directives gouvernementales a exclu de faire appel au financement extérieur, privilégiant l'autofinancement. Or le chiffre d'affaires à l'exportation (gaz et pétrole, bilan officiel) pour 2008 a été d'environ 77 milliards de dollars (pour un cours du baril moyen de 110 dollars), 232 millions de tonnes en équivalent pétrole, en précisant que le manque à gagner 2009 du fait de la réduction du quota OPEP par l'Algérie sera d'environ 5 milliards de dollars US et que pour les exportations de gaz prévues horizon 2012 à 85 milliards de mètres cubes gazeux tenant compte des extensions de Medgaz et Galsi, qu'il faille tenir compte des prévisions de la consommation intérieure de la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (CREG) passant de 25,6 milliards en 2007, 27,4 en 2008 à 55,157 en 2017 scénario moyen et plus de 63 milliards de mètres cubes gazeux si tous les projets sont réalisés soit au total une production annuelle de 85 plus 63, soit 148 milliards de mètres cubes gazeux. En matière de fiscalité, pour l'année 2007 Sonatrach a versé 2.700 milliards de dinars et pour l'année 2008, 3.700 milliards de dinars soit au cours de 2008 (moyenne 63 dinars un dollar, le taux de change jouant au yoyo après avoir été de 103 dinars un euro fin décembre 2008, depuis le 20 janvier 2009 à environ 93 dinars et le dollar, dont sont libellées les exportations d'hydrocarbures, son appréciation permettant de gonfler artificiellement le fonds de régulation et la fiscalité pétrolière, dont la cotation était 63 dinars, puis 78 fin décembre 2008 et depuis le 20 janvier 2009 à 71 dollars), plus de 58 milliards de dollars donc un autofinancement qui approche les 20 milliards de dollars, car ne devant pas confondre la loi sur la monnaie et le crédit qui stipule pour toute entreprise de transiter par la Banque d'Algérie pour déposer ses recettes à l'exportation et l'autofinancement de Sonatrach qui est une société par actions non régie par la comptabilité publique. Qu'en sera-t-il si le cours est de 50, 40 et 30 dollars ? Le versement au Trésor sera pour 50 dollars moins de 27 milliards de dollars, pour 40 dollars moins de 23 milliards de dollars et pour 30 dollars inférieur à 19 milliards de dollars, supposant la stabilité du dollar, qui s'ajoutent aux réserves de change actuelles.
Or les importations 2008 approchent les 40 milliards de dollars en 2008, plus 10 milliards de dollars de transfert des dividendes/services y compris les associés de Sonatrach, soit 50 milliards.
Du fait que l'Etat algérien doit être majoritaire dans tout investissement porteur à moyen et long terme, ce qui conduit à une marginalisation du privé national et international, (la structure des importations actuelles la part de l'équipement et biens intermédiaires (sans compter les biens alimentaires d'environ 7,5 milliards de dollars), allant surtout au BTPH, les infrastructures n'étant qu'un moyen et non l'outil stratégique de tout développement qui relève de l'entreprise et son fondement, le savoir dévalorisé au profit des emplois rentes) si l'on veut créer des segments hors hydrocarbures (ces fameux champions industriels au moment où existe une crise manufacturière mondiale sans précédent), la part de l'investissement minimum, hors Sonatrach et Sonelgaz, doit être au minimum 20 milliards de dollars (partie devises toujours), ce qui nous donnerait une sortie en devises de 70 milliards de dollars annuellement au rythme des autres dépenses 2008. Ne devant pas faire une double comptabilité car le montant du fonds de régulation inclut déjà une partie des réserves de change convertie en dinars, devant surtout être attentif à la balance des paiements, aussi, des tensions budgétaires se manifesteraient début 2011 pour un cours de 50 dollars, supposant toujours la stabilité du dollar, avec plus d'intensité fin 2010 pour un cours de 40 dollars et une extrême gravité pour un cours de 30 dollars. Un changement de politique socio-économique s'impose, supposant une profonde mutation systémique et donc l'approfondissement de la réforme globale avec un rôle important pour l'Etat régulateur dans le cadre d'un Etat de droit. Car je pense qu'à moyen terme, il ne peut y avoir de développement sans une véritable démocratie. La crise économique avec des incidences sociales, devant durer au-delà de 2012, la sécurité nationale étant posée, la période 2009/2014 en Algérie impose justement une autre gouvernance pour atténuer les effets de la crise et de préparer les bases d'un développement durable au profit des générations futures loin des intérêts de la rente.
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* Expert international en énergie


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