Invité dimanche soir par la télévision nationale en sa qualité de secrétaire général du RND, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a répondu à une question relative à l'accès au logement en faisant valoir «que le problème réside dans la distribution dans laquelle il y a beaucoup de bricolage». C'est, selon lui, à cause de «ce bricolage» que malgré le grand effort consenti par l'Etat, concrétisé par la réalisation de 835.000 logements au 31 décembre 2008, la demande est toujours aussi importante. «Bricolage» est un terme charitable pour qualifier ce qui se passe effectivement dans les opérations de distribution de logements un peu partout à travers le pays. Mais du moment que le Premier ministre y a eu recours pour qualifier les pratiques en vigueur en ce domaine, nous le lui empruntons pour le généraliser à toute la politique gouvernementale. Oui, il y a du bricolage dans la gestion du pays et pas uniquement s'agissant de la distribution des logements. Il n'y a rien dans les actions et les décisions gouvernementales que l'on peut mettre sur le compte de visions cohérentes et d'une stratégie globale. Toutes portent la marque de ce bricolage que Ouyahia ne semble avoir vu que dans la distribution des logements. N'est-ce pas bricoler quand l'exécutif passe son temps à endosser des programmes ou des mesures qu'il change par d'autres sitôt qu'il s'avère que leurs contenus et nécessités n'ont pas été mûrement étudiés ? Pour rester sur le problème de la distribution des logements, Ouyahia a, en reconnaissant la nocivité du bricolage qui tient lieu de politique en la matière, admis implicitement par conséquent la légitimité de ces protestations et des mouvements de contestation auxquels les opérations de distribution de logements donnent lieu d'une manière récurrente. Que va faire le Premier ministre pour faire cesser ce qu'il a qualifié «de politique sociale qui se fait sur le dos de la société»? Certainement nous «bricoler» d'autres règles du jeu et procédures qui «règlementeront» l'accession au logement. Sauf que la culture du bricolage étant la source du mode de gouvernance qui se pratique dans notre pays, ces nouvelles règles et procédures n'auront pas plus d'effet positif que cautère sur une jambe de bois. Le bricolage que fustige le Premier ministre a de beaux jours encore devant lui tant que perdurera le fonctionnement du système qui en a fait son mode de gouvernance. Et ce n'est pas en période électorale que nos gouvernants s'abstiendront d'y avoir recours. Au contraire, toutes les mesures qui seront annoncées dans ce contexte ressortiront de cette politique à laquelle le bricolage tient lieu de stratégie.