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Sommet européen: Si l'Amérique le veut bien

Jeudi et vendredi, les 27 chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE ont discuté à Bruxelles d'une position commune à adopter lors du sommet mondial de Pittsburgh (USA), consacré à la crise financière et économique. Ils en ont conclu que sans la volonté américaine de tempérer l'appétit de ses banques, la crise irait crescendo.
Le sommet de l'UE de jeudi-vendredi a remis au grand jour deux principales vérités (logiques) historiques du capitalisme: son fondement sur le profit financier d'abord, et sa tendance à l'hégémonie sur l'économie mondiale. Les chefs d'Etat et gouvernement des 27 pays membres de l'UE réunis à Bruxelles jeudi et vendredi ont reconnu leur incapacité à freiner, seuls, la spirale inflationniste qui frappe l'économie mondiale et encore moins d'anticiper, réellement et vraiment, sur d'éventuelles autres crises financières et bancaires.
Les Européens affrontent plusieurs dilemmes: comment organiser les banques à soutenir l'économie réelle sans qu'elles n'engrangent des profits financiers incontrôlables ? Jusqu'à quel niveau d'endettement les Etats peuvent-ils aller en soutenant les banques en cas de crise ? Faut-il laisser la liberté aux Etats les plus touchés par la crise à creuser leurs déficits publics sans tenir compte de la solidarité au sein de l'UE ? Et enfin, comment tempérer l'ultralibéralisme économique des USA ? Autrement dit, le sommet de l'UE n'a rien fait d'autre que de constater l'inévitable évolution de l'économie mondiale vers plus de globalisation et sa domination (conditionnement) pour l'heure par la voracité de l'économie américaine. Ce constat ressort dans le communiqué final dans lequel l'UE appelle les USA à mettre des limites à la logique de la maximalisation des profits des banques par l'intermédiaire des bonus attribués aux traders et gestionnaires. Pour le reste, rien de nouveau en la matière.
Les premiers responsables européens ont répété leurs intentions annoncées depuis le mini-sommet de Londres de janvier 2008 (France, Angleterre, Allemagne et Italie) soit avant l'apparition de la crise aux USA en septembre 2008. Ces intentions se résument à un appel pour une meilleure régulation du marché financier mondial, une surveillance accrue des agences de notations bancaires, une lutte contre les paradis fiscaux, le plafonnement des bonus, etc. Les USA répondent «oui» à toutes ces bonnes intentions européennes, mais réaffirment leur respect «sacré» à la totale liberté du jeu (concurrence) financier des banques.
A Pittsburgh, le président Obama n'aura aucun intérêt à se mettre à dos les lobbies financiers, particulièrement au moment même où il se bat pour une réforme du système de santé au profit des plus démunis. Obama a assez à faire pour convaincre le Congrès américain de son projet, pour en rajouter celui de la liberté du monde de la finance. La consolation pour les Européens tient à une promesse américaine de réformer, plus tard, les règles de fonctionnement de la Banque centrale (FED) pour une meilleure régulation du capital des banques et un système de prévision des crises cycliques. Par ailleurs, les dirigeants européens font face à une autre difficulté majeure: le ralentissement de leur croissance économique.
Les premiers grands effets de la crise financière de septembre 2008 sur l'économie réelle et le social ne font que commencer. Les plans de licenciements, les faillites des PME et les nombreuses restructurations (y compris les délocalisations) annoncées pour la fin 2009 et 2010 indiquent clairement que le capitalisme financier n'a changé ni de nature, ni de méthode. Pour redémarrer la croissance, l'emploi et les filets sociaux, les Etats ont besoin des banques. Or, les banques n'ont d'autre moyen pour augmenter leurs capitaux que de jouer sur les taux d'intérêt, le jeu boursier et la spéculation financière afin de dégager des marges de bénéfices par lesquelles elles financeront (fiscalité) les Etats.
Ainsi, les économies européennes et américaine sont coincées dans ce cercle vicieux, essence même du fonctionnement du capitalisme financier. Et ce n'est pas sans raison que des observateurs politiques parlent de «crise idéologique» du système capitaliste mondial. Vous aurez remarqué, par exemple, que depuis l'apparition de la crise, les débats au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) se sont tus. Les dirigeants européens iront à Pittsburgh sans grandes illusions. La crise est partie des USA, et eux seuls peuvent décider de la freiner ou de l'atténuer. Ce qui est une autre histoire.


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