L'affaire des cadres de la société STH, filiale de Sonatrach, poursuivis par la justice à Oran, pour leur implication dans des transactions «douteuses», fait des vagues. Le syndicat national de la Société de gestion des terminaux marins à hydrocarbures vient de réagir. L'incarcération du P-DG de la filiale et de quatre autres responsables du staff, une mesure judiciaire dénoncée par le syndicat, a amorcé un débat de fond sur un sujet à polémique, extrêmement délicat. «Dans la gestion de Sonatrach, faut-il appliquer la circulaire du ministère de l'Energie, connue dans le jargon du secteur des hydrocarbures sous l'abréviation «la R 15», ou le code des marchés publics ? », résume le secrétaire général du syndicat de la STH, M. Zaïr. «Nous sommes devant un dilemme très ambigu et non moins dangereux», ajoute-t-il dans une déclaration au «Quotidien d'Oran», visant à «apporter la lumière sur l'affaire dite des transactions suspectes de la STH». Le syndicat STH, affilié à la Fédération des travailleurs du pétrole et du gaz (FNTPG), UGTA, a tenu à exprimer en haut lieu sa désapprobation quant à la manière dont a été diligenté ce dossier à travers une lettre adressée à Chakib Khelil. Tout en soulignant le climat de «désarroi et d'inquiétude» qui s'est installé au sein du collectif - notamment l'encadrement - de la filiale STH, à Arzew, après «l'arrestation musclée de huit de nos cadres dirigeants, à la veille de l'Aïd El-Adha, et dont cinq ont été placés en détention provisoire par la suite», le syndicat estime qu'à la lumière de l'analyse, faite par ses soins, des griefs reprochés aux huit cadres dirigeants, «tout gestionnaire soucieux de l'efficacité de gestion peut se retrouver ainsi en position de hors-la-loi et s'exposer de ce fait à des ennuis judiciaires». Le syndicat jette sur le tapis une question essentielle, d'ordre légal et technique à la fois, et qui s'avère être le point névralgique de toute cette affaire: le mode de passation des marchés en vigueur à Sonatrach. Dans ce contexte, le syndicat STH, par la voix de son SG, qui est en même temps membre du staff de la DR Ouest de cette filiale dont la Sonatrach détient 60 % des parts du capital social (contre 20 % pour l'Entreprise portuaire (EP) d'Arzew, 15 % pour l'EP Skikda et 5 % pour l'EP Béjaïa), rappelle que «notre ministère de tutelle, soucieux de l'efficacité économique de nos entreprises d'exploitation, a mis en place, à travers Sonatrach, des outils de gestion régis par la directive A408 R15 du 12 octobre 2004, qui définit le recours au gré à gré sous certaines conditions». «Cette directive, poursuit le SG du syndicat STH, prend en charge l'urgence de gestion des installations à hydrocarbures et donne, sous certaines conditions bien définies, des pouvoirs de passer outre les dispositions du code des marchés publics aux premiers responsables des structures, ce qui amène ces derniers à user de ce pouvoir dans l'exercice de leurs responsabilités.» Et d'ajouter: «Cette disposition pourrait être, au regard de la loi, en porte-à-faux avec la législation qui régit les marchés publics 03-301 qui reste, à juste titre, la seule base d'appréciation de notre justice, tant que l'ambiguïté sur le secteur économique étatique persiste». Le syndicat STH ne cache pas sa crainte de voir la mésaventure des huit cadres influer négativement sur l'état d'esprit des gestionnaires de l'ensemble de la compagnie nationale des hydrocarbures et instaurer un climat de défiance et d'aboulie au détriment de la sérénité de réflexion et de la célérité d'action dans la gestion des installations à hydrocarbures, laquelle fait appel à la vitesse d'exécution et un mode opératoire débureaucratisé, et ce, conformément à l'esprit et à la lettre de la circulaire ministérielle R15. Dispositif qui est, souligne le porte-parole du syndicat, «non reconnu par les juges», y compris ceux en charge de l'affaire STH Arzew. Il est à rappeler que cinq cadres de la STH, parmi lesquels le P-DG, le directeur régional Ouest (Port d'Arzew), avaient été placés sous mandat de dépôt, le 25 novembre dernier, sur ordre du juge d'instruction près le tribunal d'Arzew, relevant de la cour d'Oran, et ce pour «passation de marché non conforme aux dispositions du code des marchés publics, la dilapidation de deniers publics et le trafic d'influence». Trois autres cadres avaient bénéficié de la liberté provisoire. L'affaire a trait à des transactions suspectes, conclue par la STH à coups de devises fortes avec des fournisseurs étrangers, pour la fourniture d'équipements, dont notamment des flexibles pour le chargement de pétrole dans les navires, à partir du port comme en haute mer, ainsi qu'un matériel de sécurité technologique portuaire. L'un des griefs retenus contre les mis en cause, selon une source judiciaire, la surfacturation des prix unitaires du matériel acquis par la STH, considérée comme le dernier maillon de la chaîne des hydrocarbures, avec ses quatre activités principales, chargement/déchargement, remorquage, amarrage et pilotage.