Les discussions informelles qu'ont eues mercredi et jeudi Marocains et Sahraouis sous l'égide de l'ONU se sont achevées sans aucun accord entre les deux parties. Ce qui était prévisible malgré les déclarations optimistes faites avant leur ouverture tant par le secrétaire général de l'ONU, M. Ban Ki-moon, que par son envoyé spécial pour le Sahara Occidental, l'Américain Christopher Ross. Rien en effet de nouveau et positif n'est intervenu dans la question sahraouie depuis la tenue à Vienne en Autriche, il y a quelques mois, d'une rencontre du même genre. Bien au contraire, le Maroc s'est ingénié durant cette période à provoquer ses interlocuteurs sahraouis dans le but de les pousser à refuser de poursuivre le dialogue placé sous l'égide de l'ONU. La provocation marocaine s'est manifestée d'abord sous la forme d'un discours très agressif et insultant à l'égard des patriotes sahraouis, commis par le souverain à l'occasion de l'anniversaire de la «Marche verte» qui a entraîné l'occupation par le Maroc du territoire sahraoui. Le roi a été non seulement insultant, mais il a pour la circonstance sorti un nouveau «gadget politique» tout aussi inacceptable pour les Sahraouis que l'a été son plan «d'autonomie large». Ce gadget consiste en la substitution à cette «autonomie large» du concept de «régionalisation» qui en commençant par le territoire sahraoui s'étendrait à l'ensemble du royaume. Mais le plus grave a été que le discours royal a donné le feu vert à un durcissement à la répression déjà féroce que le Makhzen et les forces de sécurité exerçaient sur les militants et citoyens sahraouis. Il s'agissait pour le trône marocain à travers cette répression dédoublée de tenter de faire taire l'opposition qui s'exprime de l'intérieur du territoire sahraoui occupé contre la fiction de la «marocanité» de celui-ci, et ainsi donner le change à la communauté internationale en présentant le Polisario comme une organisation de «mercenaires» sans audience dans la population sahraouie et stipendiés par des puissances régionales (l'Algérie bien entendu) hostiles à l'unité du royaume. L'affaire Aminatou Haider et celles d'autres militants sahraouis des droits de l'homme persécutés et embastillés par le Makhzen ont mis à nu le barbare calcul royal en démontrant à la communauté internationale que le combat pour l'autodétermination du peuple sahraoui se mène aussi à l'intérieur du royaume et dans le territoire occupé. L'on comprend que dans le climat électrique provoqué par l'initiative de Mohammed VI, Christopher Ross ait qualifié de positif l'accord qu'il a obtenu des deux parties de reprendre contact à travers une seconde rencontre de discussions informelles. Mais il est clair que ce processus de rencontres qui n'aboutissent à rien de concret ne peut être poursuivi indéfiniment. Seul le Maroc y trouve intérêt, car il lui permet à peu de frais de donner l'image d'être acquis au dialogue et à la négociation prônés par les Nations unies. La balle est dans le camp de l'ONU. Le temps est venu qu'elle impose le retour à de vraies négociations sur le fond du conflit sahraoui. Négociations dont elle a délimité le cadre et surtout la finalité ultime qui est que soit donné au peuple sahraoui latitude de s'exprimer par la voie référendaire sur ce qu'il veut ou ne veut pas.