Les syllogismes du monde occidental sur l'Islam et la modernité, le terrorisme et le crime organisé ont été au centre de l'intervention, lundi, dans la capitale qatarie de Abdelaziz Belkhadem, qui a représenté le chef de l'Etat au 7e Forum Etats-Unis/Monde islamique. Le représentant de l'Algérie à ce forum annuel, qui se veut être une passerelle de dialogue entre la première puissance économique et militaire mondiale et les pays membres de la conférence de l'Organisation islamique (OCI), n'a pas manqué cette occasion de tordre le cou à certaines théories en vogue, actuellement, dans le monde occidental, particulièrement aux Etats-Unis et notamment après le 11 septembre 2001. Il a, ainsi, tenu à rappeler devant un auditoire constitué des principaux responsables des pays membres de l'OCI, mais surtout devant le chef de la diplomatie US, Hillary Clinton, que le terrorisme et le crime organisé sont deux entités différentes qu'il faut combattre avec des moyens, évidemment, différents. Il a, ce faisant, tenu à détruire cette fâcheuse tendance des pays occidentaux, les Etats-Unis en première ligne, de cataloguer tous les ressortissants de pays islamiques ou musulmans comme terroristes. Belkhadem a, ainsi, fait remarquer que «l'Algérie fonde sa relation avec le monde sur les principes de respect et d'ouverture, tout en rejetant la logique de force et la loi qui ne fait pas de distinguo entre lutte antiterroriste et criminalité organisée». «Il ne faut surtout pas dissocier cette relation de celle entre le monde islamique et l'Occident en général, notamment dans un contexte de visions préjudiciables qui cherchent à justifier l'existence de contradictions entre les deux parties», a-t-il encore souligné. Pour le représentant personnel de Bouteflika, «aucune partie ne peut ignorer l'autre», tant du côté du monde musulman que de celui des pays occidentaux, mettant en garde, en outre contre certains clichés galvaudés en Occident, comme par exemple le fait que «l'Islam est incompatible avec la modernité et qu'il représente une menace pour l'humanité». Belkhadem regrette ainsi «ce type de raisonnement, qui est encore très courant et s'incruste dans l'opinion publique occidentale». L'affaire de l'interdiction des minarets en Suisse, ou l'interdiction du voile islamique et la burka en France et en Belgique, en sont des preuves palpables de cette islamophobie développée en Occident, estime M. Belkhadem. Le résultat de tels comportements autant politiques que sociaux dans les pays occidentaux, en Europe et aux Etats-Unis surtout, est l'apparition de «stéréotypes dangereux qui présentent l'Occident comme le bon, l'instruit qui respecte les libertés individuelles et collectives et le Monde musulman comme l'agressif, le sous-développé qui méprise les droits des citoyens ». L'intervention de Belkhadem à ce forum, initié en 2004 au Qatar, aura eu ainsi le mérite de poser les grandes questions du débat entre monde musulman et Occident, deux grandes entités politiques et géographiques qui luttent, ensemble, contre le terrorisme, d'où qu'il vienne, selon la suggestion de M. Belkhadem qui a, également, averti contre l'amalgame entretenu en Occident autour du triptyque «musulman, terrorisme et crime organisé». C'est en fait une nouvelle clarification de la position de l'Algérie sur ces questions qui ont conduit certains pays, dont les Etats-Unis, à durcir le régime de leur politique d'immigration, allant jusqu'à établir des listes noires de pays dont les ressortissants sont presque interdits d'entrée dans l'espace américain, et bientôt celui de Schengen. Pour autant, Belkhadem a reconnu que l'Algérie «partage certaines vues sur les relations entre le Monde musulman et les Etats-Unis», estimant que le Forum de Doha contribue à «combler le fossé et à soumettre des propositions», et a salué la démarche du Président américain Barack Obama de «jeter des ponts entre l'Amérique, l'Occident et le monde musulman».