Annonce : Equipe nationale, quasi-totalité des joueurs internationaux (et binationaux), très bonne défense, entraîneur chevronné, ayant les meilleurs supporteurs qu'une sélection puisse avoir, très bien considérée par sa presse nationale, ayant la confiance de ses dirigeants, cherche buteur... de préférence binational (pour la cohésion du groupe) mais pas nécessairement, pour collaboration fructueuse dans les prochaines compétitions internationales. Salaire et youyous selon performances (et non compétences). Voilà en quelques mots ce que nos cœurs demandent et ce que sont nos aspirations. Trente-six millions d'Algériens, petits et grands, hommes et femmes, cherchent un, un seul buteur. Mais revenons un peu au match et à son lendemain. Ce vendredi, la performance de notre équipe nationale a balayé tous les doutes que certains pourraient avoir quant au niveau de nos joueurs et de notre papi sélectionneur. Une leçon a été donnée à certains joueurs grand-bretons mégalomanes qui rêvaient tout éveillés qu'ils étaient déjà en seizième de finale, qui pensaient sans doute ne faire qu'une bouchée de nos Verts. Mais grosso modo, ce fut un bon match : le fair-play régnait et les deux seuls cartons jaunes de la partie se distinguèrent très positivement des matches des équipes précédentes. Nos joueurs et nos adversaires ont mouillé leurs maillots, ils ont beaucoup donné. Même dans les gradins, avant et après le match, les supporteurs algériens et anglais se comportèrent avec exemplarité. Le lendemain samedi, alors que notre presse nationale ne manquait pas d'éloges vis-à-vis des Verts, les tabloïdes anglais se déchaînèrent sur l'entraîneur mercenaire italien Fabio Capello que l'on dit surévalué, surpayé, mais inefficace. Payé huit millions huit cent mille euros (c'est l'entraîneur le mieux payé au monde) pour mener une des meilleures équipes du moment vers la consécration suprême, Fabio n'a réussi qu'a décrocher deux nuls avec des équipes, dit-on, de «seconde zone». Les joueurs aussi ne furent pas épargnés. Un journaliste du Daily Mirror, avec tout l'humour acerbe british, fustigea: «Hier soir, nous n'avions pas de Wayne Rooney. Il y a bien eu un mec sur le terrain du nom de Rooney, qui portait le maillot 10, mais ce ne fut pas notre Wayne Rooney [serait-ce un imposteur ?], et si Rooney n'est pas Rooney, alors l'Angleterre n'est pas l'Angleterre»! Un autre journaliste du même journal avertit qu'il ne fallait pas trop rêver à la Coupe du monde, et que si l'Angleterre se qualifiait pour le prochain tour, ce serait déjà un exploit. Un troisième enfonça le clou pour déclarer que les joueurs ne méritaient pas le maillot qu'ils portaient. En parlant de maillot, le prestigieux Times a, quant lui, noté qu' «il y a dix-huit mois (quand il a pris ses fonctions), Fabio Capello a remarqué que le maillot de l'équipe d'Angleterre semblait être lourd à porter. Hier soir, on aurait dit qu'il était en plomb». Alors, les Anglais furent-ils si lents, si impuissants que cela ? Le match nul serait-il dû à une équipe anglaise hors du coup, ou à une équipe algérienne à la hauteur de l'événement ? La presse anglaise aime à penser (arrogance et dédain obligent) que la faute revient à leur sélection et à leur entraîneur; comme si la logique, les lois de la physique et du sport ne concevaient d'autre issue que la victoire indéniable de l'équipe anglaise. Pas un mot sur le jeu fulgurant de nos Verts. Mais il faut bien se mettre à l'évidence : nos joueurs ont joué, et ils ont très bien joué. Ce vendredi, Fabio a eu beau gueuler, grimacer, sautiller, gesticuler dans tous les sens, conseiller, ordonner, rien n'y fit. Les Fennecs ont tenu avec panache. Ils ont résisté jusqu'au sifflet final. Et là, penchons-nous sur notre équipe et son exploit, même assez relatif. Notre équipe a résisté, elle a tenu bon. Mais est-ce bien là le rôle d'une équipe en Coupe du monde ? Une équipe doit-elle seulement résister et défendre, ou doit-elle aussi gagner ? Et on ne peut gagner sans marquer de but. Et on ne peut marquer de but si on n'a pas de buteur. Très simple équation. Nos joueurs ont fait un bon match dans la mesure de leurs moyens. Ils ont fait ce qui était techniquement possible : ne pas perdre. Ce vendredi, l'Angleterre, avec une des meilleures attaques du monde, ne put rien faire car elle avait devant elle une des meilleures défense qui soit. L'Algérie, elle, faisait face à une défense anglaise assez poreuse, mais ne put rien faire car elle n'avait pas de buteur. Nos joueurs prenaient le ballon, le possédaient, évoluaient. Mais arrivés en zone de réparation, ceux-ci ne pouvaient transformer l'action en but. Ils freinaient et ne savaient quoi faire de ce ballon. Les quelques tentatives de tirs furent mal cadrées, pas assez puissantes, ou se heurtèrent à un défenseur anglais. Tout cela était prévisible depuis la Coupe d'Afrique. En Angola, nous nous sommes qualifiés au second tour avec un seul but orphelin contre le Mali. Après cela, aucun but contre l'Egypte, le Nigeria, la Serbie, l'Irlande et les Emirats Arabes Unis (le but était consécutif à un penalty, pas une action collective ou individuelle). Nous n'avons réussi à marquer aucun but. L'expérience folle contre la Côte d'Ivoire (3-2) est l'exception qui confirme la règle. Avec la Slovénie, ce fut la même triste réalité : une équipe algérienne qui dominait, qui contrôlait tout, mais qui ne pouvait pas marquer. Sans attaque, sans buteur, nous serons condamnés à jouer et nous contenter pour la plupart du temps qu'à des matches nuls. L'annonce en chapeau ci-dessus est donc lancée. * Département d'anglais - Université Mohamed Khider de Biskra