« Il y a une espèce de honte d'être heureux à la vue de certaines misères. » La Bruyère L'actualité ramadhanesque nous révèle chaque jour que le Bon Dieu fait en ce mois sacré les pires comportements ignominieux que l'on puisse imaginer. On excelle en ce mois qui est censé être celui de la piété et du pardon à pratiquer les plus basses besognes de roublardise et de trafic. Une ribambelle de tours de passe-passe est fourrée au nez et sous la barbe d'un consommateur crédule par des bouchers sans scrupules devenus en cette occase des illusionnistes avérés. La dernière trouvaille de leurs laboratoires-abbatoirs se nomme le métabisulfite. Revigorée et fardée, la viande putréfiée retrouve grâce à ce produit de morgue une nouvelle fraîcheur dans les étals de ces «bouchimistes». Après la viande de baudet hachée ou du poulet-vampire élevé et nourri sous perfusion, ces charcutiers de la charogne continuent de nous farcir notre naïveté dégoulinante. Un autre type d'escrocs-esquimaux s'ingénient à souffler « le froid pour le chaud ». Le truc consiste à « refroidir » dans leurs igloos toutes sortes de provisions alimentaires jusqu'au pourrissement uniquement pour « flamber » la mercuriale. Des O.V.N.I. (objet vendu non identifié) à perfusion inondent les boutiques encouragés en cela par l'avidité fiévreuse d'un consommateur en pleine hystérie dépensière comme si la fin du monde allait se planter. Conséquence de cette envie boulimique : des poubelles garnies jonchent nos rues et ruelles. C'est au tour des laissés-pour-compte, en rade, de musarder dans ces lieux, sous la pénombre nocturne à la quête d'un hypothétique ftour ou shour. Le clou de l'actualité de ce mois est sans conteste cette manie publicitaire viciée quasi quotidienne de certains organismes qui claironnent à tue-tête leur solidarité calculée. C'est selon son objectif. Se refaire une virginité ou s'ouvrir des perspectives transactionnelles bénéfiques. La méthode consiste à étaler, toute honte bue, dans une gymnastique exhibitionniste à coups de statistiques chiffrées, leur bonté, via les couffins de la faim et les restos du cœur de la conjoncture. Cette stratégie populiste insipide est à qui sert le plus de colis de ripailles. Désormais on soigne son image sur le dos de la pitance d'une aumône surmédiatisée. Dans cette course effrénée c'est aussi à qui arrive à « faire bouffer plus » pour tiquer, plus tard, plus avec bonus. Dans un autre registre marchand de cette piteuse cavalcade au pognon, l'on s'applique par des stratagèmes détournés à nous faire avaler à coup d'affiches des vessies-symbol pour des lanternes à moitié prix. Bien sûr sans se soucier des sentiments du commun des mortels. On fait plus fort dans les spots, par exemple on exploite dangereusement sur un air sicilien, l'image négative de l'impuissance parentale face aux caprices de leur progéniture, ou carrément afficher sans retenues dans un jeu de cache-cache bronché l'aisance et le gaspillage d'une certaine classe. Le but, nous soutirer les deniers d'une parlotte éphémère. Quant aux programmes concoctés par «l'unique», on persiste encore à nous débiner, par tube cathodique interposé, à l'heure du tube digestif, des insanités truffées de débilités déglinguantes payées à coups de millions, pour nous forcer à extirper un rire plutôt rageur pour tant de gâchis. Enfin on découvre hagards dans l'actualité journalistique, en ce mois de jeûne, les délires de foutus « petits futés » revanchards à qui l'on a ouvert voies et lois de ce pays pour défigurer à leur guise avec l'apport de nos sponsors son paysage touristique et faire fuir tout prétendant à une virée. Les comportements paradoxaux défiant toute logique font du coude à coude en ce mois de piété. Qui, empiffre sa fausse dévotion de vertus et de prières assidues « taraouihales » et renfile sans remords, goguenard, le lendemain son costume de vendeur-sangsue du marché. Qui, passe son temps à « incinérer le temps » au boulot en mettant au degré zéro toute initiative incriminant au passage avec conviction l'épreuve du jeûne. Qui, se spécialise aux délires des recettes, des galettes, et des emplettes puisque pour lui le temps est plutôt à la fête de la bedaine et non à celui de sa foi et de sa peine pourtant enfin à quoi bon puisque c'est le même ramdam qui défile chaque année en ce ramadhan sacré où pourtant les plus grandes conquêtes de l'Islam ont été remportées. Heureusement un vent de fierté en ces soirées de chaleur accablante nous est parvenu du Caire où la formidable jeunesse kabyle est arrivée définitivement à clouer le bec et à enterrer, dans son propre fief, l'arrogance égyptienne. Par cet exploit, la JSK vient mettre fin aux certitudes exagérées et maintes fois renouvelées du doc Saâdane sur les aptitudes du joueur local. Pourtant il a suffi de mettre en confiance une bande de jeunes et dans de bonnes conditions pour qu'elle réalise ce succès retentissant. « L'unique » comme d'habitude a laissé passer encore une fois l'occasion de se faire un brin de crédibilité. Son « lâchage » l'enfonce encore plus dans ses légendaires ratés. En définitive, on continue chaque année à réenclencher les mêmes réflexes, à alimenter à perfusion sa passivité et son insouciance face à une telle flambée d'outrecuidance qui s'affiche sans vergogne et qui va crescendo s'amplifier dans sa démesure sordide future. On se contente de la commenter à coups d'épisodes. C'est à qui décortiquerait le mieux la narration pamphlétaire de l'actualité journalière sans dépasser les limites de sa tablée. Saha ramdankoum * Universitaire - Saïda