L'action d'Orascom Telecom Holding, le groupe du milliardaire Naguib Sawiris, est au plus bas depuis 19 mois, traînant dans son sillage la Bourse égyptienne. En cause, son problème «Djezzy», sa filiale la plus rentable sur laquelle le gouvernement algérien a annoncé qu'il exercera son droit de préemption. Les efforts de communications de Sawiris et sa tentative, jugée «habile», d'implication des Russes de VimpleCom dans les négociations avec Alger, se heurtent à une fermeté non démentie du gouvernement algérien. Des analystes, à l'évidence trop crédules, ont vite décrété que les autorités algériennes étaient en «difficulté» avec l'irruption des Russes dans le débat. Comme si le Kremlin allait accepter de risquer des relations avec l'Algérie, déjà fructueuses et qui peuvent l'être encore davantage, pour les beaux yeux des dirigeants de VimpleCom et de Sawiris. Dans ce feuilleton Sawiris-Algérie qui passionne beaucoup d'observateurs, ceux qui ont quasiment décrété la victoire du «milliardaire égyptien» dégainant son «arme russe» ont oublié un important épisode. Celui de la mise en garde, par des voies diplomatiques et par voie directe, adressée par Alger au groupe sud-africain MTN : Djezzy, la filiale la plus rentable d'Orascom, ne fera pas partie du lot. Ni VimpleCom ni le gouvernement russe n'ignoraient cet avertissement adressé à une entreprise d'un pays qui entretient des relations chaleureuses avec l'Algérie. Personne n'aurait d'ailleurs compris que l'Algérie puisse accepter qu'une entreprise russe rentre là où une entreprise sud-africaine a été dissuadée. De ce point de vue, Sawiris, censé avoir acquis suffisamment de «connaissance» de ses vis-à-vis algériens, a été aussi plutôt malhabile. L'arme russe est inopérante. Et d'ailleurs, devant la fermeté de l'Etat algérien, ce sont les autres actionnaires qui émettent des doutes et des réserves sur l'opportunité de mener à son terme la transaction avec Orascom Telecom. Il y a bien sûr des batailles juridiques qui peuvent être menées par l'opérateur égyptien, mais choisir d'engager le bras de fer avec un Etat est très risqué. Les gains médiatiques obtenus à travers l'instauration de l'image d'un entrepreneur qui «réussit» et qui serait «brimé» et «jalousé» par un Etat n'empêchent pas une dépréciation de la valeur de l'action. Et une méfiance très claire des investisseurs à l'égard d'Orascom Telecom. Ceux-là raisonnent en fonction de leur intérêt et non en termes de sympathie ou d'antipathie pour l'un ou l'autre des protagonistes et font des constats simples. Dans le bras de fer entre l'Etat algérien et Sawiris, le premier n'est pas démuni. Il peut ce qu'il fait d'ailleurs réviser de manière scrupuleuse les comptes de Djezzy et lui exiger de se mettre en conformité avec la loi et le fisc. Mais surtout, un Etat peut se donner un temps qui n'est pas celui d'une entreprise. A trop manœuvrer, Naguib Sawiris a oublié des données élémentaires. Que les investisseurs n'oublient pas. Au demeurant, les «malheurs» présumés de Naguib Sawiris, qui n'a rien d'un ange et qui est plus un spéculateur qu'un investisseur, n'inspirent aucune compassion. Ce que l'on regretterait plutôt est que la rigueur de la loi et du fisc ne s'applique à lui qu'après le coup des cimenteries.