La violente attaque contre le campement à Laâyoune des protestataires sahraouis traduit l'affolement des autorités marocaines dont le discours sur l'autonomie est défié de manière pacifique et claire par la population. Les forces d'occupation marocaines n'ont pas fait de quartier à Laâyoune où elles ont tué des Sahraouis et saccagé leurs biens. Au moins 11 morts, 723 blessés et 159 disparus ont été enregistrés après l'assaut brutal mené par les forces d'occupation marocaines contre un camp de protestation pacifique sahraoui à Laâyoune. Le bilan, rendu public hier soir, par le Polisario, reste provisoire et risque en effet de s'alourdir en raison de l'ampleur de «l'agression barbare». Les forces marocaines ont également «saccagé des centaines de maisons et boutiques et détruit des voitures appartenant à des Sahraouis», a-t-il indiqué. La brutale attaque contre le campement, installé aux portes de Laâyoune, depuis le 10 octobre dernier, reflète parfaitement le rapport existant entre les forces d'occupation et les Sahraouis. La propagande sur le «soutien international au plan d'autonomie» paraît en effet ridicule alors que les Sahraouis affirment de manière «physique» leur choix indépendantiste. Si les réactions internationales ne sont pas toutes à la hauteur, il convient de noter la remarquable mobilisation de la société civile espagnole qui rappelle avec vigueur au gouvernement de Madrid sa responsabilité politique et morale à l'égard des Sahraouis. Les 25.000 personnes regroupées depuis le 10 octobre dernier au campement Agdim Izik ont, très clairement, manifesté leur rejet de l'occupation. Les Sahraouis ont d'ailleurs tenté de mettre en place des camps similaires à Smara, Boujdour et Dakhla mais ont été réprimés. Le campement de la protestation, initié par des jeunes chômeurs, est devenu un mouvement de protestation pacifique qui a complètement déstabilisé le pouvoir marocain. D'où la réponse brutale intervenue le jour même de la réouverture des négociations à New York. L'attaque contre le campement a été minutieusement préparée par les autorités marocaines, selon les Sahraouis. L'attaque a été supervisée par des officiers supérieurs de l'armée et en coordination avec les services de renseignement qui «maîtrisent parfaitement l'art de la torture, de la liquidation physique et de la disparition». L'Onu interpellée Les Sahraouis ont interpellé l'Organisation des Nations unies qui demeurait étrangement silencieuse sur les évènements. Le président de la RASD, Mohamed Abdelaziz a demandé à l'Onu d'assumer ses responsabilités dans la protection des civils et a demandé l'envoi d'une mission d'enquête sur les lieux pour «s'enquérir de la réalité du crime commis par le gouvernement marocain». M. Abdelaziz a demandé à l'Onu de mettre en place «sans plus tarder» un mécanisme des Nations unies pour la protection et la surveillance des droits de l'Homme au Sahara Occidental et l'élargissement des prérogatives de la Minurso pour prendre en charge cette mission. Pour mettre à exécution un acte de violence prémédité, les autorités marocaines ont veillé à empêcher la présence de tout témoin extérieur, sur place, tout en essayant, comme ce fut le cas avec El Arabiya hier, de présenter les forces d'occupation sous des allures de victimes. Le député communiste français, Jean-Paul Lecoq qui comptait se rendre à Laâyoune a été bloqué à l'aéroport de Casablanca avant d'être expulsé. Un autre eurodéputé, l'Espagnol Willy Meyer a été également empêché de quitter l'avion qui l'amenait des Canaries. «Je trouve inadmissible que l'on nous empêche, nous, parlementaires européens, d'aller voir ce qui se passe à Lâayoune», a déclaré Jean-Paul Lecoq, en relevant «qu'aucun observateur, aucun journaliste n'est en ce moment présent sur cette partie de territoire interdite». Après avoir observé un temps de silence, critiqué par Jean-Paul Lecoq, le ministère français des Affaires étrangères a regretté la «surprenante» décision marocaine.»Nous regrettons cette décision de refoulement et nous en avons informé l'ambassadeur du Maroc en France», a déclaré lors d'un point-presse, le porte-parole du Quai d'Orsay, Bernard Valero. La société civile espagnole mobilisée En Espagne, la brutale attaque contre le campement a suscité l'indignation des organisations de la société civile qui n'oublient pas, contrairement au gouvernement de Zapatero, la responsabilité politique, morale et historique de l'Espagne. Le président de la Fondation «Sáhara Occidental», maître José Manuel De la Fuente, a demandé au gouvernement espagnol d'exiger l'arrêt du massacre commis par le Maorc à Laâyoune. Il a appelé la société civile espagnole à l'union et à l'action en rappelant que le Sahara Occidental était «notre 53ème province qui a été mal décolonisée» et qu'il est de ce fait «indispensable» que l'Espagne intervienne. Le gouvernement basque a demandé une «enquête indépendante» sur ce qui s'est passé à Laâyoune et a exhorté le gouvernement espagnol et l'Union européenne à jouer «un rôle plus actif» dans le processus de décolonisation du Sahara Occidental. Le Parlement basque a approuvé une déclaration condamnant la violence du gouvernement du Maroc contre la population sahraouie et a demandé au gouvernement espagnol d'assumer le «rôle qui lui revient» et de soutenir le processus de résolution du conflit dans le cadre des Nations unies. «Il a appelé à être vigilant sur les «violations des droits de l'Homme au Sahara Occidental» et a réaffirmé son soutien à «l'autodétermination pour le peuple sahraoui dans les modalités convenues par les Nations unies». En fait, c'est pratiquement toute la société civile espagnole qui se mobilise en critiquant l'attitude du gouvernement de Madrid, il est vrai, très complaisante à l'égard de Rabat.