Le déploiement ostensible et très fourni des forces de sécurité dans la capitale, observé depuis quelques jours, l'a été en prévision de l'éventualité de la marche populaire de protestation que le RCD persiste à organiser aujourd'hui malgré son interdiction signifiée par la wilaya d'Alger. L'impressionnant quadrillage policier mis en place dans la ville et dans les quartiers susceptibles d'être réceptifs à l'appel à manifester de la formation du docteur Saïd Sadi est révélateur du fait que les autorités n'excluent pas que son initiative fasse descendre dans la rue beaucoup de monde. Elles ont cherché à dissuader les citoyens d'y prendre part en mettant en avant d'éventuels risques «de provocation» pouvant se produire dans la manifestation interdite. Le RCD a lui aussi avisé l'opinion publique que des relais du pouvoir ont soudoyé des personnes pour perturber et faire dégénérer la manifestation de son caractère pacifique. Mais la menace ne l'a pas pour autant fait renoncer à aller au bout de l'opération projetée. D'autant qu'il semble avoir eu la certitude que son appel a eu une résonance positive dont l'ampleur dépasse le cadre du pan de sympathisants dont il dispose dans la société. Un impact qui a dû ancrer Saïd Sadi et la direction de son parti dans la conviction qu'une reculade ne leur est pas permise au motif que la marche a été interdite par les autorités. Il y aura donc inévitablement confrontation aujourd'hui à Alger et ailleurs peut-être, entre un pouvoir déterminé à empêcher que se produise un précédent dont le succès créerait une brèche incolmatable dans le verrouillage mis à l'exercice par ses opposants de l'expression politique et des manifestants décidés à le faire reculer. Les Algériens ont conscience que le bras de fer annoncé peut conduire à de graves incidents, mais ne désapprouvent pas l'initiative du RCD. Le comportement autiste du pouvoir alors que le pays est balayé par un vent de contestation et de revendications sociopolitiques les exacerbe et son autoritarisme méprisant les révolte. La désobéissance civile prônée par la formation de Saïd Sadi leur apparaît alors en tant qu'ultime recours pour lui faire entendre la voix populaire. L'unanimité est faite au sein de l'opposition réelle au système et à son pouvoir que les changements auxquels le peuple aspire ne viendront jamais de l'intérieur de celui-ci. Ses segments ne peuvent de ce fait désapprouver un parti qui a opté pour mobiliser les citoyens à exprimer pacifiquement leur volonté de voir ces changements se produire. Sauf à renforcer l'opinion publique dans sa conviction que l'opposition dans le pays se résume à des cercles salonnads faisant et défaisant les perspectives politiques dans le pays, mais se refusant à défier l'autoritarisme du pouvoir. Tant que ce comportement sera celui de l'opposition, le pouvoir ne s'estimera nullement contraint à répondre à ses revendications. Le RCD a le mérite d'avoir compris cela et le courage de vouloir exprimer son opposition au système et pouvoir en place autrement que par des déclarations rageuses. Qui peut lui en faire le reproche sachant le degré de discrédit atteint au sein de l'opinion publique par l'opposition à cause de sa léthargie et son refus de s'assumer ?