La hantise des responsables de la sécurité intérieure demeure l'introduction dans la capitale d'une cellule terroriste opérationnelle. Un renforcement du dispositif sécuritaire est observé dans la capitale depuis quatre jours, avec, notamment des policiers déployés dans les axes urbains, les marchés hebdomadaires et les arrêts de bus, et qui arrêtent automatiquement toute personne suspecte lui exigeant de présenter ses papiers d'identité. Ce renforcement de la sécurité qui intervient au lendemain du double attentat à la voiture piégée aux portes d'Alger est destiné à prévenir toute nouvelle attaque, laquelle consacrerait alors un retour en force des groupes armés et signifierait un recul de la formule gagnante-depuis deux années- de «zéro mort à Alger». Au moins trois civils, dont une femme, ont été tués et 30 autres ont été légèrement blessés dans l'explosion de deux véhicules piégés dans la nuit de dimanche à lundi à Reghaïa et Dergana. La première explosion s'est produite vers 23h55 à proximité du siège de la sûreté urbaine de Reghaïa, suivie, dix minutes plus tard, d'une deuxième déflagration «derrière les sièges de la sûreté urbaine et de la Brigade mobile de police judiciaire de Dergana», a précisé un communiqué de la Direction générale de la Sûreté nationale. Dans une première réaction officielle, le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a estimé, mardi, que le terrorisme imputé diminuait mais que la violence liée à la criminalité augmentait. «Le terrorisme est en diminution mais la violence augmente et change de nature. Nous voyons l'apparition de crimes inconnus jusque-là en Algérie comme les enlèvements avec demande de rançon, les vols de téléphones portables, la contrefaçon de monnaie et de documents administratifs, le trafic de drogue». Il a annoncé une augmentation des effectifs de la police et de la gendarmerie pour faire face à cette augmentation de la criminalité, précisant que son gouvernement étudiait l'éventualité de la création d'une «police de proximité» pour rassurer les Algériens et l'établissement de documents «infalsifiables». Belkhadem s'est, en outre, déclaré satisfait des résultats de la politique de réconciliation nationale menée par le président Abdelaziz Bouteflika pour mettre fin à la violence. Le bilan est «satisfaisant malgré le fait qu'il y ait de temps à autre un attentat à la bombe ou un assassinat», a estimé Belkhadem, dans une allusion au double attentat à la bombe ayant visé, lundi, deux commissariats de la banlieue est d'Alger, précisant que «la situation sécuritaire s'est améliorée et la politique de réconciliation nationale a fait beaucoup diminuer la violence», et que «chaque arme équivaut à moins de nuisances pour les citoyens». La veille, le ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, estimait que le nombre d'individus armés a baissé d'«environ 750 à 800, entre prisonniers, tués et repentis» depuis le référendum sur la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, en septembre 2005. «Depuis septembre 2005 jusqu'à aujourd'hui, le nombre de personnes qu'ils (les groupes armés) ont perdues entre prisonniers, tués et repentis est d'environ 750 à 800, et cela se voit. C'est une perte énorme pour eux.» Il s'exprimait en marge de la cérémonie de présentation de voeux à l'occasion du 1er Novembre au président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika, tenue au Palais du peuple à Alger et répondait à une question relative au double attentat du Gspc. Concédant que «le bilan de la Charte peut paraître maigre», il affirmait que «comparativement au nombre total des individus armés en activité actuellement, cela représente de 70% à 80% en moins». Donc, si l'on se base sur cette évaluation des effectifs terroristes, ils seraient aujourd'hui quelque 200 terroristes encore opérationnels, ce qui est, en soi, déjà énorme. Mais «il s'agit là d'estimations», a précisé le ministre. «L'élément de référence essentiel est la comparaison du nombre actuel d'attentats et d'actes par rapport à l'année passée. On constate qu'il y a une chute importante.La situation s'est atténuée. Si on se base sur les statistiques depuis le référendum sur la Charte sur la paix et la réconciliation nationale en septembre 2005, le nombre d'actes a considérablement diminué. Mais, il y a encore des groupes qui sont récalcitrants à l'offre de paix», a-t-il poursuivi. La bombe qui avait explosé à Beaulieu pendant le mois de Ramadhan avait déjà mis en état d'alerte les services de sécurité. En ciblant une caserne militaire dans la capitale même, les messages qui ont été décryptés par les responsables de la sécurité intérieure les ont poussés à donner des directives claires aux polices locales: plus de vigilance, renforcement des effectifs et investigations dans les zones d'influence des groupes armés. Ainsi, nous avons assisté à un renforcement très manifeste du dispositif sécuritaire dans et autour de la capitale, et qui n'était pas uniquement lié à la sécurisation des biens et des personnes pendant le mois sacré de Ramadhan. Selon un haut responsable de la Dgsn, «le fait qu'il y ait des actions autour de la capitale, nous pousse à prévoir, à envisager que le maillage sécuritaire sera tôt ou tard transpercé, et donc, à agir en conséquence». Le problème principal qui perturbe les forces de sécurité est que le groupe salafiste, contrairement au GIA, procède dans les villes avec des éléments non fichés, non répertoriés, donc inconnus des services de sécurité. Avec l'argent dont il dispose, le Gspc fait actionner des cellules «présentes sur place» ou «au contrat». L'opération accomplie, l'élément s'éloigne de toute activité et rejoint des occupations ordinaires. Ce qui rend toute anticipation des forces de sécurité sur des actions terroristes, aléatoire.