«Un Etat qui n'a pas les moyens d'effectuer les changements n'a pas les moyens de se maintenir» Edmund Burke (1729-1797) Il n'est plus besoin ni de mille descriptions, ni de mille dessins, ni de mille caricatures ni encore moins de mille arguments ou démonstrations pour prouver que l'Algérie d'aujourd'hui est malade. Elle souffre de sa justice étouffée, de ses hôpitaux délabrés, de ses universités téléguidées, de sa jeunesse perdue, de ses incohérences, de son économie rentière qui, au lieu de produire ne fait que consommer, de ses intellectuels qui sont tenus à l'écart ou la quittent, de ses compétences marginalisées, de ses institutions fantômes dont les représentants n'apparaissent qu'au moment des échéances électorales. Elle souffre l'Algérie, elle souffre. Le citoyen lambda se plaint de la cherté de la vie, du manque d'emploi, de perspectives tronquées, de la gabegie administrative, de la pieuvre de la corruption, de la peste bureaucratique, de la nonchalance de ses responsables politiques à tous les niveaux. C'est pourquoi le changement est plus que nécessaire et s'impose de lui-même. Mais entre ceux qui préconisent un changement révolutionnaire, contexte régional oblige, et ceux qui tablent sur un changement pacifique qui épargne à l'Algérie une autre tragédie de larmes et de sang, les visions sont différentes et l'actualité est vue et décortiquée diversement et évolue à géométrie variable. 1- Qu'est-ce que le changement: Le changement n'est pas un luxe inutile. C'est une dynamique sociale inhérente à la structuration des sociétés modernes. En effet, nulle société ne saurait être à la périphérie des troubles, à l'abri des remous et à la lisière des vagues de protestations. L'enfantement de la démocratie passe inéluctablement par le changement. Celui-ci est un facteur aussi bien essentiel que constitutif de son ossature, constructif que structurant de son architecture et non plus une donnée accessoire, additive et dérivative. Encore faut-il insister en premier ressort sur le fait que le changement est une construction savante, un langage structuré et structurant et un feu d'artifice composite sans lesquels la société algérienne risquerait de se muer en vase clos sans fond et dénuée de sens civique. En un mot, elle serait en dégénérescence morbide et incarnerait le rôle d'un simple reliquat sans rôle ou d'un rebut de l'évolution. Mais il convient de rappeler au passage, comme l'a judicieusement noté l'hebdomadaire Jeune Afrique que «l'aspiration au changement aussi importante en Algérie qu'ailleurs dans le monde arabe, vise un système mis en place depuis l'indépendance et non seulement le seul chef de l'Etat, qui est loin de susciter la même aversion que ses pairs » (1) . Cela dit, l'Algérie est un cas exceptionnel qui a besoin de solutions exceptionnelles qui ne sortent pas du cadre de la complexité de sa crise. Aussi loin que l'on puisse remonter dans le temps, la rue algérienne a manifesté plus qu'une fois son désir de changer, au printemps 80, aux événements de 88, dans la crise des années 90. Notre pays est une pépinière en jachère qui nécessite des mains qui la labourent et des mentalités qui la sèment des vertus de la démocratie. 2-Le civisme et la citoyenneté socles du changement Le concept du changement est sans doute indissociable de celui du civisme, l'un et l'autre cohabitent et s'imbriquent mutuellement car ils forment ensemble un couple inséparable. Pour se dépoussiérer de l'inertie qui imprègne les mentalités, la société doit cultiver et entretenir en son sein une culture civique faisant du citoyen un acteur social, ouvert et perfectible et en même temps semer dans ses structures les graines d'une force de gravitation qui agit vers le haut. La modernité exige un travail de réflexion, d'analyse, et de prospection en profondeur et dans les profondeurs des soubassements de la société. Cela dit, la conscience et le civisme sont des prérequis historiques pour accéder à la citoyenneté authentique «l'homme moderne est aussi citoyen, c'est-à-dire sujet politique qui s'implique, par différentes formes de participation de la vie de la Cité. Son rapport à l'autorité politique est un rapport contractuel, constamment révisé par des consultations telles élections et référendum »(2). Mais, indépendamment de la participation politique du citoyen, le changement est-il un langage stéréotypé, non codifié, non formaté par le pouvoir de la culture et qui de surcroît ne s'exprime que par les voies légales et légitimantes? La réponse à cette question requiert une analyse approfondie de chaque perception, de chaque pensée, de chaque mouvement qui découlent d'un changement social quelconque. A ce propos, il conviendrait de mettre en évidence le rôle de la société de la connaissance dans la mise en branle du train du changement. Autrement dit, le rôle de l'intellectuel organique au sens gramscien du terme dans l'éclosion du foetus de la métamorphose sociétale. Il n'empêche que, dans la foulée, les autres vecteurs sociaux ( syndicats autonomes, mouvements ouvriers, intelligentsia urbaine) le rejoignent et suivent son rythme dans son entreprise de refondation de l'armature sociale, celle qu'on pourrait appeler dans le jargon sociologique moderne « la restructuration de la société ». A l'évidence, une société sans structures est pareille à un corps inerte et sans membres; un squelette rachitique incapable d'agir et de bouger. Il ne faut pas croire que le progrès va advenir uniquement parce que le temps passe, ce n'est pas le temps en soi qui fait bouger et changer les choses, c'est l'histoire, l'expérience, l'apprentissage du civisme, bref l'esprit de découverte des vertus de la démocratie « nous cherchons pas dans les nuages les vertus sublimes à la démocratie, mais dans la réalité: la démarche c'est l'acceptation de la concurrence pacifique [.... ] il n'y a pas de démocratie que lorsque les individus, les groupes, les classes sociales acceptent les règles de la concurrence et acceptent que cette concurrence soit pacifique»(3). Dans cet ordre d'idées, il est à signaler que c'est une erreur fatale et gravissime de s'en tenir au seul facteur: temps. Certes, il est capital et d'une extrême importance, mais il ne saurait à lui seul faire le travail de remise en état du « Bildung» social dans sa globalité. En ce sens, la société de la connaissance ne doit pas se leurrer par le confort d'une vie végétative, consumériste, et factice sans lien direct avec le vécu de l'Algérie des profondeurs, au contraire la tâche d'implication et d'immixtion dans la vie civique et réelle lui appartient de facto. Bacon dirait à son époque « savoir pour pouvoir et pouvoir pour prévoir » et l'on pourrait y rajouter que prévoir c'est promouvoir. Dans cet esprit novateur, le changement doit s'accompagner de conscience tout en s'opérant dans et avec les idées pour s'accrocher par la suite au vécu quotidien de la société afin de pouvoir enfin se matérialiser dans les actes de chacun et dans l'esprit de tous. A cet effet, ne peuvent transiter par les pores du civisme que les principes de la solidarité structurelle entre les composantes vives de la société et non plus les bribes rudimentaires d'une culture d'alliance conjoncturelle, et de circonstance, « la modernité écrivait Tourain dans son ouvrage « critique de la modernité » c'est le triomphe de la raison ». Aussi conviendrait-il de préciser que le sens civique n'est pas seulement la conscience politique mais également l'inventivité, la créativité, l'innovation, le génie des masses, la méritocratie, le culte de la science, la sublimation des arts, l'édification nationale et surtout l'esprit patriotique car la force de proposition des élites est corollaire de la connaissance et le changement ne doit aucunement être interprété comme une simple comptine enfantine ou un slogan creux, le changement est surtout la capacité de la société à formuler une revendication politique valable et la faculté du régime politique à édifier une stratégie économique efficace, construire un projet de société structuré, fomenter un débat culturel alternatif, mettre sur rails une charte idéologique cohérente, et mener un débat contradictoire vidé de langue de bois. En gros, le changement est l'adoption et l'adaptation de constructions sociales nouvelles et novatrices, il n'est pas une greffe formelle ou une réforme esthétique mais un élan radical et patriotique d'envergure. Sans l'ombre d'un doute, le militantisme, le don de soi, l'engagement sont entre autres des données requises et des qualités sociales appréciables dans ce processus de fécondation in-vivo du changement, elles sont plus importantes que la force brute dans la mesure où elles ont un effet analgésique avéré sur l'épanouissement de l'intérieur des forces qui convergent vers le progrès. De plus, le changement ne s'agit pas de frapper fort mais de penser juste, là où il faut le faire et quand il faut le faire. Une élite bien structurée, bien informée, jalouse de l'intérêt de son pays et fortement consciente saura détecter les anomalies, dépister les pathologies, signaler les dérapages et les mauvaises passes de sa société en s'auto-instituant comme ultime garante et principale locomotive du train du changement. A ce niveau d'analyse, il serait pertinent de préciser que la tâche de réanimer la société, celle de la faire sortir de son hypnose, celle de lui prodiguer les soins nécessaires lui incomberait nécessairement. Une société de connaissance est une société de puissance, une société d'alternatives, une société-refuge, une société-espoir et une société-adjuvant des masses, qui valorise la science, se valorise elle-même en tant que source du savoir et valorise la société dans sa totalité en tant que protectrice, sanctuaire et dispensatrice aussi bien de sa connaissance que de son inspiration. En somme, elle deviendra à force d'engagement une société immunisante et progressiste qui ne se perd guère dans le goulot étroit des abstractions de pratiques théorisées mais bien au contraire érige en pratiques bénéfiques les théories apprises où la société des masses apparaît en tant que son laboratoire fructifère d'expériences. C'est une évidence, rien n'est constant si ce n'est le changement, il est la permanence et la sève nourricière de l'histoire, son rituel et son sacerdoce inébranlables car à une époque ou à une autre de leur vie, les sociétés humaines seraient sujettes aux divers blocages ( bureaucratique, administratif, social), en proie aux vertiges identitaires, aux problèmes démographiques, aux guérillas urbaines, aux conflits ethniques, aux dysfonctionnements sclérosants des pouvoirs politiques tout autant qu'aux multiples pannes de la machine étatique et c'est là, dans ce point précis que se réalisent les scissions fondatrices et les ruptures canalisatrices du changement et c'est là également qu'émerge la figure de l'intellectuel organique, du chef visionnaire, d'acteurs sociaux vigilants et de responsables intègres qui se frayent un chemin vers la modernité. A ce propos, A. Charfi écrit « je crois que ce qui distingue les sociétés modernes des sociétés dites traditionnelles, c'est la capacité d'invention qui caractérisent les premières d'une part, et la possibilité qu'elles ont de favoriser un climat propice à l'accumulation de la connaissance, accumulation qui rend possible leur développement d'autre part»(4). Il est éminemment important de rappeler à juste titre que les sociétés sous-développées sont traditionalistes par essence et répétitives par vocation, des sociétés où les schémas de pensée évoluée peinent à se formaliser et à se construire en un discours véhiculaire de sens faute d'un véritable enracinement dans la modernité. C'est pourquoi elles ont besoin d'une restructuration de fond en comble de la part de la société de la connaissance. 3- Le changement vecteur de progrès Il est certain que le changement par les idées et le changement par la force sont deux voies différentes quoique également efficaces. Encore serait-il pertinent de faire la différence entre la force de l'idée et l'idée de la force. Quand une société est en péril, elle doit avoir recours à une exégèse de dynamique décomplexée autrement dit un bagage culturel facile et malléable qu'elle puiserait du vivier intellectuel de son élite. Or il se trouve que les élites dans notre pays ont prêté le flanc à la paresse et à la soumission et ne sont pas en mesure de répondre aux attentes de la base. A vrai dire, c'est un problème crucial et insoluble parce que la courroie de transmission est coupée. Il est cependant indéniable que l'éveil de la conscience s'appuie généralement sur une modernité dans les idées et une révolution dans la pensée . A ce propos, le rôle de l'intellectuel visionnaire, organique, et critique pour reprendre la terminologie bourdieusienne, ce genre d'intellectuel problématique et du soupçon doit inévitablement être mis en perspective car la force est tributaire de la connaissance. C'est à travers le prisme du savoir qu'on pourrait tâter les pouls de la société, ausculter les spasmes de la rue, jauger l'étendue du mal, et juger de la qualité des remèdes à prodiguer. Car c'est en fouinant dans les replis cachés de son cosmos que l'élite parviendrait à retrouver sa vitalité, son dynamisme, sa vie tout court. La connaissance implique une intelligence émotionnelle, intuitive, et physiologique qui cadrent avec le magma sociétal bouillonnant et vivant. En ce sens, les ressentis subjectifs de la société trouveraient leur voie à la normalisation objective opérée par les élites où le travail de théorisation pratique rimerait avec la restructuration de sa base. Dans les sociétés frappées d'anomie, de sclérose maladive et durement défracturées par des déstructurations anarchisantes, les masses perdent facilement confiance en l'Etat et lâchent leur souffle de résistance. C'est pourquoi, une entreprise d'envergure de ratissage des données, de diagnostic approfondi des phénomènes sociaux, leur traitement, et leur analyse objective pour pouvoir déboucher sur un résultat palpable de nature à mettre en oeuvre une conscience sociale épanouie et évolutive semble être de bon sens en ces moments très critiques de la vie de l'Algérie. Afin de conduire le combat de la démocratie jusqu'au terminus, il faut d'emblée oeuvrer pour la revitalisation d'une société civile dévitalisée, calibrer les ambitions du changement pacifique en fonction des capacités de mobilisation des masses, revaloriser « le patrimoine national de la douleur » pour reprendre le mot de Sophie Bessis, que la société algérienne dans son ensemble a intériorisé au plus profond de son âme afin de le transformer en réservoir national de la résistance. Car une élite qui ne se pencherait pas sur le malheur de son peuple, n'essaierait pas de cicatriser les blessures de sa société génitrice et ne ferait pas l'effort d'aller à sa rencontre raterait sans aucun doute un rendez-vous avec l'histoire sans pour autant apporter sa contribution décisive dans la construction des piliers de l'Etat. Certes, mettre sur l'orbite du progrès la société du changement nécessiterait des sacrifices grandioses, des luttes continuelles, et des défis immenses mais aussi un self-control gigantesque de la part de l'élite qui serait une muraille de Chine contre le gaspillage de son énergie motrice au travers des débats passionnés et pleins de verve et déchaînements de ferveur non balisés. Néanmoins, la mesure et la prudence sont toujours de mise, les brouillages, les cafouillages, les hésitations de toutes sortes devraient être mis sous le boisseau de la clarté et de la transparence. La hauteur dans la vision et le progrès dans les idées sont les seuls parents géniteurs de la mue sociale. Il est hors de propos que dans le temps actuel, le changement s'avère être une obligation morale et sociale incontournable pour l'Algérie. De par leur passé, les nations européennes, actuellement vieilles démocraties ont expérimenté les mêmes étapes historiques, les mêmes luttes, les mêmes combats pour atteindre le progrès. L'exigence de transgresser les obstacles, tabous et embûches de toute nature qui réfrènent la cadence naturelle de l'évolution des choses a poussé de larges franges de la société à revendiquer le renouveau « le changement est le principe explicatif du progrès de l'occident. Quiconque jette un coup d'oeil sur l'histoire européenne constate qu'en l'espace de cent ans, les occidentaux ont tout changé: leur gouvernement, leur langue, leur connaissance , leurs arts, leurs lois, leurs habits et leurs coutumes. Mieux encore, toutes ces choses sont susceptibles de transformation dans l'avenir »(5). Ce parallélisme et cette comparaison avec l'Occident ne devraient en aucune manière être pris ou compris comme quoi l'Occident est le seul pourvoyeur de modernité ou de civilisation. Au contraire, le but de la comparaison est de dégager les contradictions et les disparités, pouvoir en étudier l'impact et en expliquer les incidences sur le vécu de nos structures sociales et y proposer des remèdes adéquats car c'est en comparant entre les sociétés qu'on pourrait déboucher sur le modèle que l'on va imprimer à la marche ascensionnelle de la nôtre, c'est cela la physique sociale dont parle Auguste Comte( 1798-1857), une technologie sociétale où l'élite serait dotée d'un esprit de synthèse novateur, d'une capacité analytique de dissection de problèmes et de projection dans l'avenir et les masses pourvues d'un sens de discernement et de perspicacité, un environnement social où l'intellectuel serait l'édificateur et la cheville ouvrière d'un nouveau panorama politique et d'une nouvelle Cité-Etat florissante « le constructeur social ( social engineer) dirait Karl Popper ne s'interroge pas sur les courants de l'histoire ni sur la destinée humaine. Pour lui, l'homme est maître de son destin, il peut agir sur lui, voire le changer, comme il a changé la face de la terre. Il ne croit pas que notre sort nous soit imposé par notre passé ou par les vicissitudes de l'histoire, mais, au contraire, qu'il est façonné par nous, comme les idées; les oeuvres d'art ou les outils nouveaux »(6) . Un tel constat est par surcroît, une vision globalisante d'ensemble car quoique l'on en pense, la modernité est avant tout un acte fondateur de « volontarisme », elle n'est guère une tranche chronologique précise ni un moment historique déterminé dans la vie des nations mais bien au contraire une transformation continuelle et une attitude progressiste et revendicative du renouveau. A franchement parler, il n'y aucun modèle ni prototype universel de démocratie à calquer, les expériences historiques en la matière en sont légion et il semble que la modernité en nos ères se ramène à deux facteurs fort essentiels: la valorisation de la science et de la recherche scientifique et l'encouragement de la cybernétique. 4- L'éducation: une stratégie du changement Ce qui saute aux yeux ces dernières années, c'est le fait que la société algérienne subit une phase réfractaire sans précédent au changement d'autant plus qu'elle est sujette à une inertie structurelle et à une paralysie culturelle très graves qui sont dues à deux raisons primordiales. D'une part, les effets lointains dans le temps mais proches dans l'inconscient collectif des masses du colonialisme qui les a déculturé , déraciné et défracturé. D'autre part, le brouillard des idéologies diverses et de sempiternels tiraillements entre les adeptes de l'Orient et les acharnés de l'Occident au lendemain de l'indépendance a transformé la société en une arène de joutes sans bénéfice et l'a malheureusement rendu asynchrone, frileuse, et fragilisée. Le secteur de l'éducation en a encaissé les grands coups en raison de l'impact direct de ce manichéisme ravageur. La faiblesse des performances de l'école et la banalisation des programmes qui y sont dispensés ont été aggravées par l'océan de médiocrité qui la noie dans l'imitation et le mimétisme. C'est pourquoi, il est, de nos jours, un devoir urgent d'inculquer à notre école un souffle de modernité générateur d'un mouvement de progrès fondateur. C'est un constat encourageant et incitateur quoique amer. Et pourtant, le contexte socio-historique s'y prête à merveille et les compétences nationales existent. A mon avis, l'école est la seule institution-sanctuaire du changement et l'unique rempart contre l'ignorance, la gabegie et la myopie sociale. En somme, l'on pourrait dire que ni la rente pétrolière, ni l'institution militaire, ni les partis politiques, ni la société en général ne seraient en mesure de provoquer le changement sans le soutien actif d'une école efficace et d'une éducation performante. En un mot, l'école est la rente viagère de l'Algérie des lumières du troisième millénaire où l'éducation de l'humain serait aussi bien une priorité qu'un gage de sûreté contre l'inanité sociale. En plus, une éducation désidéologisée, moderne, et ouverte briserait les infracassables lignes de crête du tribalisme, régionalisme, et arrivisme qui sont le ferment de la dégradation et de la désunion de notre patrie et serait une propédeutique efficiente pour faire régner la paix civile. Ce faisant, une école performante où la pédagogie de la compréhension créerait une société originelle et originale. D'où il découle une mosaïque humaine baignée dans une algérianité chaleureuse. C'est à ce niveau de perfectionnement que l'école serait un véritable levier social du changement et une pépinière de foisonnement d'idées où l'entente joyeuse l'emporte sur les négations destructrices et exclusives érigées actuellement en idéologie, une école où l'apprentissage des différences permettrait un enseignement de qualité de nature à éviter à la société des régressions collectives vers l'instinct tribaliste , une école où la tolérance incarnerait les mille et une facettes de la diversité algérienne en dehors de toutes les contradictions dans le kaléidoscope d'une Algérie une et indivisible. Notes: 1- Cherif Ouzani, Jeune Afrique, n° 2615, 20-26 février 2011 2-Ahmed Chabchoub, école et modernité dans la Tunisie et dans les pays arabes, Editions Harmattan, 2000. 3- Raymond Aron, introduction à la philosophie politique: démocratie et révolution, librairie générale française, 1997, p 51 4. Charfi, Islam et modernité, Tunis, M.T .E, 1991, p26 (en arabe) 5- Amin Kacem, la libération de la femme, le Caire, p.16 ( en arabe) 6-Karl Popper, la société ouverte et ses ennemis Tome I, l'ascendant de Platon, traduit de l'anglais par Jacqueline Bernard et Phillipe Monod, Editions le Seuil, 1979, p27.