Le procès Sonatrach/Safir SPA, impliquant l'ex-n°2 de la compagnie pétrolière nationale et ex-PDG de sa filiale «Aval», Feghouli Adbelhafid, a été reporté au 27 avril. Motif du renvoi: l'absence de témoins, au nombre de sept. Les avocats de la défense n'ont pas fait grise mine à cette décision, puisque c'était eux-mêmes qui en avaient fait la demande. Rendez-vous donc dans 15 jours dans le même prétoire du Pôle pénal spécialisé d'Oran. Entre-temps, le parquet se chargera de convoquer par voie d'huissier des personnes citées comme témoins. 9 heures. La salle d'audience se remplit progressivement. On peut relever au premier coup d'œil la bonne organisation. Aucun détail n'a été omis. Des affiches placardées sur les bancs, à portée de vue dès le seuil de la porte, aiguillent avocats, public, journalistes, auxiliaires de justice vers leurs places réservées. Bref, question décor, tout est bien. Soudain, les policiers d'audience redoublent de vigilance et se mirent à communiquer par le langage des signes. C'est le moment de faire entrer les accusés. M. Feghouli, ancien vice-président de Sonatrach-Aval et PDG par intérim du groupe Sonatrach, Henni Mekki, ex-directeur des études et du développement de l'activité Aval, M. Nechnech, ex-DG de Safir SPA, et M. Benamar, cadre à la retraite, entrent par une porte latérale. Le tribunal s'installe. A la chaire de présidence, la juge, Mme Gharbi. Les quatre accusés détenus sont appelés à la barre. Leur cinquième co-prévenu, l'ancien PDG du groupe Sonatrach Meziane Mohamed, en liberté sous contrôle judiciaire, les rejoint au pied de la tribune. Des neuf témoins cités, des cadres de Sonatrach et de Safir SPA, société algéro-française d'engineering et de réalisation, pour la plupart, seuls deux répondent présent. De quoi donner un motif de report aux avocats de la défense. La présidente accepte séance tenante. Maître Brahimi Miloud en profite pour solliciter la remise en liberté de son client Henni Mekki, mettant en avant l'article 123 du code de procédure pénale. Selon lui, ce prévenu présente toutes les garanties d'être à la disposition de la justice à tout moment. «C'est un cadre algérien, père de famille, qui possède un domicile fixe, entre autres». «La preuve, ajoute l'avocat, Meziane (sous contrôle judiciaire pour deux affaires, à Alger et à Oran) est là aujourd'hui». Tour à tour, les avocats des autres prévenus incarcérés depuis fin décembre 2010 tentent leur chance en sollicitant la remise en liberté de leurs mandants respectifs, quoiqu'ils sachent pertinemment que pareille demande a trop peu de chance d'aboutir. «Mais je le demande quand même, par confiance en la justice et par devoir et acquit de conscience professionnelle aussi», nous répondra Me Brahimi Miloud en remettant soigneusement ses copies dans le cartable. Il est vrai que c'est une très lourde responsabilité pour un juge, n'importe quel juge, que de remettre en liberté des accusés incarcérés depuis près de quatre mois, à un intervalle de 15 jours du procès. «Demande rejetée pour tous les concernés», lâche d'un ton neutre la présidente, sans avoir eu à lever l'audience pour délibérer là-dessus. Feghouli, la mine pâle, le regard errant, et ses trois coaccusés reviennent d'où ils sont venus, la geôle du tribunal ex-Benzerdjeb, et de là ensuite vers la maison d'arrêt de M'dina Jdida. Seul Meziane Mohamed, astreint à un double contrôle judiciaire pour cette affaire et celle d'Alger, en janvier 2010, où l'état-major du groupe pétrolier avait été littéralement décapité, pouvait emprunter l'accès libre du tribunal, s'éclipsant dans la foule. M. Feghouli, l'ex-vice-président du groupe Sonatrach, qui avait occupé transitoirement le poste du PDG du groupe par intérim suite à l'inculpation de Mohamed Meziane en janvier 2010, au niveau de la cour d'Alger, et qui cumulait jusque-là les deux fonctions de PDG de Sonatrach-Aval et Tassili Airlines, avait été placé sous mandat de dépôt, le 20 décembre 2010, en compagnie de Henni Mekki, directeur des études et du développement de l'activité Aval, M. Nechnech, DG de Safir SPA, et M. Benamar, cadre à la retraite, et ce, sur ordre du juge d'instruction près la 2ème chambre du tribunal d'Arzew, dans le cadre d'une enquête sur une série de transactions douteuses, entre 2007 et 2008, diligentée par les services de la DRS. Au cœur de cette affaire, c'est encore une fois le fameux mode du «gré à gré», comme mode en raccourci qu'offrait la circulaire A 408 R-15, avec à la clé le motif d'urgence pour passer outre le code des marchés publics.