Il a refusé de faire ses papiers d'ancien moujahid. Pourtant, lui Otchimine, comme son épouse Dhaouia, était très actif pendant les années de guerre contre le colonialisme. Ils ne veulent même pas en parler. Et quand le sujet s'invite dans une discussion, ils préfèrent dire « on a fait notre devoir d'Algériens, notre seul but était de voir les enfants libres dans un pays indépendant ». Il a travaillé comme veilleur de nuit dans une société nationale, jusqu'à sa retraite. Il a sa pension comme chaque ancien trimeur. Oui 14.000 dinars par mois. C'est pas rien. «C'est plus, dit-il chaque fois en rigolant, c'est trois fois rien.» Ce qui fait qu'une fois retraité il s'est transformé en veilleur de jour, pour attendre les liquidités qui ne sont presque jamais disponibles au bureau de poste le jour où il doit percevoir « latrite » et veilleur de nuit car tenu éveillé par l'arthrite qui le ronge. Il fait du cumul le Otchimine sans fiche de paix. Son épouse, qu'il refuse d'appeler «ma femme» ne peut plus lui donner un coup de main car abîmée par tous les petits travaux qu'elle prenait à domicile. Tantôt elle était machine à laver, tantôt machine à rouler le couscous, tantôt transformant ses deux pièces en crèche. Le Otchimine ne se plaint jamais. Mais il refuse d'accepter que le Smig, prenne l'allure d'une revendication sociale. C'est une nécessité elle est vitale yal khaoua, qu'il dit à ses compagnons de fortune. Elle doit être systématiquement recalculée et revue à la hausse dès que les chiffres de l'inflation sont à la hausse. On nous la présente comme un cadeau, un service qu'on rend aux crève-la faim, depuis le début. Les patrons de l'Algérie, c'est-à-dire les syndicats devenus syndicats par on ne sait quel casting, le gouvernements et n'est pas au gouvernement qui veut, les patrons privés grâce à l'argent public, ceux-là mêmes qui décident de l'augmentation des prix et prestations, ceux-là décideront après, de l'augmentation du salaire minimum, cela s'appelle du tmaskhir Je ne connais pas la racine de ce mot, mais sûrement que pour une racine elle doit s'alimenter dans les eaux usées d'une langue morte, tuée par le ridicule.