Dans la nouvelle Libye, une tâche immense attend les vainqueurs. Il faut d'abord, comme le reconnaît le chef du CNT Mustapha Abdeldjalil, passer par la phase de réconciliation, ensuite reconstruire le pays. Entre les deux travaux, il s'agit surtout, selon des observateurs, de pacifier le pays en désarmant des milliers de personnes et surtout de faire estomper les signes inquiétants d'une implosion au sein du groupe dirigeant. Car la proclamation du N°1 du CNT de l'instauration de la Charia en Libye n'a pas fait des vagues qu'en Occident, notamment au sein des pays amis de la Libye, la France et les Etats-Unis, au premier plan. Parmi les Libyens, il y a également des voix qui montent pour refuser une telle tournure donnée à la révolution, et particulièrement des personnalités bien en vue au sein du CNT. Othmane Bensassi, représentant la ville de Zouara au sein du CNT, a été clair à ce sujet et a même averti contre une montée en puissance des islamistes qui viendraient en quelque sorte 'chiper'' les fruits de la révolte des Libyens contre le régime de Kadhafi, sinon la détourner vers des rivages inquiétants. C'est à peu près la même opinion d'un grand nombre de Libyens qui ne veulent pas que cette révolution soit détournée et, surtout, ne profite qu'à une partie des 'libérateurs'' qui, eux, confisqueront le martyre de milliers de Libyens. Un débat qui est en train de faire son petit bonhomme de chemin au sein des différentes tendances du CNT, lui-même constitué de chefs de villages appartenant à des tribus constituant le terreau clanique et tribal de la Libye. Un vaste chantier qui attend ainsi les nouvelles autorités libyennes, qui doivent en même temps préparer le terrain pour la mise en place d'institutions démocratiques et, dans l'immédiat, installer un gouvernement intérimaire pour remettre le pays sur pied. Une autre tâche qui nécessite l'appui des pays occidentaux qui ont mené la bataille dans les airs et par les airs contre les troupes de Kadhafi. Les dirigeants du CNT, qui ont demandé à l'OTAN de reporter la fin de sa mission en Libye, savent parfaitement que le pays a besoin d'appuis, de soutien et d'être orienté dans cette phase cruciale. La démilitarisation des 'combattants'' est en fait une tâche difficile, et la présence des troupes 'au sol'' des experts militaires de l'OTAN ne sera pas de trop face à la circulation d'armes de guerre dans un pays où l'ordre et la sécurité sont à rétablir, au plus. C'est en fait là le grand message de Ali Tarhouni, chef du Conseil suprême de sécurité formé en septembre, à l'OTAN, lorsqu'il a souhaité que l'alliance retarde d'un mois son départ. Les chantiers sont immenses, et les Libyens manquent de tout pour le moment, même si les milliards de dollars gelés par les banques étrangères vont commencer à couler sous forme d'aliments, de nourriture, d'équipements et de matériels pour la reconstruction du pays. Alors que sur le plan de la réorganisation politique, d'autres chantiers restent à ouvrir pour l'émergence d'un pouvoir démocratique, loin d'un pouvoir théocratique que craignent certains pays occidentaux.