Arguant du fait que le régime syrien ne respecte pas les clauses du plan de la Ligue arabe de sortie de crise auquel il a pourtant solennellement souscrit, des courants de l'opposition à ce régime, fortement relayés à l'étranger, plus précisément en Occident, réclament une intervention internationale en la présentant comme devenue l'ultime recours pour mettre fin à la barbare répression que l'armée et les forces sécuritaires fidèles à Bachar Al-Assad continuent d'exercer contre les manifestants anti-régime. Il est vrai qu'une intervention internationale autrement plus dissuasive que celle tentée par la voie diplomatique par la Ligue arabe est plus que nécessaire pour contraindre le Président syrien et son régime à mettre fin à sa sanglante répression. Mais ce n'est pas faire le jeu du régime de Damas de se montrer opposé à une intervention internationale du genre de celle que l'Occident a menée contre le régime d'El-Kadhadi en Libye et dont le monde a percé les sordides calculs qui en ont été à l'origine et découvre, atterré, les énormes dégâts humains et matériels qui en ont résulté. Oui, la communauté internationale ne peut laisser se poursuivre les tueries dont est coupable le régime syrien, mais elle doit aussi se garder de délivrer un « blanc-seing » aux mêmes acteurs qui l'ont roulée dans la farine dans le cas de la Libye. C'est de la complexité à sortir de ce dilemme que la communauté internationale se retrouve paralysée dans celui de la Syrie. Ce n'est pas parce qu'ils sont des Etats autocratiques et peu respectueux des libertés des peuples que la Russie et la Chine font obstruction à l'intervention internationale en Syrie. Des puissances démocratiques, le Brésil, l'Inde et l'Afrique du Sud, pour ne citer que ces trois pays, s'opposent aussi à la récidive du scénario qui a abouti à l'intervention en Libye. Autocratiques ou démocratiques, ces puissances se refusent à faire le jeu des Occidentaux qui, sous prétexte de soutien à des revendications populaires légitimes et de protection des peuples menacés de massacres génocidaires par leurs régimes exécrés, sont en fait dans une logique de recolonisation à grande échelle là où se joue l'avenir de leurs intérêts géopolitiques et économiques. Là où ces intérêts sont solidement à l'abri de rivalités étrangères et garanties par des régimes aussi antidémocratiques et répressifs que le sont ou été ceux de Syrie et de Libye, les puissances occidentales ferment « pudiquement » les yeux sur ce qui s'y passe, alors que la violence de la répression des aspirations populaires ne le cède en rien à celles dont ont fait montre les régimes de ces deux derniers Etats. Leurs indignation et volonté d'en découdre étant à l'évidence à géométrie variable, conditionnée par des visées sordides, ne font plus d'effets sur la communauté et les opinions internationales. Le peuple syrien en fait les frais. Son combat pour la liberté et la démocratie est certes unanimement approuvé et soutenu de par le monde, mais ce monde ne veut pas recommettre la faute que, par « angélisme », il a commise en cautionnant l'intervention de l'OTAN en Libye. Si la Ligue arabe ne veut pas servir uniquement de caution régionale et ethnique à une aventure similaire en Syrie, elle doit dire haut et fort et fermement que dans le cas d'une intervention internationale contre le régime d'Al-Assad, le scénario qui s'est joué en Libye doit être totalement exclu. Mais quand on sait de quelle nature est le rapport de force qui existe maintenant en son sein et à qui il profite, il n'y a pas de « miracle » à attendre de cette organisation. Raison pour laquelle les puissances opposées à l'aventure que l'Occident veut engager doivent s'en tenir dans la fermeté de leur refus.