La situation au Mali est devenue préoccupante. Inquiétante. La chute du régime d'ATT et l'arrivée, à travers un putsch, de militaires peu expérimentés au pouvoir, emmenés par un capitaine taxé par son entourage de « peu sérieux », a donné plus de mordant à la rébellion au Nord, et des soucis de plus pour la communauté internationale. Dans le pays, depuis le 22 mars et la déposition du président Amadou Toumani Touré (ATT) par les putschistes, les choses empirent de plus en plus. Et, après le report jeudi d'une mission de la Cedeao qui devait discuter avec les militaires du retour à l'ordre constitutionnel, les combats au Nord s'intensifiaient autour de la ville de Kidal, qui finit par tomber vendredi aux mains de la rébellion touarègue. Pris en tenailles entre la rébellion, au sein de laquelle se sont greffés des groupes d'Aqmi, et la menace d'un embargo international dès lundi prochain si le pouvoir n'est pas remis aux civils avec un retour à l'ordre constitutionnel, le capitaine Amadou Sanogo et les auteurs du putsch sont dans l'impasse. Et cet état de non-constitutionnalité, de lente dérive d'un pays qui est en train de basculer vers une guerre civile, fait peur. Même aux putschistes, qui ont demandé de l'aide pour vaincre la rébellion au Nord. Or, la situation dans cette région du pays tourne à la bérézina pour les troupes du capitaine Sanogo, qui ont évacué vendredi Kidal, et étaient en train de faire la même chose à Gao et ensuite Tombouctou. Emmenée par le mouvement touareg et islamiste « Ansar Eddine », lui-même épaulé par les groupes terroristes d'Aqmi, et le MNLA (Mouvement national pour la libération de l'Azawad), la rébellion commence à devenir une réelle menace pour le pouvoir central à Bamako, même si 1.000 km séparent pour le moment les chefs de la rébellion de leurs adversaires du putsch du 22 mars. La marche des touaregs vers Bamako n'est pas ainsi écartée par les observateurs, très inquiets de l'avenir du Mali. Les putschistes du 22 mars ont en fait appuyé le bouton, comme dans un film d'horreur, d'un terrible engrenage, à tort ou à dessein, qui risque de faire connaître au pays ce qu'a subi et est en train de vivre la Somalie. Un pays déchiré, perdu, sans avenir, où se livrent des batailles interminables des seigneurs de la guerre sans foi ni loi. Ce n'est pas encore la débandade militaire, mais le Mali, avec des combats sporadiques entre pro et anti-junte militaire à Bamako, et les graves événements du Nord, donne l'image d'un pays sans gouvernail, qui entame une lente et inexorable dérive politique, sécuritaire, sociale et humanitaire. Un constat terrifiant qui doit mobiliser en urgence la communauté internationale, mais surtout les pays voisins pour que le Mali ne bascule pas vers l'inconnu où risquent de le précipiter des militaires inconscients de leur geste, alors qu'au départ, ils avaient justifié leur putsch en accusant le régime en place de n'avoir pas pu mater la rébellion pour renverser ATT. Et, ce qui angoisse le plus, c'est que les groupes terroristes d'Aqmi sont tout simplement en train de conquérir le pays, via leur participation aux combats aux côtés des rebelles touaregs.