L'Algérie se lance dans l'exploration et l'exploitation du gaz de schiste, espérant ainsi pouvoir trouver une énergie de substitution au pétrole. Le débat, à peine esquissé dans les milieux experts, est ainsi tranché dans les faits. Nordine Aït Laoussine, ancien ministre algérien de l'Energie, pense que c'est une nécessité d'aller vers l'exploitation du gaz de schiste pour faire face au déclin des réserves. L'Algérie est pratiquement passée à l'ouvrage avec le forage, il y a quelques semaines, du premier puits d'exploration de gaz de schiste, dans le bassin de l'Ahnet, au sud d'In Salah. Opération largement médiatisée par le directeur central des associations de Sonatrach, Kamel-Eddine Chikhi, à Kuala Lumpur, lors de la conférence mondiale du gaz, tenue début juin, en direction des multinationales opérant dans le pétrole et le gaz. Il avait expliqué que le forage allait permettre d'approfondir les données sur les réserves gazières non conventionnelles et de déterminer les techniques adéquates de forage. Selon lui, les études croisées réalisées par Sonatrach avec des bureaux de consulting internationaux ont permis d'avoir une «meilleure estimation du potentiel du sous-sol, une estimation très encourageante». L'option de l'exploitation du gaz de schiste semble ainsi tranchée. Elle a l'approbation de Nordine Aït Laoussine, ancien ministre de l'Energie, pour qui l'exploration des «roches mères» de schiste en Algérie est une «nécessité pour faire face au déclin» des réserves de gaz conventionnel. L'exploitation du gaz de schiste devrait permettre sur «long terme» de préserver un niveau d'exportation compatible avec la capacité de l'infrastructure déjà en place ou en projet (gazoducs plus liquéfaction). Sur la question de l'impact environnemental qui a poussé des pays européens, sous la pression des défenseurs de l'environnement, à prendre des législations contraignantes, l'ancien ministre pense qu'elles sont «exagérées». Il estime qu'en tout état de cause, ces contraintes ne s'appliquent pas avec la même acuité chez nous étant donné l'isolement et l'éloignement des zones à prospecter. Il reste l'objection économique du coût de revient de l'exploitation du gaz de schiste qui pourrait influer négativement sur les prix du GNL, le conventionnel au plus bas aujourd'hui. DES PREVISIONS RASSURANTES SUR LE MARCHE ASIATIQUE Pour Aït Laoussine, le coût de production serait, certes, «plus onéreux que dans le cas d'une exploitation de réserves conventionnelles». Mais, relativise-t-il, ce prix resterait «nettement inférieur» aux prévisions de prix du gaz des marchés asiatiques et européens à long terme. Dans le conventionnel, l'Algérie est déjà un grand producteur de gaz et fournit dix pour cent du marché européen. Sur ce marché, elle se fait concurrencer par la Russie et le Qatar, deux grosses machines dans le secteur gazier. Dans le non conventionnel, la concurrence serait davantage rude, dans un marché dominé par les Etats-Unis. A ce stade de l'évolution du schiste, y aura-t-il de la place pour le schiste algérien, au plan commercial ? Nordine Aït Laoussine est optimiste car le schiste algérien en mode commercial s'inscrit, peut-être, dans une perspective un peu lointaine. Pour cet expert en énergie, le marché mondial du gaz naturel (d'origine conventionnelle ou non conventionnelle) est en forte expansion, notamment en Asie. Il serait ainsi en mesure d'absorber, à terme, les extensions de capacité d'exportation prévues dans le monde, y compris celle du GNL américain. Et, élément important mis en relief, il ne faut pas oublier que la production de gaz de schiste algérien à «l'échelle industrielle ne verra le jour qu'à la fin de cette décennie».