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L'avenir de la Syrie discuté à Genève : Le sort de Bachar Al-Assad divise les grandes puissances
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 01 - 07 - 2012

La rencontre à Genève entre les cinq membres permanents du Conseil de sécurité dans le cadre du «groupe d'action pour la Syrie» s'est ouverte, hier, avec des divergences de fond persistantes entre le couple russo-chinois et les Occidentaux. Au cœur de la divergence, l'exigence du départ de Bachar Al-Assad comme préalable à la constitution d'un gouvernement de transition.
Les chefs de la diplomatie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU se sont rencontrés, hier à Genève, pour discuter des moyens d'appliquer le plan de paix de l'émissaire spécial de l'ONU, Kofi Annan. Outre la Russie, les Etats-Unis, la Chine, la France et la Grande-Bretagne, les secrétaires généraux de l'ONU et de la Ligue arabe, l'Irak, le Qatar et le Koweit ainsi que la Turquie étaient présents à Genève. Le pessimisme était de mise avant l'ouverture de la rencontre, hier, aux alentours de midi. L'écart entre les Russes et les Chinois, d'une part, et les Occidentaux et quelques pays arabes, d'autre part, était loin d'être aplani. A la veille de la rencontre, Kofi Annan a relevé le poids des implications étrangères dans la difficulté à faire prévaloir une solution politique. Selon lui, de «nombreuses puissances extérieures sont déjà impliquées» dans le conflit. Et en dépit d'une «unité formelle» autour du plan de sortie de crise en six points, «une méfiance réciproque les a enfermées dans un dialogue de sourds, qui ne fait qu'attiser l'incendie». Ces puissances, a-t-il expliqué, ont de manière intentionnelle ou non «encouragé le gouvernement et une partie de l'opposition à considérer que la force était la seule option possible. Cela ne sert les intérêts de personne, et encore moins ceux du peuple syrien», écrit-il. Un constat sans naïveté même si Kofi Annan considère que la responsabilité du gouvernement de Damas est la plus grande dans la tragédie.
LES GROS DETAILS
Le poids des puissances, ainsi que l'affirme Kofi Annan, aura alimenté une logique d'escalade sanglante qui fait craindre que le point de non-retour a été atteint, rendant toute démarche politique impossible. L'appel de Kofi Annan aux cinq membres du Conseil de sécurité, réunis dans un cadre informel, à dégager un consensus sur un gouvernement d'union nationale se heurte cependant aux «gros détails» qui font perdurer la crise. Selon la proposition de Kofi Annan, ce serait un gouvernement d'unité nationale disposant des pleins pouvoirs sur le plan exécutif. Il «pourrait inclure des membres du gouvernement actuel et de l'opposition, ainsi que d'autres groupes, mais exclurait ceux dont le maintien et la participation compromettraient la crédibilité de la transition et mettraient en péril la stabilité et la réconciliation». Kofi Annan ne le mentionne pas noir sur blanc, mais ce dont il est question est bien le sort à réserver au président Bachar Al-Assad. Et c'est la source principale de désaccord entre les Russes et les Occidentaux. Les responsables ont exprimé leur agacement en relevant que les Occidentaux essayaient de leur forcer la main à coup de fuites mensongères sur leur acceptation du départ de Bachar Al-Assad ou à coup de dénonciations politiques. La Russie est arrivée à Genève en réaffirmant préalablement qu'exiger le départ de Bachar Al-Assad serait une ingérence et une tentative d'imposer une solution de l'extérieur. La seule concession de Moscou est que cette question pourrait être éventuellement discutée par les Syriens eux-mêmes. A l'opposé, les Occidentaux affirment qu'aucun processus crédible ne peut être engagé sans le départ de Bachar Al-Assad. »Nous avons toujours estimé qu'un avenir stable pour la Syrie, qu'un processus politique stable passaient par une renonciation d'Assad au pouvoir dans le cadre d'un accord sur un processus de transition», a indiqué le secrétaire britannique au Foreign Office, William Hague, à son arrivée à Genève.
MOSCOU : C'EST L'AFFAIRE DES SYRIENS
La question a été discutée vendredi entre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et son homologue Hillary Clinton à Saint-Pétersbourg. Sans résultat, les points de vue des deux parties étant très éloignés. Moscou a rendu public, le jour même, un communiqué qualifiant la conférence de Genève de «pas important vers un consensus international sur un règlement pacifique et politique de la crise syrienne». Mais, indique le communiqué, la «Russie ne change pas sa position principale et est toujours persuadée que les Syriens doivent décider eux-mêmes du sort de leur pays». C'est bien le cœur de la divergence entre Russo-Chinois et Occidentaux. «Nos partenaires occidentaux veulent décider eux-mêmes de l'issue du processus politique en Syrie alors que c'est l'affaire des Syriens», a déclaré en Russie l'adjoint de Sergueï Lavrov, Guennadi Gatilov. Les Américains s'attendaient à des discussions «difficiles» et doutaient de la possibilité de conclure un accord. Sur le terrain, rien ne semble pouvoir arrêter la spirale sanglante.
SPIRALE SANGLANTE
Face à une contestation politique militarisée qui a atteint les faubourgs de Damas et qui a lancé des attaques contre une télévision et des attentats au centre de Damas, le régime réagit avec brutalité. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), 29 personnes dont 23 civils ont été tuées samedi dans les violences. La situation à Douma, dans la banlieue, serait catastrophique. Les forces gouvernementales ont repris le contrôle de la ville après une bataille qui a duré dix jours et fait des dizaines de morts et de centaines de blessés, selon des sources de l'opposition syrienne. Toujours selon l'OSDH, au moins 75 personnes ont été tuées vendredi dans les violences en Syrie. Jeudi, deux attaques suicide à la voiture piégée ont fait 55 morts et 372 blessés. De manière presque rituelle, le Conseil national syrien (CNS) a accusé le régime d'être derrière les attentats. L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) a indiqué que les deux explosions visaient un centre du renseignement. Le bilan global serait de 15.800 morts, en majorité des civils, depuis mars 2011. La situation est tendue à la frontière avec la Turquie où les forces syriennes, craignant apparemment une possible attaque, se sont déployées. L'Otan a fait savoir jeudi qu'elle n'interviendra en Syrie qu'en dernier recours. Un message sibyllin en forme de pression.


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