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Abdelmadjid Attar au - « Le Quotidien d'Oran » et «MAGHREB EMERGENT» : «S'il existe vraiment, le gaz de schiste est l'avenir énergétique de l'Algérie»
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 02 - 10 - 2012

Abdelmajid Attar, ancien ministre des ressources en eau et PDG de Sonatrach explique dans cet entretien pourquoi le changement de la fiscalité en vigueur dans le domaine des hydrocarbures est nécessaire et impératif. Pour lui, le gaz de schiste constitue l'avenir énergétique de l'Algérie si son exploitabilité est prouvée.
EN QUOI LA REVISION DE LA FISCALITE EST IMPORTANTE ?
Cette révision, il faut le préciser, ne s'applique pas aux gisements qui produisent actuellement, c'est-à-dire aux contrats d'association en cours ou à Sonatrach. Ces nouvelles dispositions ne s'appliquent qu'aux futurs contrats, aux futures découvertes. Comment la fiscalité va changer ? C'est extrêmement important, c'est le cœur de la modification apportée pour encourager la recherche et le partenariat. Avant la TRP (taxe sur le revenu pétrolier) était calculée sur la base du chiffre d'affaires global, elle va désormais être calculée sur la base du taux de rendement. Pourquoi ? Parce que les découvertes qui vont être faites à l'avenir seront de plus en plus complexes et difficile à produire avec des investissements plus importants. Les coûts de production ont énormément augmenté au cours de la dernière décennie, un gisement qui avait un taux de rendement de 30% il y a dix ans ne donne que 15% aujourd'hui, la moitié pratiquement, un gisement qui avait un taux de rendement de 15% est aujourd'hui inférieur à 10%. Or, un taux de rendement en-dessous de 10% quand on est obligé de faire de la recherche n'est pas rentable. Les investissements de recherche sont énormes.
LE 51%49% N'EST DONC PAS EN CAUSE ?
Le 51/49 n'a jamais posé aucun problème dans le secteur pétrolier. Dans la loi de 86 et dans celle de 2005 et même dans toutes les lois pétrolières dans les pays pétroliers qui appliquent le partenariat, le partenaire étranger n'a jamais pris au dessus de 49%. C'est ce qu'on appelle le « profit oil ». Quand un gisement produit par exemple 100 000 barils, l'Etat perçoit la redevance, taxe pétrolière, TRP, TPE et plusieurs autres impôts. Il retire tout cela et le reste est partagé entre Sonatrach et le partenaire étranger. Avant Sonatrach était actionnaire entre 30% à 35%, on s'y limitait pour ne pas prendre trop de risques financiers, aujourd'hui elle est à 51% ; Sonatrach prend sa part en fonction de sa participation et le partenaire aussi. Ce sont les bénéfices. Dans tous les cas de figure, aussi bien dans le passé ou dans le futur, ils ne dépassent jamais les 25% de la production totale du gisement. Ce n'est donc pas le 51/49% qui gêne. Dans l'industrie pétrolière il faut surtout trouver. A partir du moment où l'on trouve des gisements intéressants, c'est toujours rentable.
COMMENT VA SE TRADUIRE CETTE REDUCTION DE LA FISCALITE ?
Elle va être réduite dans le futur pour les zones difficiles, dans les zones off-shore, dans le nord de l'Algérie qui est très peu exploré et où il est très difficile de chercher. Dans l'ouest du Sahara où il y a peu de données et où il est aussi très complexe de chercher et avec des risques techniques très élevés. La diminution de la fiscalité, son adaptation à la rentabilité va encourager le partenariat. L'autre volet est l'ouverture du champ pour les hydrocarbures non-conventionnels, les fameux gaz de schiste et tight gas (réservoirs compacts). Beaucoup de gens évoquent un problème d'environnement, je pense que c'est vraiment exagéré. Il n'y a pas plus de problème que dans le reste de l'activité. L'exploitation des hydrocarbures conventionnels induit exactement les mêmes risques environnementaux que pour les hydrocarbures non conventionnels.
C'EST UN CHOIX RISQUE, SELON CERTAINS
C'est un choix à long terme. L'Algérie doit assurer son indépendance énergétique dans 20 ou 30 ans. Si jamais ces gaz de schiste existent réellement, c'est un choix stratégique à long terme à faire. Pour l'instant, on est au stade de l'évaluation… Les experts de Sonatrach avancent des estimations intéressantes sur l'existence de réserves de gaz de schiste aussi importantes que celles de gaz conventionnel… Pour le moment, on n'a fait aucun test de production. En cas de disponibilité, c'est un choix stratégique qui est en mesure d'assurer l'indépendance énergétique de l'Algérie dans 30 ans… Dans 20 ans on produira certainement deux fois moins de gaz aujourd'hui. J'espère seulement qu'on n'en exportera pas beaucoup pour pouvoir garder un peu pour nous à partir des réserves conventionnelles qui existent aujourd'hui. La différence viendra d'où ? Vous pensez qu'elle viendra du nucléaire ? Avec le doublement de notre consommation énergétique qui augmente de 14 à 18% par an ? Le ministre a dit que dans dix ans on aura besoin de deux fois plus d'électricité et de carburant… d'où cela viendra-t-il ? Du conventionnel ? Cela va durer encore dix à 15 ans et après ? Le renouvelable, il en faut certes, mais pour le moment le kilowattheure solaire est beaucoup plus cher que le kilowattheure gaz. Il y a un problème de cout…Il faut mettre en place au plus tôt un mix énergétique. Mais je le dis, l'avenir énergétique de l'Algérie au-delà de 20 à 30 ans est dans le renouvelable et le gaz de schiste, s'il existe vraiment. Pour le moment, on n'a pas encore vu sa production.
COMMENT AUGMENTER NOS RESERVES ?
On ne peut augmenter nos réserves que si on découvre. Il y a encore du pétrole et du gaz conventionnel à trouver. Il y a le gaz de schiste qui n'est « conventionnel » que par ses méthodes d'exploitation et de production. Sinon, c'est le même gaz que celui de Hassi R'mel. La différence est dans les techniques utilisées. L'exploitation du gaz de schiste consomme effectivement un peu plus d'eau, elle est plus chère, quatre à cinq fois plus que pour le gaz conventionnel. Un puits en gaz non conventionnel produit sur une période de quatre à cinq ans, ensuite il faut faire un deuxième puits alors que ce n'est pas le cas dans le conventionnel. Mais tout cela est pris en considération dans les calculs économiques et les conditions environnementales.
On peut donc augmenter sensiblement nos réserves si on découvre de nouveaux gisements conventionnels et si on arrive à prouver l'exploitabilité du gaz de schiste qui existe en Algérie.
QU'EN EST-IL DE LA RECUPERATION ?
C'est effectivement important. Penons le cas de Hassi Messaoud, le gisement est géant mais très complexe. Il ne produit pas facilement. Je vous informe qu'on injecte de l'eau à Hassi Messaoud, mais ce sont des quantités infimes par rapport aux réserves de l'albien. On injecte de l'eau pour augmenter la pression afin que les gisements continuent à produire. Quand on soustrait du liquide du sous-sol, la pression à l'intérieur du réservoir diminue. Donc plus on retire de liquide, moins on produit. Mais si au fur et à mesure qu'on retire du liquide, le pétrole, on injecte de l'eau à la place, on maintient la pression à l'intérieur du réservoir. On continue ainsi de produire au maximum et à récupérer le maximum de pétrole. Pour Hassi Messaoud, on calcule actuellement les réserves récupérables à 28%, c'est minime par rapport à ce qui se passe dans le monde pour un gisement pareil. Ailleurs, selon ma connaissance des techniques de production actuelles qui sont appelées à évoluer, on peut récupérer au minimum 35% à 40% à partir d'un gisement pareil. Imaginez qu'on introduise de nouvelles techniques de production… A Hassi Messaoud, une simple augmentation du taux de récupération de 2 à 3%, équivaudrait à la meilleure découverte qu'on ait faite au cours des dix dernières années.


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