Pour les autorités politiques et sécuritaires du pays dont la doctrine stratégique en matière de lutte antiterroriste exclut la négociation avec les preneurs d'otages, l'assaut qu'elles ont ordonné contre le groupe armé qui a occupé la base gazière d'In Amenas a été dès le premier instant l'issue qu'elles ont envisagée. Elles n'ignoraient pas que l'opération allait être à haut risque pour les nombreux otages détenus par le groupe armé qui a d'emblée menacé de tuer ces otages au cas où les forces de sécurité algériennes s'aviseraient d'entreprendre de reprendre le contrôle de la base. Mais elles n'ont pas hésité devant ce risque, tant pour elles l'obsession a été d'en finir au plus vite avec une prise d'otages qui par son ampleur, la facilité apparente qui l'a rendue possible dans une zone censée être hautement sécurisée a porté un coup dur à la réputation d'efficience dans la lutte antiterroriste de l'appareil sécuritaire algérien. En finir au plus vite aussi pour arrêter l'énorme bruit médiatique qu'elle suscitait et dont les interrogations, questionnements et certaines conclusions ont pris la forme d'un procès en règle du pouvoir algérien, de son attitude dans la crise malienne et de sa conception de la lutte antiterroriste. Il est hypocrite de penser que les autorités algériennes auraient dû gérer la prise d'otages autrement qu'elles l'ont fait. Surtout quand ceux qui leur font reproche d'avoir opté pour la solution de l'assaut ne tarissaient pas auparavant de louanges à l'endroit de la fermeté de leur stratégie de lutte antiterroriste. Pour les autorités algériennes, le pire n'était pas dans la conséquence du dégât humain qu'entraînerait un assaut contre les preneurs d'otages, mais dans celle d'apparaître avoir cédé sur leur intransigeance à ne pas négocier avec les terroristes. Que n'aurait-on pas dit en effet si ces autorités avaient accepté d'entrer en négociations avec la bande de kidnappeurs terroristes et fait droit aux revendications qu'elle a formulées ? Certainement que l'Algérie prône la fermeté et le refus aux autres mais pas à elle. Le bilan de l'assaut est lourd, mais l'action a montré la détermination des autorités algériennes à s'en tenir à leur position de principe de ne céder sous aucun prétexte à la pression des terroristes. N'ayant pris en défaut leur constance en la matière, les mêmes qui ont espéré les y prendre s'en prennent à la manière dont elles ont conduit l'assaut mais en omettant de dire qu'elles ont porté au pinacle l'expertise des forces de sécurité algériennes dans le domaine de la lutte antiterroriste. Pour l'opinion publique algérienne, le dénouement de la prise d'otages a eu certes un coût humain dramatique, ce qui toutefois ne lui fait pas juger inappropriée la décision des autorités du pays d'avoir ordonné l'assaut contre les preneurs d'otages. La gravité de ce qui en découle pour l'Algérie au plan tant économique que diplomatique et sécuritaire de l'opération terroriste à In Amenas, lui a fait néanmoins prendre conscience que le pays doit absolument revoir sa politique sécuritaire dont l'appareil en charge a clairement démontré ses failles et faiblesses en la circonstance. Passé l'émotion suscitée par la spectaculaire opération terroriste d'In Amenas, il apparaîtra qu'elle n'a été rendue possible qu'à cause de la routine imprimée à la mission sécuritaire qui a généré une baisse de vigilance. Mais surtout parce qu'elle a à n'en point douter bénéficié de complicités n'ayant pas été détectées et neutralisées à temps.