Depuis le début de la crise syrienne, les Occidentaux n'ont eu de cesse de déplorer la paralysie du Conseil de sécurité de l'ONU et de vilipender la Russie et la Chine dont les veto ont été à l'origine de cette situation. Sauf que ce n'est pas là une situation exceptionnelle au niveau de cette institution onusienne, mais au contraire une constance qui se vérifie à chaque fois que ses cinq membres permanents et disposant du droit de veto n'arrivent pas à s'entendre sur une question arrivant devant elle pour décision à prendre. Ce constat l'opinion internationale n'a pas attendu l'épisode du conflit syrien pour le faire et perdre toute confiance quant à la capacité du Conseil de sécurité et donc de l'ONU à jouer un rôle décisif dans les crises internationales et régionales sur les règlements desquelles ses cinq membres permanents divergent et s'arc-boutent sur leur position respective. C'est pourquoi l'opération de diabolisation de la Russie et de la Chine que les puissances occidentales membres Conseil de sécurité ont tentée auprès de cette opinion internationale au prétexte que ces deux pays sont responsables du blocage au niveau onusien d'une initiative concertée pour mettre fin à la tragédie syrienne, n'a nullement convaincu et n'a surtout pas fait accepter l'option de substitution à cet état de fait qu'elles ont voulu mettre en œuvre : celle d'une intervention militaire occidentale unilatérale en Syrie. On peut approuver ou dénoncer les positions russe et chinoise sur le conflit syrien. Mais en terme de légalité, il ne peut être fait reproche à Moscou et Pékin d'avoir eu un comportement contraire à celle-ci en ayant fait usage de leur droit de veto. Si le recours au veto au Conseil de sécurité de l'ONU enfreint véritablement la légalité internationale alors ses membres permanents occidentaux ont été hors la loi d'une manière beaucoup plus constante que la Russie et la Chine. L'Amérique, toujours approuvée et épaulée par la France et la Grande-Bretagne, oppose le sien systématiquement quand il est question au Conseil de sécurité des agissements d'Israël à l'encontre des Palestiniens ou d'Etats de la région. Tous les reproches que suscitent l'attitude occidentale en ces circonstances se heurtent à l'indifférence arrogante de Washington, Londres ou Paris cyniquement retranchées derrière le droit, que leur confère la légalité onusienne, d'empêcher que soient votées des résolutions allant à l'encontre de leurs intérêts nationaux ou de leurs « protégés » sur la scène internationale. Il est hypocrite de leur part par conséquent de pousser des cris d'orfraie au constat que Moscou et Pékin en font de même pour préserver leurs propres intérêts. Il n'est pas d'argument moral ou humanitaire à opposer à la Russie ou la Chine quand elles mettent leur veto. Les Occidentaux ne s'embarrassent pas de telles considérations quand ils paralysent l'institution onusienne. Les Etats sont des monstres froids qui ne fonctionnent ni n'agissent au sentiment. Et de ce point de vue, l'Amérique et ses alliés occidentaux ont eu à en remontrer aux autres. Ils payent d'ailleurs de n'être plus crus par l'opinion internationale et même par les leurs quand ils invoquent les « grands principes et valeurs » censés motiver ce qu'ils entreprennent à travers le monde en en confiant la réalisation à leurs « canonnières ». C'est pourquoi sans forcément approuver les positions russe et chinoise dans la crise syrienne, une majorité de l'opinion internationale ne condamne pas sans appel leur attitude au Conseil de sécurité et qui a la clarté des motivations pour elle. Quoi de plus clair en effet que d'opposer le veto à des résolutions dont la finalité ne vise à rien d'autre que d'établir l'hégémonie occidentale sur la conduite des affaires du monde et dans une région où sont en cause des enjeux cruciaux qui conditionnent le présent et le futur du monde.