Les violences qui secouent depuis huit mois l'unité de voisinage n°14 à la nouvelle ville Ali Mendjeli de Constantine ont atteint, ces trois derniers jours, un seuil dramatique. « Un jeune est mort dans la matinée du samedi dernier après une chute de la terrasse d'un bâtiment, un autre se trouve dans un état comateux au niveau de l'unité des soins intensifs du CHU de Constantine après avoir reçu sur son corps une bouteille de gaz butane, jetée à partir d'un balcon, et d'autres blessés encore par armes blanches plus ou moins gravement atteints», tel est le triste bilan enregistré lors des affrontements violents vécus durant ces trois derniers jours (jeudi, vendredi et samedi) par les habitants de l'UV n°14 à Ali Mendjeli. Le déchaînement de la violence, cette fois-ci, a complètement bouleversé les consciences des riverains des lieux et de toute la population constantinoise. Profondément choqués par cette terrible spirale de la violence, les habitants vivent dans le désarroi total. Par peur, surtout pour les enfants, la plupart d'entre eux ont dispersé les membres de leurs familles chez les proches. Mais jusqu'à quand ? «Ce qu'on craignait le plus vient d'arriver avec cette première victime des affrontements violents entre les bandes des ex-bidonvilles de Fedj Errih et Oued El Had», répétait, hier, d'un air angoissé un père de famille. La victime, décédée suite à une chute d'une hauteur de plus de 20 mètres, indiquent des habitants de l'UV n°14, est montée sur le toit d'un bâtiment, malheureusement pour lui, il a été emporté par le poids d'un gros bloc de pierre duquel sortait un morceau de ferraille (rond-à-béton) qui s'est accroché à sa veste, sans qu'il ne s'en rende compte. Fatalement déséquilibré, il partira avec le bloc de pierre et ira s'écraser au bas de l'immeuble ! Serait-ce le déclic pour faire retrouver leurs esprits aux antagonistes ou, au contraire, cette mort annoncerait des représailles sanglantes ? Des habitants font part dans ce sillage de leur crainte d'une autre montée de la violence, tant le réflexe facile de la vendetta qui caractérise les agissements des antagonistes ne favorise en rien une accalmie du conflit. Car, rappelle-t-on, «des batailles rangées prennent forme pour moins que ça, parfois à la suite d'une simple anicroche entre gamins, que dire alors lorsqu'il y a mort d'un jeune ?!». Le risque d'un grave dérapage de la violence est bien réel. Le déploiement, hier, d'une importante force de sécurité à travers l'UV n°14, à l'occasion d'une visite du wali sur les lieux, laisse croire qu'on se prépare à prendre le taureau par les cornes. «Il est impératif de mettre un terme à ces violences, quitte à utiliser les grands moyens», laissent entendre les services de sécurité. Quitte à évacuer une partie des habitants vers un autre endroit ? L'option qu'on attribue au wali de la wilaya de Constantine est sérieusement envisagée aujourd'hui. Les autorités locales ont constaté à l'occasion de leur déplacement hier à l'UV n°14, avec effroi, l'ampleur des dégâts. Le spectacle projette le quartier dans un décor dévasté par les actes de vandalisme qui n'ont épargné ni le CEM, totalement saccagé, ni les vitres de plusieurs appartements situés aux étages inférieurs, ni les véhicules en stationnement. Hier matin, à l'heure de sa prise de service, la directrice du CEM n'a pas pu retenir ses larmes devant la catastrophe qu'on a fait subir à cet établissement scolaire, fraîchement réceptionné. Les malfrats qui se sont introduits à l'intérieur du CEM ont procédé à une casse systématique de tout ce qui leur tombait sous la main. La salle des enseignants a été mise sens dessus dessous, les chaises lardées de coups de couteau, les armoires détruites, et pratiquement toutes les vitres des classes et la devanture en verre dévastées. «Les cours seront à coup sûr à l'arrêt pour une longue période», s'indignent des pères d'élèves. Aussi, certains appartements ont fait l'objet de pillage et d'autres atteints par les projectiles de pierres, et de morceaux de fer soigneusement coupés à la taille de deux centimètres (la taille d'une petite balle) et lancés à l'aide de tire-boulettes, ont subi de sérieux dommages. En tout cas, cette situation a énormément arrangé les affaires des dealers qui profitent de ce climat de terreur pour écouler leur poison comme des petits pains. «On peut le constater facilement au vu de leur état hagard, les jeunes qui participent aux affrontements sont presque tous sous l'effet des drogues», affirme un habitant.