Il était près de vingt heures, dans la nuit du lundi à mardi, lorsqu'une bande composée d'une trentaine de jeunes, pour la plupart encagoulés, a investi un carrefour au niveau de l'UV N°8 à Ali Mendjeli, non loin du lieu où a été perpétré un crime le dimanche dernier. «Ils arrivent», murmurait la foule de badauds qui se trouvaient encore à l'endroit pour faire des achats auprès de l'unique épicerie encore ouverte, ainsi que quelques tables de vendeurs de produits pyrotechniques. Tout de suite après, un mouvement de panique et de sauve-qui-peut s'empare des gens. Les encagoulés commençaient à lancer des cocktails Molotov sur les passants sans distinction aucune. Un premier cocktail Molotov s'écrase sur la chaussée provoquant un large foyer de feu derrière les pas des derniers fuyards. La place a été désertée en une fraction de seconde. Les automobilistes qui empruntaient cette route ont été conseillés par les personnes en fuite de rebrousser chemin, et ceux en stationnement sur les lieux ont vite fait de mettre le moteur en marche pour aller garer leurs véhicules dans un endroit plus sûr. Plus aucune personne ne circulera cette nuit-là sur cet axe allant vers le quartier «New York» (UV N°8), d'ailleurs la route sera totalement bloquée, pour le reste de la nuit, par les jeunes en furie qui cherchaient à se venger de la mort de leur voisin et ami. C'était le but de l'assaut mené au carrefour indiqué, car c'est là que réside le présumé auteur du meurtre commis le dimanche dernier. Une veillée du Mawlid Ennabaoui Echarif bien particulière à Ali Mendjeli, où la soirée n'a pas connu l'ambiance festive généralement vécue à l'occasion, tant le cocktail Molotov a remplacé, par endroits, les pétards. A l'UV N°14, par contre, le climat baignait dans un calme précaire en cette nuit du Mawlid. Le déploiement des éléments des services de sécurité à l'intérieur du quartier a même permis à quelques enfants, accompagnés de leurs parents, de mettre le nez dehors et jouer quelques instants avec les feux d'artifices et autres pétards. Dans l'après-midi du lundi, les services de sécurité ont pu neutraliser un dangereux criminel, condamné par contumace à 20 ans de prison ferme, pour sa participation à l'attaque d'un bus et de ses passagers qui ont été délestés de leurs biens au niveau de Oued El Had lors du ramadhan 2012. Mais pour beaucoup d'autres familles, le Mawlid Ennabaoui a été célébré loin de leurs habitations, chez les proches. Selon des témoignages de résidents, tout un bâtiment occupé par les habitants de l'ex-bidonville de Oued El Had a été déserté par les 24 familles qui y résidaient à cause de sa position trop proche des quartiers de Fedj Errih. «Ils n'en pouvaient plus de subir de front les assauts violents des habitants de l'ex-bidonville de Fedj Errih», disaient à ce propos les riverains des lieux. Alors que, ironie du sort, d'autres bénéficiaires de logements LSP situés dans le périmètre de la zone conflictuelle, dont le projet a été réceptionné, refusent catégoriquement de s'y installer. Leur cité, tout comme les alentours immédiats, a subi des dommages considérables. Conduites de gaz arrachées, réseaux AEP agressés en plusieurs endroits et même la clôture qui entoure les bâtiments a été démolie par des jeunes au comportement funeste. Enfin, les travailleurs de l'hôpital Docteur Bencharif devraient observer un sit-in, aujourd'hui à 10 heures, pour dénoncer le climat d'insécurité et les conditions dangereuses dans lesquelles ils exercent leur travail. «Basta, s'exclamera un infirmier, un médecin a été agressé dimanche, ainsi que d'autres travailleurs qui n'ont dû leur salut qu'à leur fuite des services. Quant aux saccages du matériel, c'est devenu un fait régulier à chaque bagarre où l'on enregistre des blessés. Les conflits violents vécus dans la nouvelle ville atterrissent inéluctablement dans l'enceinte de l'hôpital et ce sont les employés qui sont systématiquement et brutalement pris à partie par les accompagnateurs des victimes».