Tout le monde a raison, personne n'a tort. C'est l'image des rapports devenus depuis quelques temps agressifs entre les citoyens et l'administration. L'IMAGE DE L'ADMINISTRATION ET DU FONCTIONNAIRE DANS LE PUBLIC L'image de l'administration dans le public rassemble des représentations multiples, les unes concrètes, résultant de souvenirs de contacts précis avec tel ou tel service administratif, les autres plus abstraites, illustrant des jugements portés sur le rôle ou le fonctionnement de l'administration. L'image générique de l'administration dans le public se dégage progressivement de la succession et de la superposition de plusieurs images particulières. Certaines représentations s'appliquent à l'administration envisagée sous l'angle de ses rapports avec le public ; d'autres concernent les relations entre l'administration et le pouvoir politique. Ces différentes images ne se recoupent qu'imparfaitement et semblent même parfois s'opposer. Les réponses aux questions font apparaître non pas une image homogène, claire, précise de l'administration dans le public, mais au contraire une représentation contrastée, multiple, aux contours souvent imprécis. Ces contrastes sont révélateurs des sentiments ambivalents que les citoyens entretiennent à l'égard de l'Etat, de l'administration et des fonctionnaires. L'ADMINISTRATION ET SES AGENTS FACE AU PUBLIC L'administration évoque le plus souvent dans le public des représentations critiques. Les reproches sont principalement adressés à l'administration perçue comme une entité abstraite, mais ils n'épargnent pas totalement les fonctionnaires, vis-à-vis desquels les administrés éprouvent des sentiments de jalousie critique. L'image de l'administration peut être dessinée en confrontant une suite de représentations qui se renforcent mais aussi se nuancent mutuellement. UNE ADMINISTRATION COMPETENTE MAIS INEFFICACE ? Aux yeux des usagers, l'administration présente un double visage. Elle apparaît à la fois compétente et inefficace. Le terme efficacité est par ailleurs extrêmement ambigu. Que signifie l'efficacité de l'administration ? Comment peut-on l'apprécier et la mesurer ? Le public présente l'administration à travers les fonctionnaires avec lesquels il entre en contact. Par-delà cette image reflète l'administration, le public a aussi une représentation plus abstraite et imprécise de la face immergée de l'administration : l'ensemble des services qui n'entretiennent pas de relations directes avec lui. Ainsi l'efficacité administrative est principalement perçue par le public sous sa forme externe: la capacité de l'administration de répondre aux attentes et aux demandes des citoyens. Le public connaît mal le fonctionnement interne de l'administration, ne serait-ce que parce qu'il est très peu informé sur ce point. C'est donc du côté de ses rapports avec les citoyens qu'il convient de rechercher les raisons du jugement globalement négatif sur l'efficacité de l'administration. Ainsi, parmi les reproches les plus fréquemment adressés à l'administration, figure celui de la lenteur. Lorsque vous avez présenté une demande à l'administration dans quels délais avez-vous obtenu une réponse, et ces délais vous paraissent-ils normaux ou excessifs ? Selon vous, le langage utilisé par l'administration est-il clair et compréhensible ? - les lois sont justes, mais L'administration est compliquée ou les lois sont compliquées, mais l'administration est juste. Là encore, il semble que l'administration soit perçue comme une pièce d'un système. Ce n'est pas l'administration qu'on accuse, ni les fonctionnaires mais beaucoup plus le système bureaucratique. L'administration apparaît comme un monde à part, mystérieux, difficilement accessible, provoquant un sentiment d'exclusion. L'administration est le domaine réservé de spécialistes compétents, de professionnels de l'action administrative, une machine aux rouages complexes dont seuls ceux qui disposent du code culturel peuvent comprendre le fonctionnement. UNE ADMINISTRATION IMPERSONNELLE ET PEU EQUITABLE ? Une autre image, plus concrète, permet de préciser la manière dont le citoyen perçoit ses contacts avec l'administration. Si l'administration est jugée anonyme, le citoyen estime en outre qu'il est traité de manière impersonnelle par une administration qui le considère comme un numéro. Lorsque vous entrez en rapport avec l'administration estimez-vous qu'elle vous reçoit ? - comme un numéro, de manière personnelle, avec l'intention de vous aider ou pour se débarrasser de vous au plus vite ? Là encore, c'est plus la machine administrative que les fonctionnaires eux-mêmes qui paraissent visée. Par ailleurs, les administrés estiment qu'ils ne sont pas traités par l'administration de manière équitable. A cela s'ajoute une question très épineuse : Est-ce que l'administration traite tout le monde de la même façon ou traite mieux les gens riches, puissant, influents. UNE ADMINISTRATION ENVAHISSANTE ET PLETHORIQUE ? Machine lourde et inefficace, monde compliqué et impersonnel, l'administration est en outre jugée envahissante et pléthorique. Cette autre image de l'administration vient conforter les précédentes. La place et le poids de l'administration dans la société sont jugés excessifs. Les citoyens se sentent de plus en plus contrôlés par une administration dont l'emprise sur la société ne cesse de s'étendre. Jugé globalement excessif, mais toutefois insuffisant dans certains services, le nombre des fonctionnaires est l'objet d'appréciations nuancées, révélatrices de l'ambivalence des opinions du public sur l'administration. Les attitudes sont très différentes selon les catégories de public et les types- d'administrations. Ces jugements portés par les usagers suite aux dernières décisions des pouvoirs publics : Le changement politique va-t-il modifier le fonctionnement de l'administration et dans quel sens : sur : -l'emprise accrue de l'administration sur la vie sociale- -la clarification des responsabilités-- le poids lourd de la bureaucratie -- meilleure information des citoyens - allégement des formalités administratives -- réduction du train de vie de l'Etat-- plus grande politisation-- autres modifications ? Deux symboles illustrent principalement la représentation du fonctionnaire chez les usagers : le guichet et le statut. Le fonctionnaire est celui qui est derrière un guichet et qui, en raison de son statut, bénéficie de la garantie d'emploi LE GUICHET. La définition du fonctionnaire est l'objet, dans l'opinion publique, de quatre approches différentes. La première caractérise le fonctionnaire par sa situation de fait: celui qui est derrière un guichet, ou dans un bureau. La deuxième se base sur la fonction exercée : l'inspecteur des contributions, l'enseignant, le facteur... La troisième définit le fonctionnaire par un certain état d'esprit, une mentalité. La quatrième enfin spécifie le fonctionnaire par son statut: celui qui est payé par l'Etat et qui bénéficie d'une garantie d'emploi. De ces quatre approches, quelle est celle qui domine dans l'opinion publique ? Si on compare, dans un premier temps, les deux premières approches, on constate que l'image du fonctionnaire-type est d'abord liée à celle du guichet. Cette représentation illustre la coupure entre l'administration et les usagers. Selon les rapports administration/usagers beaucoup pensent que les fonctionnaires forment une catégorie à part, alors que peu de gens estiment qu'ils sont des citoyens comme les autres. L'image dominante du fonctionnaire traduit bien la perception d'une séparation, matérialisée par le guichet, entre l'administration et le public. D'où vient cette image du fonctionnaire ? On pourrait supposer que le fonctionnaire-type est celui que le public connaît le mieux, avec lequel il a des contacts les plus fréquents. Or, il n'en est rien. Si le guichet symbolise le fonctionnaire, ce dernier se caractérise aussi, aux yeux du public, par la protection et les avantages que lui assure son statut. Le public distingue l'image du fonctionnaire de celle des autres salariés et estime, en majorité, que sa situation est meilleure. D'un point de vue politique, l'administration présente aux yeux du public un double aspect. Elle paraît d'une part nettement politisée, mais d'autre part relativement autonome vis-à-vis des gouvernants. Une large majorité des usagers estime que l'administration n'est pas neutre politiquement. LES ATTITUDES DU PUBLIC FACE A L'ADMINISTRATION Les attitudes des administrés vis-à-vis de l'administration sont en partie déterminées par l'image que ceux-ci se font de celle-là. A l'égard d'une administration qui paraît compliquée, anonyme et envahissante, l'inquiétude est le sentiment dominant. Inquiète avant même d'entreprendre une démarche auprès de l'administration, la majorité des citoyens manifeste ensuite une agressivité teintée de scepticisme lorsque cette démarche ne lui donne pas satisfaction. L'AGRESSIVITE... Dans l'hypothèse où le premier contact avec l'administration n'aboutit pas à la satisfaction de l'administré, l'inquiétude tend à se transformer en agressivité. Trois types de comportements face à l'administration peuvent être dégagés : la combativité agressive, qui implique le refus d'admettre le bien-fondé de la réponse initiale de l'administration, la résignation qui traduit le découragement la soumission et l'impuissance face à l'administration, et enfin la sérénité confiante qui exprime un optimisme distancié devant une situation qui finira par se régler. Là encore, le comportement paraît étroitement lié à la catégorie socioprofessionnelle. La dégradation des rapports avec l'administration est particulièrement sensible après les événements de Janvier 2011-printemps arabe- et depuis lors l'administration ne hausse plus le ton vis à vis des administrés- la paix n'a pas de prix-, et au vue de l'administration, l'usager a été tellement dopé par la propagande politique qu'il est devenu monstre humain. L'absence d'un climat de confiance entre les citoyens et l'administration se traduit également par le fait qu'on ne souhaite guère entrer en relation avec l'administration quand cela n'est pas nécessaire. Les contacts avec l'administration sont donc perçus comme des rapports obligatoires, imposés ne résultant pas d'une décision volontaire de l'individu. On ne s'adresse guère spontanément à l'administration pour demander un renseignement, un service. On attend le plus souvent d'être contraint d'entrer en contact avec elle. Si l'attitude générale vis-à-vis de l'administration est méfiante et craintive, néanmoins, en pratique, les individus s'adressent le plus souvent personnellement à l'administration, sans recourir à une aide extérieure. On peut souligner le très faible pourcentage de passivité, ce qui donne part confirme le développement des attitudes agressives et le déclin de confiance passive et d'autre part indique que la résignation et la soumission n'entraînent pas nécessairement une attitude inactive. Si la difficulté est sérieuse, c'est d'abord aux responsables de l'administration elle-même que le citoyen s'adresse en priorité.- Tout le monde veut voire le directeur-. Face aux recours juridictionnels les administrés font preuve d'un scepticisme assez largement partagé. Le doute portant sur l'efficacité de la démarche, que certains expliquent par la lenteur de la procédure ou le risque de perdre le procès) vient en tête des raisons invoquées par ceux qui estiment inutile le recours devant les instances supérieures. Mais le manque d'information paraît, là encore, un élément déterminant. Face à une administration qui paraît inefficace complexe et toute puissante, les sentiments dominants éprouvés par le citoyen sont le doute, la méfiance et l'agressivité. La relation à l'administration est souvent mal vécue, provoquant l'insatisfaction et la frustration et conduisant le public à souhaiter un ensemble de réformes concernant l'organisation et le fonctionnement de l'administration. Les attentes du public concernant une réforme de l'administration découlent de la mission première qu'il lui attribue : le service de l'intérêt général et des usagers. Le public souhaite une administration plus claire, plus simple, plus ouverte sur l'extérieur. La simplification et la réduction des formalités administratives apparaissent comme la réforme prioritaire souhaitée par la plus grande partie des citoyens. Viennent ensuite un meilleur accueil du public et une plus grande efficacité de l'administration. Le désir d'une plus grande transparence de l'administration s'accompagne d'un souhait d'ouverture vers le public Parmi les procédures de participation la consultation vient en tête. Les plus politisés des usagers préfèrent la représentation au sein des organes via la société civile. Toute fois, d'autres doutent quant à l'efficacité d'une telle participation mais ce qu'ils demandent : souhaiter une administration plus claire et plus soucieuse. En définitive, par-delà les nuances et la diversité des opinions, une cohérence globale se dégage de l'ensemble des préoccupations réelles. Ainsi, les réformes souhaitées correspondent aux reproches qu'ils adressent à l'administration, lesquels déterminent leurs attitudes face à celle-ci. Par ailleurs, il serait excessif de croire que les réponses ne font que reproduire des stéréotypes, des clichés. En effet, il est intéressant d'observer que les réactions face aux décisions récentes confortent les représentations traditionnelles de l'administration, mais montrent aussi que le public n'a pas une conception figée de l'organisation administrative. En d'autres termes, ce qui a été connu comme traditions administratives depuis 1962, peut-il s'effacer en quelques jours parce que le ministre de l'intérieur a ainsi décidé. Un département ministériel peut-il influencer sur la mentalité des usagers et de l'administration à l'effet de l'amélioration du service public sinon pourquoi on a procédé à la dissolution de la médiation-Médiateur- de la république ?