La proposition d'organiser une concertation nationale inclusive sur un processus consensuellement admis de sortie pacifique de la crise dans laquelle le système politique algérien à bout de souffle a plongé le pays a été, rappelons-le, préconisée conjointement par Hocine Aït Ahmed, le défunt Abdelhamid Mehri et Mouloud Hamrouche. Leur initiative avait été alors ignorée par le pouvoir et n'avait pas suscité un intérêt notable parmi les autres acteurs de la scène politique nationale. Mais signe que la proposition de ces trois personnalités nationale n'a en rien perdu de sa pertinence et de son actualité, l'ex-président du RDC, le docteur Saïd Sadi, l'a faite aujourd'hui sienne en plaidant à quelques nuances près pour la démarche préconisée par elles. Pour être la plus spectaculaire, la conversion de Saïd Sadi à l'idée d'une phase de transition négociée y compris avec le pouvoir comme sortie pacifique de la crise n'est pas unique car maintenant prônée et proposée par des dirigeants de partis et personnalités inquiets par l'aggravation que connaît la crise nationale et du risque de son dénouement violent et incontrôlable. De même que Aït Ahmed, Mehri et Hamrouche en leur temps, le docteur Sadi ne voit pas la cause de la crise comme ayant émané des quinze années de pouvoir Bouteflika mais découlant d'un système dont l'obsolescence empirant conduit le pays à «une désintégration inéluctable». La gouvernance de Bouteflika n'a fait qu'en précipiter la perspective. Ce que propose Saïd Sadi ne se résume donc pas à créer un front électoral anti-Bouteflika comme ont tenté de le constituer certains partis et personnalités politiques mais à rassembler autour d'une solution et d'un processus de sortie et de la crise présente et du système qui en est responsable. Ce qui implique des acteurs politiques nationaux qu'ils ne tombent pas dans le piège du système consistant à vouloir les faire se déterminer en faveur de l'un ou de l'autre de ses clans pour conserver ainsi et selon l'initiative en terme de changement à opérer dans le pays. Pour ce qui est de l'élection présidentielle elle-même du 17 avril, le docteur Sadi en prône le boycott pour en disqualifier le candidat du pouvoir. Une disqualification qui à ses yeux contraindra ce pouvoir à rechercher l'engagement d'une transition dont il lui sera impossible d'en imposer unilatéralement les conditions, la feuille de route et le processus. Au passage et signe que l'ancien président du RCD ne souscrit pas à la thèse faisant de Bouteflika et de son clan le problème unique ayant mené l'Algérie à l'impasse dans laquelle elle se débat, il n'a pas été «tendre» à l'égard de ceux qui en font leur programme électoral ou argument pour réduire la solution de sortie de crise à leur éviction du pouvoir. Sadi les a fustigés en déniant toute crédibilité à leur condamnation du bilan «effectivement catastrophique» de l'homme Bouteflika, qui passe sous silence celui du système qui lui a permis d'arriver au pouvoir et de le conserver, malgré le bilan, et s'apprête à lui octroyer une rallonge. La relance de la proposition des trois personnalités évoquées est chose faite assumée par un Saïd Sadi qui n'en fut pas pourtant «emballé» quand elles l'ont rendue publique mais qui a fini par en reconnaître la pertinence des préconisations et leur caractère imprégné par la volonté de préserver la nation du risque d'implosion de son unité nationale.