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L'euro jusqu'à 155 dinars ! Le marché du change parallèle s'affole
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 08 - 03 - 2014

Le marché du change parallèle s'embrase. L'euro a désormais atteint un seuil trop élevé, jamais égalé dans le passé. Il a été échangé jeudi à partir de 153 dinars (15,30) chez les cambistes.
« L'euro a dépassé au début de l'année la barre symbolique des 150 dinars. Il y a quelques jours il a même atteint 155 dinars (15,50)», affirme ce connaisseur du marché du change parallèle. «L'achat est à 151 dinars (15,10) et la vente à 153 (15,30)», lance ce cambiste au centre-ville d'Oran. Les cambistes que nous avons interrogés estiment que cette flambée du change parallèle est due à de nombreux facteurs, essentiellement la baisse de l'offre et la progression de la demande des acheteurs qui prisent l'euro. La monnaie locale est sous pression depuis la fin 2013 sur le marché du change parallèle. Il s'agit, selon un connaisseur du marché, d'un mauvais signe pour l'économie nationale. Les acheteurs semblent perdre de plus en plus confiance dans la monnaie locale au profit des autres monnaies étrangères. Pourquoi cette perte de confiance des acheteurs ? Les incertitudes au plan politique, économique et social que connait le pays ont finalement poussé de nombreux acheteurs (opérateurs économiques, grosses fortunes, ressortissants étrangers…) a jeter leur dévolu sur la monnaie européenne. Le marché du change parallèle a en fait commencé à s'affoler avec la conjoncture actuelle. Le cours de l'euro sur le marché informel n'est pas resté insensible face à la conjoncture politique extrêmement délicate conjuguée au flottement des choix économiques du gouvernement et le recul des recettes des exportations des hydrocarbures qui ont chuté, selon la banque d'Algérie, de 10,2% en 2013 pour s'établir à 63,3 mds de dollars contre 70,5 mds de dollars en 2012 sont parmi les principales causes de la dépréciation du dinar. Le recul sévère des recettes des exportations des hydrocarbures a été causé par deux facteurs : les importations ont atteint en 2013 un niveau non soutenable eu égard au profil des exportations tant en volume qu'en valeur, alors que les quantités d'hydrocarbures exportées ont baissé de 7,3% durant la même période. Le pays gagne ainsi de moins en moins d'argent et continue de dépenser de plus en plus. L'autre raison de la flambée du cours de l'euro sur le marché de change parallèle est la chute drastique des transferts en devise des émigrés. Les ressortissants algériens résidant en Europe et particulièrement en France avaient l'habitude d'alimenter régulièrement le marché parallèle des devises en Algérie où ils peuvent gagner des sommes exorbitantes. Nos émigrés recourent rarement aux banques pour transférer leur argent. Ils préfèrent le marché parallèle pour convertir à un meilleur taux leurs économies. Malheureusement, ces dernières années, les émigrés algériens semblent souffrir des affres de la récession économique qui a frappé l'Europe. Difficile de faire de l'épargne dans une période de crise et de progression des taux de chômage en particulier parmi la communauté maghrébine. Le manque à gagner est considérable pour le marché parallèle. En parallèle au tarissement des ressources du marché de change parallèle, les transferts illicites de fonds vers l'étranger par des hommes d'affaires algériens et des sociétés étrangères ont progressé ces dernières années. La crise économique et financière internationale qui a frappé les pays du sud du continent européen a eu pour conséquence une chute des prix des biens immobiliers, comme en Espagne, ce qui a poussé de nombreux concitoyens à investir dans l'immobilier dans les villes côtières de la péninsule ibérique. Les transferts illicites sont investis dans l'immobilier dont les prix se sont effondrés. Une aubaine pour les hommes d'affaires algériens et même pour des particuliers qui investissent dans l'achat d'appartements et de villas à des prix inimaginables. «Avec 600 millions de centimes, voire moins, vous pourriez acheter un joli appartement équipé dans une ville balnéaire en Espagne», confie cet Algérien de retour d'Espagne. Les hommes d'affaires et même des hauts cadres de l'Etat préfèrent désormais acheter un appartement à Barcelone ou Alicante pour économiser les prix d'hébergement dans les hôtels qui restent encore hors de portée. Les prix d'une nuitée à Barcelone, à titre d'exemple, varient entre 500 euros pour un hôtel de luxe à 50 euros pour un hôtel bas de gamme. Les services des douanes ont ainsi renforcé ces derniers mois les contrôles dans les aéroports et les ports pour intercepter les transferts illicites, mais les hommes d'affaires recourent à des procédés ingénieux pour tromper la vigilance des services de contrôle. Parmi les techniques courantes utilisées, il y a la surfacturation des importations. Le rapport de l'Institut nord-américain Global Finance Integrity (GFI) place l'Algérie au troisième rang africain des pays affectés par ces pratiques délictueuses, derrière l'Egypte et le Nigéria. Selon le GFI, les surfacturations en matière d'importations sont estimées pour l'Algérie à environ quatre milliards quatre cent millions de dollars (4,4 mds) au cours de la période 2000-2009. La surfacturation ne consiste pas seulement à gonfler artificiellement les prix des produits -ou des infrastructures «clés en main»- que l'on importe. La technique la plus usitée, traditionnellement, consiste à respecter un prix formel en jouant sur la qualité de la marchandise importée.

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