Le taux de change de la monnaie européenne connait une flambée spectaculaire sur le marché parallèle à Oran. Le prix d'achat de l'euro qui était fixé à 12,65 (1euro=126,5 dinars) a subitement sauter à 12,95 voire à 13,00 ces derniers jours. Un niveau jamais égalé sur le marché parallèle depuis l'instauration de la monnaie unique en Europe. Cette hausse du taux de change est justifiée, par des connaisseurs des tristes fluctuations du marché parallèle, par l'approche de la saison du hadj prévue cette année durant le mois de novembre prochain. Les cambistes veulent ainsi profiter de cette occasion pour faire le maximum de profit sur le dos des futurs pèlerins. Les cambistes justifient, de leur côté, cette envolée de l'euro par la faiblesse de l'offre en monnaie européenne à cause de la chute drastique des transferts en devise des émigrés. Les ressortissants algériens résidant en Europe et particulièrement en France avaient l'habitude d'alimenter le marché des devises en Algérie. Nos émigrés recourent en effet rarement aux banques pour transférer leurs argents. Ils préfèrent le marché parallèle pour convertir à un meilleur prix leur argent. Les émigrés algériens semblent souffrir des affres de la récession économique qui a frappé l'Europe. Difficile de faire des épargnes dans de telles conditions. Le manque à gagner est considérable. Cependant il n'y a pas seulement la monnaie européenne qui a pris des ailes ces dernières semaines dans le marché parallèle mais il y a aussi le dollar, le dinar tunisien et le dirham marocain. Les cambistes spéculateurs semblent ainsi réussir à imposer leur dictat sur le marché informel de devises profitant au maximum du laxisme des autorités monétaires et en particulier la Banque d'Algérie. Des millions en devises échappent au Trésor public. Ces millions s'échangent au vu et au su des autorités dans la rue comme au square Port Saïd dans la capitale ou près du consulat d'Espagne à Oran, dans des restaurants ou dans des locaux connus pour cette activité. Les transactions se font à toute heure de la journée sans que ces cambistes spéculateurs ne soient inquiétés ni par les autorités monétaires, ni par les services de l'ordre ni même par le fisc. Nombreux cambistes ont amassé des fortunes estimées en milliards de centimes. Rien ne peut échapper à ces grands bonnets de la devise. Certains d'entre eux n'ont jamais mis le pied à l'école mais ils sont au courant de toutes les fluctuations du marché de change dans les bourses internationales. Ils ont le flair des bonnes affaires. Ils savent comment et quand se pointe la bonne occase. On les reconnaît facilement avec les liasses de billets de banque à la main, un téléphone portable et une machine à calculer. Les cambistes fixent à leur aise les coûts d'achat et de vente de la devise sans se soucier de la loi de l'offre et de la demande. Et le plus étonnant dans cette jungle de la devise c'est cette espèce d'homogénéité dans la «confrérie» des cambistes. Il est rare voir impossible de trouver un cambiste qui ose casser les prix. La jungle de change est une véritable institution qui a profité de l'anarchie pour imposer son diktat. Aristote n'avait-t-il pas dit un jour que «La nature a horreur du vide».