La quiétude des habitués du jardin Bennacer', situé au centre-ville de Constantine, a été perturbée, hier, dans la matinée, par le rassemblement du mouvement Barakat'. Une quinzaine de personnes, des femmes et des jeunes représentant les familles de disparus, ainsi que d'autres jeunes représentant le comité des chômeurs, encadrés par des militants actifs du mouvement Barakat', se sont regroupés, à partir de 10h30, dans l'enceinte du square Bennacer'. Très vite, le groupe a été entouré d'une imposante foule de badauds et de curieux, ainsi qu'un déploiement massif d'agents de sécurité. Tout juste ce qu'attendaient les manifestants qui ne tardèrent pas à brandir des portraits de leurs proches disparus, et des pancartes où l'on pouvait lire les slogans chers à ce mouvement, «Barakat», «Bezzaf», ou encore «ni Oujda, ni DRS, Chaâb Houa El Assasse». Un jeune, muni d'un haut parleur, se mettra dans la foulée à lancer des invectives contre les représentants du gouvernement, qualifiés de «Chiatines». Et, comme on a pu le constater, ces derniers jours, le mouvement Barakat' ne se contente plus de s'inscrire, seulement, contre le 4e mandat, car ses slogans visent, maintenant, la chute du système, «youskout Ennidham» est un écriteau bien levé, au-dessus des têtes, ainsi que d'autres slogans scandés par les manifestants et qui prônent la même logique, à l'enseigne de la revendication d'une «période de transition». Aucune intervention de la police, déployée en force sur les lieux. On ne fait que suivre, discrètement, le développement des évènements. Aux environs de 11h, un autre groupe d'une dizaine de personnes, tient un petit rassemblement à quelque 50 m des premiers manifestants, qui rejoindront ces nouveaux venus pour former un seul groupe. Tout le monde sera surpris, ensuite, par l'arrivée, sur les lieux, d'un groupe de jeunes pro-Bouteflika. Ces derniers s'installeront en face des manifestants et commenceront, à leur tour, à scander le nom de «Bouteflika». Les deux groupes de manifestants étaient séparés par un cordon sécuritaire, mais cela n'a pas empêché les uns et les autres de se jeter des insultes. «Laissez-nous, rana labasse», criaient les pro- Bouteflika. Et les autres de leur dire qu'ils ont vendu le pays pour 500 DA. Par moment, le ton est monté de part et d'autre, quelques-uns ont failli arriver aux mains, mais les services de sécurité veillaient au grain. Aucun dérapage n'est signalé. Les badauds ont commencé à quitter la scène et avec eux les manifestants, dans le calme. Le même topo a été vécu à travers les villes de Bouira et Tébessa où des groupes d'animateurs du mouvement Barakat' se sont donné rendez-vous, hier, (un communiqué du mouvement en question avait appelé, mercredi dernier, les citoyens à se joindre à ses rassemblements annoncés à Constantine, Bouira, Tizi-Ouzou, Batna et Tébessa). Presque à la même heure (11h), les manifestants en nombre réduit, ne dépassant guère la trentaine de personnes, munis de leurs banderoles, placards, pancartes et autres panneaux aux écrits de «Djoumhouriya machi malakiya», «Nous ne voulons pas d'un pharaon, mais d'un état de droit», et «rendez nous notre pays», ont investi les espaces publics les plus fréquentés des deux villes. Hélas, là comme ailleurs, et depuis le début de leur manifestation contre le 4e mandat, le mouvement Barakat' n'a jamais réussi à mobiliser la masse. La population est demeurée indifférente aux appels des animateurs de ce mouvement, si ce n'est, carrément, la réaction contraire qu'ils auront provoquée. Hier, une dame âgée, de passage au square Bennacer, à Constantine, n'a pas manqué de crier tout son soûl contre les manifestants, laissant pantois et les manifestants et les curieux qui les entouraient.