Une réélection vient d'être remportée. L'euphorie enthousiaste et le déboire accablant vont se dissiper rapidement. Le plus gros reste à faire. Pour les deux camps. L'essentiel est cependant dans le giron du nouveau président. Il lui est imposé par moralité et sincérité envers ses concitoyens, ses électeurs, son peuple de mettre en œuvre ce qu'il a promis quoique par personnes interposées. Un renouveau démocratique et l'ébauche d'une république régénérée. Le peuple attend certes beaucoup de mesures allant dans le sens de consolider celles déjà timidement prônées mais aussi celles compatibles avec l'exigence actuel et conformes aux motifs génésiaques du quatrième mandat. Le besoin d'oxygéner l'Etat et d'offrir plus de bonheur au peuple passe impérativement par la prise des décisions urgentes suivantes : 1/UN GOUVERNEMENT JEUNE ET NEUF Bouteflika est connu pour son manque de penchant vers trop de changement. Il peut changer d'humeur et ne pas changer des hommes. Le taux de 81/ obtenu par lui sur les 51/ de votants n'est pas en vérité une splendeur, même s'il reflète quand bien un certain confort. La cause, tout le monde en parle y compris ceux qui sont dedans, est à inscrire dans le registre de ces imbuvables représentants de sa candidature. Hormis deux ou trois, le reste a fait fuir l'électeur. A lui seul, silencieux et sympathique avec un fauteuil roulant ; il a fouetté par mansuétude des sentiments obligeant les femmes à aller l'élire (Madame M. Souha me disait n'avoir jamais voté - mais à le voir ainsi je suis partie immédiatement voter pour lui. Il m'avait fait de la peine - ya denya khada3a! (Oh ! La vie traitresse ! ) Ces « représentants » ont prouvé au peuple lors de la campagne qu'ils ne sont là que par instinct de survie. Quand le frère du président était attaqué, personne n'avait dit mot, préférant attendre l'issue des affaires. Certains commençaient déjà à emballer leurs propres affaires croyant à une fin de règne. Ce panel de mauvais laudateurs d'entre politiciens gibbeux et avachis ou surtout certains ministres en poste demeure le grain de sable qui a fait grisailler l'élan qui aurait sied à Bouteflika s'il avait fait en personne sa propre campagne avec sa verve, ses tirades et ses envolées. On a vu un gouvernement qui ne se lance que dans l'irresponsabilité et le cafouillage notionnel des programmes et des inaugurations. Alors pour le salut républicain une nouvelle génération serait d'un apport dynamique si elle venait à être versée dans les rouages des institutions et du gouvernement. L'Algérie en cette période prépondérante qui ressemble sans se le dire à une impérative phase transitoire est appelée par son pouvoir à sortir de l'hégémonie d'une génération mûrie vers la transmission des affaires publiques à une autre. Toute prête à prendre le relais, cette frange de jeunes visages formés dans nos universités et montrant sa compétence dans les divers créneaux s'impatiente et se place impatiemment dans l'attente d'une remise d'un lourd héritage. Elle est là, recalée ou agissant à l'ombre des grands noms qui en fait ; ne le sont que par sa pleine participation discrète et sans trop de bruit. C'est elle qui est dans l'arrière-boutique du pouvoir, dans les centrales ministérielles. Reconduire encore et encore trop de têtes connues et reconnues les rendant ainsi presque des icones indétrônables ne va qu'accroitre le dégoût des gouvernés. Le monde algérien, à peine de se sourdre à jamais dans l'amorphie a grandement besoin de nouvelles têtes, de personnel neuf et d'une énergie intacte et encore quasi-inusitée. La république aura tout à gagner à se voir doter d'une élite juvénile. A quand un ministre de l'intérieur de moins 40 ans ? Un premier ministre moins de la cinquantaine ? Ou bien le jeune est toujours ce menu électoral, cet eternel inscrit de l'ANSEJ, ce chauffeur de Harbin ? 2/L'EQUILIBRE DANS LA CONSTITUTION Tant souhaitée, clamée et proposée par les forces oppositionnelles ou au pouvoir ; la révision constitutionnelle devient le premier pas à franchir immédiatement dans les premiers jours de ce quatrième mandat tant controversé. L'intention du pouvoir à aller de l'avant, vers plus d'ouverture et de démocratisation des mœurs politiques ne se verra que dans un parfait équilibre des pouvoirs. Il faudrait également lever les innombrables ambigüités et servir consensuellement les déficits constatés. Le dernier vote de Bouteflika dans un centre n'a pas manqué d'engendrer des commentaires allant jusqu'à sa révocation. L'handicap est-il un empêchement constitutionnel pour une candidature présidentielle ? Est-il au sens de l'actuelle constitution une maladie grave ? Un handicapé moteur n'a-t-il pas le droit d'être présidentiable ? n-a-t-on pas vu dans les assemblées communales et de wilayas des membres handicapés ? Ils ne sont pas atteints de pathologie pouvant réduire leur production politique. S'attarder un temps soit peu sur cet aspect d'empêchement en différenciant les cas n'est qu'une prévention d'avenir. Cet avenir s'il ne se décline pas dans cette énième révision va se voir et pour longtemps hypothéqué et laissé à l'humeur de l'heure future. Il ne s'agit pas de boucler l'édition mais l'aérer, la rendre plus accessible et moins muette. Loin de la limitation des mandats présidentiels qui s'avéreraient une garantie contre l'individualisme de pouvoir et son accaparement légal, il est d'une essentialité vitale pour l'alternance et l'équilibre des pouvoirs de créer des garde-fous empêchant l'envie démente de vouloir et pouvoir gouverner seul. Un contrepoids est nécessaire. Une assemblée forte par sa digne et véridique représentativité va constituer une digue face aux désirs incessants et grandissants du pouvoir personnel ou de groupe. Bouteflika aura ainsi terminé la mission de 1999 tendant à parachever l'édifice démocratique qu'il promettait. Les libertés collectives et individuelles tellement galvaudées ne seront d'aucune utilité si elles seront renvoyées à des textes réglementaires d'application. La loi solennelle doit exclusivement les réguler et les protéger. Ces autorisations, ces permis, ces agréments pour se réunir, marcher, s'asseoir ne peuvent dépendre d'un pouvoir exécutif, le plus fort du temps antithétique à de telles manifestations. 3/L'ADAPTATION DU CODE ELECTORAL ET LA LOI SUR LES PARTIS C'est à travers les dispositions de ce code que l'on a des maires, des députés et des sénateurs aléatoirement honnis et blackboulés. Elles ne permettent pas une sincère représentation populaire qui doit correspondre effectivement avec les aspirations réelles et profondes de la multitude. Quelle responsabilité encourt un député ou un sénateur ? Que des privilèges et des avantages. On ne les a pas trop vus dans la campagne électorale. S'affichant dans les permanences, ils se tapissent à l'ombre de leur population envers laquelle ils n'exercent nul ascendant. Ce code devra donner plus de flexibilité à l'élu, une fois cernés tous les profils du mandat électif. La responsabilité s'érigera en étroit partenariat comme le corolaire le plus intransigeant avec un quelconque privilège. Immunitaire, financier ou protocolaire. Qui veut une ombre d'autorité ne serait-ce que d'influence ou morale doit prendre avec toute une responsabilité. C'est ce qui manque crânement dans ce code. Et puis, cette notion vague et fourre-tout du candidat libre ! Il ne peut y avoir de candidats libres dans des élections dans une société désarticulée déjà en termes organiques. Si quelqu'un est capable de pouvoir réunir des milliers de signatures, il lui est donc aisé de fabriquer un parti. Qu'il le fasse et se présente sous une étiquette partisane. Les choses seront ainsi plus claires et contribueront sans doute et à la longue à approfondir davantage la pratique démocratique. Mais venir récolter des souscriptions, se voir évincer et disparaitre à jamais n'est pas un acte de militantisme. Il est à la limite un amusement ou une simple jouissance individuelle. Du pur aventurisme infantile. Une réadaptation révisionnelle de la loi régissant les partis doit être menée parallèlement au code électoral. Un cahier est à joindre en annexe à charge pour les partis de s'y conformer notamment par des dispositions législatives impératives. Les statuts ou règlements intérieurs ne seront pas des textes sur mesures laissés à l'appréciation des militants quoique réunis en congrès. Ils se doivent d'avoir des obligations communes fixées par une loi organique. Nul ne peut être candidat à une quelconque élection s'il n'est pas inscrit sur un registre partisan depuis au moins un certains temps -disons 3 ans- ceci éluderait le recours à la vente de candidatures, au parachutage et confortera l'éducation politique. Le parti devra revenir à ses essences fondamentales de pépinière de l'effectif politique. Pour être candidat aux législatives, obligation d'avoir déjà jouit d'un mandat local est de mise. On ne vient pas apprendre la politique à l'APN, on est sensée l'avoir apprise sur le terrain, chez soi, dans son douar. A travers ces deux lois, il y a lieu d'évoquer outre le mode électoral le plus approprié après concertation et de redéfinir politiquement le rôle du parti. La conquête du pouvoir reste son unique motif. Celle ci ne peut s'obtenir que par les urnes. Alors que dire d'un parti qui refuse sous divers mobiles de participer aux élections ? Le boycott ou l'appel à l'abstention est-il une position politique acceptable ? 4/LA DISSOLUTION IMPERATIVE DU PARLEMENT Tout le monde le décrie. L'opposition ne lui reconnait aucune légitimité tant l'argent sale, le régionalisme et le copinage ont été les principaux critères ayant présidé à la mise sur liste de candidatures. C'est une fois le code électoral revu et corrigé tel que supra que nous assisterons à une nouvelle classe de gentlemans politiciens tous issus de partis structurés et organisés. L'assemblée dans ses deux formes est une merveille universelle, dans son fond un tremplin pour l'ambition démesurée et une tribune pour ceux en mal de médiatisation. D'anonymes individus elle en a fait de personnages se targuant de politiciens. Son utilité dépendra en grande partie de l'utilité marginale que représente son parti au niveau sociopolitique. L'appartenance à un tel ou autre parti détermine clairement les dessous qui animent l'homme représentant du peuple. Il est de constance que ces gens là siègent à Alger, y crèchent, y discutent et font de la figuration au sein de (l'amphi)-théâtre où les principaux rôles ne sont détenus que par ceux, en dehors de la scène, qui tirent les ficelles. La comédie est nationale tant que la tragédie ne puisse cesser par une dissolution salutaire. Les éventuels candidats dont les portraits lacérés désagrémentent toujours les arcades des grandes avenues des petits douars, n'ont de cure que les coulisses, les affaires et la hargne disproportionnée d'occuper une fonction précaire qu'ils n'auraient pu avoir toutefois par diplôme ou qualification professionnelle. Qu'ont-ils fait ces éternels candidats en perpétuelle attente de meilleures opportunités électorales ? Ils pensent avoir sous la main les instances élues alors qu'ils n'arrivent point à faire l'unanimité dans leur quartier ! Parfois dans la famille ! Les élections du 17 avril ont bien montré leur impuissance de mobilisation autour du président, du moins dans certaines villes. La dissolution est justifiable par un débordement de raisons. D'abord ceux et celles qui y siègent en majorité sont issus de listes faites par Belkhadem et Ouyahia. Ces deux leaders ont connu la négation et le déni de bienfaisance du propre chef de ces mêmes députés. La dissidence a fait son plein quand le trône change de titulaire sans que l'idéologie ne soit pour autant guindée. C'est un groupement budgétivore et un ornement façadier. Profitons tant qu'ils sont là, placides et dociles et bien engraissés de faire passer sans accrocs les urgences 2 et 3 sus-indiquées. Ils ne discuteront pas, même proclamant leur autodestruction. Car juste pour avoir été un jour député, vaudrait une retraite dorée. Il en sera de même pour la modification du règlement intérieur régissant les débats, les avantages et la présence. Une assemblée vide rendue en un simple lieu de rencontre de ministres n'est qu'une opportunité personnelle sans effets sur le citoyen. 5/RENFORCER L'OPPOSITION Ce sera la conséquence directe des quatre mesures sus-indiquées. Un pouvoir qui tient à renforcer son opposition peut paraitre paradoxal. Mais une opposition au sens politique n'est-elle pas une nécessité pour être un contre-pouvoir ? Tout pouvoir en droit a besoin d'une opposition, ce qui éviterait les dérives d'autoritarisme. Sans contestation aucune, l'actualité du moins celle antérieure à avril confirme que le pouvoir excellait dans la maîtrise de la pratique du régime. Ses antagonistes, voire ses adversaires ou ses détracteurs, n'ont de cette pratique que des jérémiades, des lamentations et de la résignation fatidique. Selon le menu que nous livrait cette actualité ; il était difficile de pouvoir distinguer le moindre brin d'une lutte qu'auraient à exercer les partis dits d'opposition. A en croire durement que l'un et l'autre ne forment en fait qu'une seule et unique entité. Parce qu'elle est frappée d'asthénie et bourrée de parasites, l'opposition est dans ce cas inutile. Le sacrifice de temps, qui équivaut souvent à un recul tactique, vaudrait mieux qu'une piètre démonstration vouée assurément à l'autodestruction. Ce sont les fondateurs qui sont toujours les chefs. La passation de consignes est dure à réaliser entre ceux qui prétendent qu'il s'agit là d'une propriété privée avec les droits d'auteur y afférents et les autres, arguant d'une légitimité organique et politique subalterne. L'on demande l'alternance aux autres et on la refuse pour soi. On verra bien les porte-parole et les SG de certains partis dits d'opposition prendre leur retraite. Ils seront sans doute dans l'opposition mais ne feront plus au sens pratique, de l'opposition faciale. Ils seront plus utiles dehors que dedans. Il est cependant de l'intérêt de ce nouveau pouvoir issu du quatrième mandat d'affermir cette faible opposition. Dieu a crée ibliss (loin d'une comparaison diabolisant l'opposition, juste une image) et lui a attribué un siège dans le sang de tous les individus. Alors l'Etat devra favoriser l'émergence d'une voix qui lui soit au moins contraire. Ce sera un baromètre, un contre-pouvoir, un miroir de ses tares. Conclusion Le changement dans la continuité est une promesse. Le peuple attend. Que le sommet soit encore gardé par deux ou trois ancêtres émeut moins que tout l'appareil étatique soit l'otage de siècles additionnés. Garder les rennes le temps imparti et revigorer l'attelage est une nécessité de cheminement, tant la longue route continue. Une fraicheur doit arroser le ciel d'Algérie. Une reconfiguration entière du système de gestion doit se réaliser.